Intervention de Sarah El Haïry

Séance en hémicycle du lundi 22 mars 2021 à 16h00
Impact de la crise sur la jeunesse

Sarah El Haïry, secrétaire d'état chargée de la jeunesse et de l'engagement :

Ce débat est important car, vous l'avez dit les uns et les autres, la jeunesse est le trésor de notre nation. Depuis un an maintenant, l'ensemble des jeunes de notre pays subissent les conséquences de la crise sanitaire, bien qu'avec plus ou moins de violence, plus ou moins de difficultés.

Je partage votre constat, madame Rubin : la précarité des jeunes existait avant l'épidémie et a été accentuée par la crise. Il en va malheureusement toujours ainsi : toute crise accélère l'augmentation des inégalités. C'est une réalité.

Un an après le déclenchement de la crise, nous pouvons observer ses conséquences économiques, sociales et psychologiques sur la jeunesse, mais aussi ses conséquences sur la précarité et l'engagement des jeunes. C'est avec beaucoup de gravité et de sérieux que le Gouvernement entend répondre aux besoins des différents groupes qui constituent la jeunesse, en apportant des réponses adaptées à chacun d'entre eux.

Mme Rist l'a souligné, les mesures déclinées par le Gouvernement ont pris plusieurs formes et tout d'abord celle du plan « 1 jeune, 1 solution », qui ne s'est pas arrêté à la première annonce et qui a été progressivement complété pour tenir compte de l'évolution de la crise. Les besoins de la jeunesse ont changé entre le mois de mars 2020, le mois de janvier 2021 et aujourd'hui. Quelles ont été les réponses du Gouvernement depuis le début de la crise ? Elles ont tout d'abord été économiques, pour favoriser l'insertion des jeunes sur le marché du travail.

Nous avons soutenu les entreprises qui recrutaient de différentes manières, évidemment en encourageant les contrats d'apprentissage et de professionnalisation grâce au versement d'une aide exceptionnelle de 8 000 euros pour les apprentis majeurs et de 5 000 euros pour les apprentis mineurs, mais aussi en stimulant les embauches des jeunes de moins de 26 ans par le versement d'une prime de 4 000 euros.

Vous l'avez dit, madame Valentin : soutenir l'apprentissage est essentiel dans cette période particulièrement difficile. En 2020, nous avons dépassé les 550 000 contrats d'apprentissage signés, soit un chiffre en augmentation par rapport à l'année précédente malgré la crise sanitaire.

Vous avez souligné la situation très particulière des apprentis dans les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. Nous partageons votre préoccupation. J'ai rencontré récemment à Angers et en Île-de-France des jeunes en apprentissage qui vivent cruellement le fait de ne pas pouvoir suivre leur formation pratique. À cet égard, je souhaite saluer les très belles initiatives prises par certains d'entre eux, évoquées par Sylvain Waserman et Aina Kuric et qui témoignent d'une admirable créativité. Afin de pratiquer leur futur métier, certains apprentis cuisinent actuellement pour les Restos du coeur et pour des associations caritatives. Ce n'est certes pas l'idéal pour ces métiers de passion et d'excellence : il est indispensable que les apprentis retrouvent rapidement le déroulement normal de leur formation, ce que nous souhaitons tous. Je partage, sur ce sujet, les différentes préoccupations qui ont été exprimées.

Sur le plan économique, le Gouvernement a la volonté d'accompagner les métiers qui ont du sens. Je pense bien sûr aux parcours emploi compétences et aux 2 000 créations d'emplois FONJEP – fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire.

S'agissant de la santé des jeunes, M. Lambert l'a dit, les réponses doivent de toute évidence prendre deux formes différentes.

Tout d'abord, le dispositif du chèque psy nécessite, en effet, un accompagnement réel. Le Président de la République a souhaité son déploiement massif avec le soutien des médecins. Ce déploiement est encore trop lent, je vous l'accorde, monsieur le député, mais la mobilisation est collective. Avant cette mesure, en raison du frein financier, les jeunes n'avaient pas accès à un accompagnement psychologique. C'est une réalité à laquelle nous avons apporté une première réponse.

Les jeunes ont par ailleurs besoin de rompre leur isolement, et nous soutenons les associations qui agissent en ce sens, non pas par une approche médicale, mais grâce à l'écoute qu'elles proposent aux étudiants. L'isolement des jeunes est une conséquence lourde de la crise sanitaire. Pour y répondre, le soutien du monde associatif est important, mais le retour sur les bancs de l'université sera de toute évidence décisif puisqu'il permettra aux étudiants de retrouver leurs camarades.

La ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, Frédérique Vidal, est particulièrement mobilisée sur ce sujet. Elle a la volonté de permettre aux étudiants de continuer à suivre des cours en présentiel à l'université, y compris dans les seize départements touchés par les nouvelles restrictions sanitaires.

En ce qui concerne les conséquences de la crise en matière de précarité, vous avez raison, madame Tolmont : l'universalisation de la garantie jeunes est nécessaire. Elle ne constitue pas l'unique réponse à la précarité des jeunes, mais elle permettra aux jeunes les plus en difficulté de retrouver une certaine dignité et de bénéficier de l'accompagnement humain nécessaire pour s'en sortir, ce qui rejoint l'observation de Mme Faucillon sur la question des APL.

