Intervention de Élisabeth Toutut-Picard

Séance en hémicycle du mercredi 24 mars 2021 à 15h00
Évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Toutut-Picard, LaREM :

Selon l'OMS, plus de 100 000 personnes décèdent chaque année en France de pathologies chroniques liées à l'environnement – cancers, maladies cardiovasculaires et endocriniennes, diabète, obésité – , ce qui représente 15 % de la mortalité totale enregistrée dans notre pays. D'après les données de Santé publique France publiées en 2017, la pollution de l'air extérieur par les particules d'un diamètre inférieur à 2,5 microns – PM 2,5 – serait, à elle seule, responsable de près de 50 000 morts prématurées chaque année. L'étude Agrican – agriculture et cancer – , publiée en novembre 2020, établit un lien direct entre l'incidence de certains cancers rares significativement plus élevée chez les agriculteurs et l'utilisation de produits phytosanitaires par cette catégorie professionnelle.

Par ailleurs, l'Inspection générale des affaires sociales – IGAS – a estimé en 2017 que les conséquences économiques des seuls effets de la pollution de l'air et des perturbateurs endocriniens atteignaient près de 8 % du PIB. La dégradation de l'environnement représente donc un surcoût pour notre budget et constitue l'une des toutes premières causes de mortalité en France.

Le concept de santé environnementale, théorisé par l'OMS en 1990, intègre ces interactions systémiques entre notre santé, le dérèglement climatique et les nombreux polluants présents dans notre environnement, qu'il s'agisse de perturbateurs endocriniens ou d'autres produits chimiques affectant la qualité de l'air, de l'eau, du sol et de l'alimentation. L'épidémie de covid-19 a, par ailleurs, soulevé la question des interactions entre les êtres humains, les animaux sauvages et les écosystèmes. Une nouvelle approche scientifique globale, dite One Health – « Une seule santé » – , souligne ainsi que la santé des hommes dépend aussi de celle des animaux et des écosystèmes.

Pour mieux cerner ces enjeux et établir un bilan des politiques publiques actuelles, une commission d'enquête composée de trente députés a été créée en juin 2020. En douze semaines, de septembre à décembre, elle a reçu plus de soixante personnes représentant les parties prenantes dans le domaine de la santé environnementale. Ces auditions ont permis d'identifier les principaux défis liés à cette question : défi de gouvernance nationale et territoriale ; défi en matière de recueil et de traitement des données scientifiques ; défi en matière de recherche, de formation et d'information ; nécessité d'adopter une approche « Une seule santé ».

Le sentiment d'impuissance collective qui est ressorti de ces auditions face à des carences organisationnelles pénalisantes est compensé par le constat selon lequel la France est le seul pays d'Europe à avoir instauré une politique publique structurée en matière de santé environnementale. Le plan national santé environnement, outil programmatique de la politique publique française, est considéré comme une vraie chance. Cependant, si les versions successives de ce plan contiennent de nombreuses actions intéressantes, inspirées des travaux du groupe santé environnement – GSE – qui préside à leur élaboration, cette politique reste, malheureusement, souvent incantatoire.

Les deux rapports d'évaluation publiés en décembre 2018 par l'IGAS et par le Conseil général de l'environnement et du développement durable – CGEDD – soulignent les carences d'une politique par ailleurs mal connue des élus et de la population. Les travaux de la commission d'enquête ont permis d'analyser ces difficultés et de proposer des solutions pour y remédier. Pour ma part, en ma qualité de présidente de cette commission, j'ai présenté soixante et une propositions très concrètes. Il est en effet urgent de mieux structurer cette politique en lui fixant des objectifs quantifiés et en lui allouant des moyens appropriés, de dynamiser la recherche sur l'exposome et de former et d'informer tous les acteurs. Notre politique de santé publique, jusque-là essentiellement curative, doit développer sa dimension préventive et anticiper toutes les menaces qui pèsent sur le vivant, dont nous faisons partie.

Ma question est donc la suivante : dans quelle mesure les propositions des membres de la commission d'enquête seront-elles reprises dans le plan national santé environnement 4 que le Gouvernement officialisera prochainement ?

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