Intervention de Sylvie Tolmont

Séance en hémicycle du lundi 22 mars 2021 à 16h00
Impact de la crise sur la jeunesse

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvie Tolmont, SOC :

Il était dur d'avoir 20 ans en 2020, pour reprendre les propos du Président de la République ; il en est malheureusement de même en 2021. En effet, alors que cette crise plonge dans la pauvreté un million de Français supplémentaires, lesquels viendront s'ajouter aux plus de 9 millions de personnes vivant déjà sous le seuil de pauvreté, c'est bien notre jeunesse, privée de perspectives, qui en est et en sera la principale victime.

Le récent rapport de la commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise de la covid-19 sur les enfants et la jeunesse, dont j'étais membre, a mis en lumière ses impacts néfastes, que ce soit sur les conditions de vie ou les conditions d'apprentissage de nos jeunes.

La presse et les médias se sont également fait l'écho de cette souffrance en montrant les images terribles de jeunes en pleine détresse faisant la queue pour obtenir de quoi se nourrir. Dans la Sarthe, mon département, plus de la moitié des bénéficiaires de l'aide alimentaire distribuée par les Restos du coeur ont aujourd'hui moins de 25 ans.

Le temps presse et notre jeunesse désespère, comme le révèle un sondage IPSOS publié en janvier dernier, dont je vous livre certaines des conclusions : deux jeunes sur trois estiment que la crise actuelle liée à la covid-19 va avoir des conséquences négatives sur leur propre santé mentale ; 40 % des jeunes de moins de 25 ans rapportent un trouble anxieux généralisé ; un peu plus d'un jeune de moins de 25 ans sur cinq rapporte des symptômes de troubles dépressifs modérément sévères ou sévères ; presque trois jeunes sur dix ont pensé qu'il vaudrait mieux qu'ils soient morts ou ont songé à se blesser…

Cette situation est insupportable et je pense pouvoir dire sans me tromper que nous éprouvons tous ici un grave sentiment de responsabilité envers cette génération, à laquelle nous léguons déjà de lourds fardeaux et de nombreuses dettes.

À cette génération qui perd ses plus belles années et dont l'avenir se ternit de jour en jour, nous ne pouvons opposer un froid silence. En réponse à cette catastrophe, le Gouvernement a préféré multiplier les opérations de communication sur les réseaux sociaux ou encore organiser des simulacres de débat, sans enjeux ni contradiction, avec des influenceurs – lesquels ne représentent pas toute notre jeunesse, tant s'en faut.

Sur le fond, des mesures ont certes été prises, mais celles-ci ont été disparates, tardives, restrictives, mal calibrées et, au final, largement inefficaces pour répondre à l'urgence de la situation. Alors que notre groupe – à la suite de la commission d'enquête – , des associations de lutte contre la pauvreté et des organisations syndicales l'imploraient et appelaient à l'ouverture du RSA aux 18-25 ans, le Gouvernement a balayé d'un revers de main cette mesure, soutenant qu'elle aurait un effet dissuasif sur l'insertion professionnelle des jeunes.

Au lieu de cela, il a préféré généraliser le principe de l'accompagnement rémunéré de la garantie jeunes, que nous avions mise en place sous le quinquennat de François Hollande, dispositif qui s'est effectivement révélé performant mais qui ne peut à lui seul répondre au problème structurel de massification de la précarité des jeunes.

L'aide à l'insertion sur le marché du travail est peut-être une bonne chose, mais cette politique ne tient que dans un contexte de relance économique, d'ouverture des commerces et de création de postes, ce qui n'est pas encore envisageable en l'état actuel de la pandémie. Elle n'est d'autre part pas adaptée à la situation des étudiants.

C'est pourquoi mes collègues Boris Vallaud et Hervé Saulignac ont défendu, au nom de notre groupe, la mise en place d'un « minimum jeunesse », dispositif visant à ouvrir un revenu de base à 18 ans de façon automatique et inconditionnelle, ainsi qu'une dotation pour la conduite d'un projet de formation, d'entreprenariat ou lié à la mobilité. Même circonscrite à la seule période de cette crise sanitaire, cette avancée a été rejetée, mettant ainsi à mal nos idéaux de justice, de solidarité, et nos espoirs d'émancipation pour notre jeunesse.

En effet, si certains jeunes peuvent compter sur le soutien matériel de leurs parents, d'autres, non moins méritants, au contraire, sont aujourd'hui laissés à la dérive, trahissant ainsi l'idée que se fait concrètement le Gouvernement de l'égalité des chances, de l'ascenseur social et du mérite républicain.

C'est pour toutes ces raisons, et en faveur d'une nation qui reconnaît à chacun de ses jeunes le même droit à l'épanouissement personnel et professionnel, que nous vous appelons à un plan d'urgence national en faveur de la jeunesse.

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