La ministre déléguée chargée du logement, Emmanuelle Wargon, a demandé à la Caisse nationale d'allocations familiales – CNAF – et à la Caisse nationale de la MSA – mutualité sociale agricole – d'envisager une évolution du statut du contrat de professionnalisation vers le statut du contrat d'apprentissage. Les travaux sont en cours et nous ferons en sorte que la réforme des APL et leur calcul en temps réel ne débouchent pas sur une impasse. En tout état de cause, madame Faucillon, sachez que nous resterons attentifs à ce dossier.

Sur la question de l'engagement, vous avez bien raison, monsieur Waserman : nous devons susciter l'élan et l'énergie de notre jeunesse en l'accompagnant dans cette dynamique. Vous avez évoqué la création de 100 000 missions de service civique supplémentaires en 2020-2021. Nous avons fait évoluer les règles de ce dispositif pour permettre aux étudiants de s'en saisir plus largement. La modulation de sa durée hebdomadaire, permettant une organisation beaucoup plus souple, permettra aux étudiants de sortir de leur isolement et redonnera du sens à ces missions. Comme nous y appelle Mme Kuric, il s'agit d'aider cette génération à prendre pleinement part à la vie de la société et à trouver sa place. Nous avons tous conscience qu'elle fait partie de la solution. Les missions de service civique, que les étudiants peuvent accomplir en bénéficiant par ailleurs d'une bourse ou d'autres aides, s'inscrivent précisément dans cette recherche du bien commun et d'une utilité sociale pour chacun.

Quant aux conséquences de la crise sanitaire qui touchent spécifiquement les étudiants, Frédérique Vidal y est particulièrement attentive. C'est la raison pour laquelle, rappelons-le, elle a souhaité la prolongation des bourses sur critères sociaux, mais également la création du fonds national d'aide d'urgence, cette aide financière exceptionnelle qui s'adresse aux étudiants en situation de précarité. Personne ne peut s'habituer au spectacle d'étudiants qui font la queue devant des associations pour manger ! Tout étudiant qui en a besoin doit pouvoir continuer à prendre son repas au CROUS. Le système est encore long et compliqué, je le sais, mais de nouvelles aides et des accompagnements renforcés sont proposés aujourd'hui. Je rencontre toutes les semaines des étudiants et des jeunes qui ne savent pas qu'ils pourraient bénéficier du fonds national d'aide d'urgence ou qu'ils pourraient déposer une nouvelle demande de bourse.

Le Gouvernement déploie une multitude de réponses pour venir en aide aux jeunes de notre pays. Elles ne constituent pas un millefeuille de réponses, mais des réponses spécifiques adaptées à chaque problème. L'élargissement de la mesure des repas CROUS à 1 euro à tous les étudiants, qu'ils soient boursiers ou non, et le gel des frais des droits d'inscription dans les universités pour la deuxième année consécutive témoignent de la volonté de la ministre de l'enseignement supérieur de soutenir les étudiants dans la période actuelle.

Cela répond aussi à la question de Mme Kuric sur la pérennisation des mesures. Le Premier ministre l'a lui-même annoncé, les aides du plan « 1 jeune, 1 solution » sont prolongées jusqu'à la fin de l'année, ce qui porte l'investissement dans le plan de relance de 7 à 9 milliards d'euros. Nous voulons accompagner les jeunesses de France jusqu'au bout.

Monsieur Labille, vous l'avez dit : nous devons réussir à renforcer le sentiment d'unité au sein de la jeunesse. Pour cela, nous nous attachons à conjuguer la réponse à la crise et à ses conséquences avec la nécessité d'accompagner une jeunesse qui se trouve davantage bousculée que d'habitude. Ainsi, par exemple, nous avons largement déployé le service national universel, réservé aux jeunes de 15 à 17 ans, et nous continuons à le faire – les inscriptions sont ouvertes jusqu'au 20 avril. Nous le faisons parce qu'il est nécessaire de créer de l'unité en amenant à se croiser des jeunes qui ne se croisent plus, afin qu'ils se sentent appartenir à un collectif qui leur donne l'énergie d'affronter l'avenir.

Je crois aussi en la nécessité d'accompagner les jeunes qui sont le plus en difficulté et qui ont besoin d'air, en particulier grâce au dispositif « vacances apprenantes » que nous avons pérennisé cette année. L'année dernière, il a touché près d'1 million de jeunes – 980 000 exactement – qui ont besoin de partir en colonie de vacances et de vivre des moments d'école buissonnière.

Il est donc nécessaire et essentiel de renforcer le sentiment d'unité dans notre pays : il ne faudrait pas laisser s'imposer l'idée d'une guerre de générations dans laquelle la jeunesse serait sacrifiée. Nous avons une responsabilité collective que chacun doit assumer en jouant son rôle respectif, à son niveau d'engagement, en apportant des réponses à mesure que les conséquences de la crise se font sentir. Monsieur Lambert, vous l'avez dit : la réponse doit donner l'élan d'un choc de confiance que nous devons à nos jeunesses – dans leur diversité – , dans l'espoir d'un retour à la normale qui se fonde en grande partie sur le vaccin.

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