Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 9 mars 2021 à 15h00
Élection du président de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Le groupe Libertés et territoires se satisfait que la réunion de la commission mixte paritaire ait pu déboucher sur un accord concernant le texte relatif à l'élection du Président de la République. Il nous revient d'en valider les conclusions. Nous saluons l'inscription dans la loi organique du fait que le décret de convocation des électeurs ne pourra être publié moins de dix semaines avant le premier tour de l'élection car cela permettra de sécuriser juridiquement la campagne électorale présidentielle et de laisser davantage de temps aux candidats pour effectuer l'ensemble des démarches concernées.

Nous avions défendu l'idée, lors de la première lecture, et nous nous la maintenons, que l'instauration pour l'élection présidentielle du vote par correspondance pour les détenus est une mesure souhaitable qui facilitera grandement le vote de ces personnes qui ont pleinement leur place dans notre système démocratique.

Nous tenons toutefois à dire notre surprise s'agissant de l'amendement déposé par le Gouvernement au Sénat concernant le vote par anticipation et rejeté par la Haute assemblée. Nous trouvons inopportun de proposer un dispositif qui modifierait autant notre système électoral moins de vingt-quatre heures avant le début de l'examen en commission dans la deuxième chambre saisie, qui plus est en utilisant comme véhicule législatif un texte présenté comme technique et consensuel.

L'instauration d'un vote par anticipation sur machines à voter – qui pourrait se défendre – constituerait un changement majeur dans notre processus démocratique. Sa mise en oeuvre nécessiterait au préalable un débat approfondi et transparent, mobilisant l'ensemble de la société. A minima, nous aurions besoin d'une étude d'impact pour évaluer les implications d'un tel dispositif. Nous ne comprenons pas les motifs qui ont poussé le Gouvernement à agir de cette manière.

Nous soutenons le caractère obligatoire de la transmission des comptes de campagne par voie dématérialisée, l'essentiel étant que la sécurité contre la fraude soit assurée. A contrario, nous regrettons que la commission mixte paritaire ait acté le report de la transmission par voie dématérialisée des parrainages des élus pour les candidats à l'élection présidentielle : tant pour les maires que pour les candidats, cela aurait permis de simplifier les démarches.

Petit à petit, la possibilité pour un électeur de disposer de deux procurations entre dans les esprits. En dehors du contexte de pandémie, nous souhaitons que cette mesure devienne pérenne pour tous les scrutins. Nous regrettons donc qu'elle n'ait pas été d'ores et déjà introduite s'agissant de l'élection présidentielle, alors que nous l'avons autorisée concernant les élections législatives partielles, dans la loi relative aux délais d'organisation des élections municipales partielles et des élections des membres des commissions syndicales, promulguée en décembre dernier. À l'avenir, il sera difficile de revenir sur cette pratique qui favorise la participation électorale : les citoyens auraient du mal à comprendre un retour en arrière, alors que, dès avant la pandémie, nous connaissions un taux d'abstention important.

D'un point de vue plus politique, nous continuons à regretter que l'élection présidentielle soit l'alpha et l'oméga de la vie démocratique de notre République si centralisée. Cette dérive a d'ailleurs été renforcée par l'instauration du quinquennat et l'inversion du calendrier électoral. De l'élection du seul Président dépendrait la vitalité de notre démocratie ? Cela ne nous paraît pas sain. Il est grand temps de revoir l'architecture institutionnelle du pays, en renforçant les pouvoirs du Parlement et ceux des collectivités locales.

Là où, par exemple, le régime américain a tenu tant bien que mal durant ces quatre dernières années grâce à son système de checks and balances, avec un Congrès fort, appuyé sur un véritable fédéralisme, notre régime résisterait quant à lui très mal à l'arrivée d'un extrémiste ou d'un déséquilibré à sa tête, tant les contre-pouvoirs sont faibles.

En définitive, parce qu'il s'agit d'un projet de loi d'ajustement essentiellement technique, notre groupe soutiendra le texte tel qu'issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.