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Jean-Michel Mis
Question N° 2878 au Ministère des solidarités


Question soumise le 14 novembre 2017

M. Jean-Michel Mis attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les effets nocifs des traitements anticancéreux. Chaque année en France, 200 patients atteints d'un cancer meurent, non pas à cause de leur maladie, mais à cause d'un médicament anticancéreux, le 5-Fluorouracile (5-FU), qui s'est avéré toxique pour eux car ces malades présentaient un déficit enzymatique, déficit en DPD (dihydropyrimidine déshydrogénase). Le 5-Fluorouracile (5-FU) et sa prodrogue, la capécitabine sont des molécules très largement utilisées en cancérologie puisqu'elles entrent dans le traitement de près de la moitié des cancers : colorectal, œsophage, estomac, seins et voies aérodigestives supérieures. Les personnes présentant un déficit en DPD sont à haut risque de présenter des effets indésirables graves, voire mortels, lors d'un traitement par 5-FU. L'intolérance totale ou partielle concerne de 0,3 % à près de 5 % de la population. Plusieurs études révèlent que jusqu'à 15 % des usagers subissent des effets indésirables assez invalidants pour forcer leur hospitalisation. À titre d'exemple, dans la Loire, on estime qu'environ 600 nouveaux patients doivent subir une chimiothérapie chaque année. 60 % de ces traitements contiennent du 5-FU. Un test à partir d'une simple prise de sang pré-thérapeutique pourrait éviter ces drames, mais malheureusement, tous les oncologues ne le pratiquent pas automatiquement. C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement envisage de rendre ce test obligatoire et systématique.

Réponse émise le 9 janvier 2018

Les toxicités aiguës aux fluoropyrimidines (5-fluorouracile et capecitabine) chez les patients présentant un déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD) font l'objet d'une attention et d'une surveillance particulières des autorités sanitaires nationales et européennes depuis plusieurs années. Les toxicités avec évolution fatale par surexposition en lien avec un défaut de métabolisation de fluoropyrimidines sont en effet rapportées chez des patients présentant un déficit en DPD. Les médicaments anticancéreux à base de fluoropyrimidine sont largement utilisés en cancérologie, on estime, selon des données de l'institut national du cancer (INCA), qu'environ 90 000 patients y sont nouvellement exposés chaque année, pour le traitement de cancers avancés digestifs, colorectaux, mammaires, ovariens, ou des voies aérodigestives supérieures. Il faut toutefois distinguer les sujets ayant un déficit enzymatique total, qui représentent environ 0.1 à 0.5% de la population générale de ceux qui ont un déficit partiel qui représentent entre 3 à 10%. Actuellement, ce risque est décrit dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP), à destination des professionnels de santé, de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de la capecitabine (XELODA), et une mise à jour de l'information contenue dans les RCP des spécialités à base de 5-fluorouracile est également en cours afin d'intégrer une information sur ce risque. Plus précisément, il est contre-indiqué d'utiliser les fluoropyrimidines chez les patients ayant un déficit enzymatique total connu, car ces patients sont des patients considérés comme extrêmement à risque de développer une toxicité. En revanche, pour les patients ayant un déficit partiel, l'activité de la DPD étant variable, un ajustement de la dose à administrer doit être réalisé. Cependant, en l'état des connaissances actuelles, il est difficile de statuer sur le niveau adéquat de diminution de la dose en fonction de la capacité métabolique du patient, afin de traiter la pathologie cancéreuse dans les meilleures conditions d'efficacité et de sécurité. Aussi, le comité européen de pharmacovigilance et d'évaluation des risques (PRAC), siégeant auprès de l'Agence européenne du médicament (EMA), a été interrogé début 2017 sur la pertinence du dépistage génotypique systématique du déficit en DPD, préalablement à l'initiation d'un traitement par 5-fluorouracile ou capecitabine, ainsi que des adaptations posologiques de ces spécialités pharmaceutiques pour les patients présentant un déficit partiel en DPD. En janvier 2017, en raison notamment des incertitudes quant aux données d'efficacité de doses réduites, de la disponibilité des tests de génotypage et de la prise en charge de ces tests dans l'ensemble des états membres de l'Union Européenne, le PRAC a sollicité l'avis du groupe de travail de pharmacogénomique de l'EMA. Suite à l'avis du groupe de travail de pharmacogénomique, le PRAC a recommandé la mise à jour des RCP du capecitabine (XELODA) et des spécialités contenant du 5-fluorouracile s'administrant par voie intraveineuse, avec des informations complémentaires sur le génotypage du gène DPYD, codant pour l'enzyme DPD. De plus, au vu de l'hétérogénéité d'accès au test de phénotypage dans les différents pays membres de l'Union Européenne, le PRAC a estimé que seul le génotypage est à considérer à ce stade. Les tests de génotypage et phénotypage permettant la détection de la plupart des déficits en DPD sont actuellement disponibles en France (coût de 110,7 € pour le génotypage et de 40,5 € pour le phénotypage, liste complémentaire d'actes). En revanche, il n'existe pas de consensus au niveau national et international sur les modalités de dépistage. Néanmoins, des recommandations sur les modalités de dépistage des déficits en DPD ont été publiées par le groupe GPCO-UNICancer en 2016. Parallèlement, en raison de cet enjeu de santé publique, un projet de recherche clinique a fait l'objet d'une promotion dans le cadre du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) 2014 : FUSAFE « Dépistage du déficit en dihydropyrimidine deshydrogénase (DPD) pour éviter les toxicités sévères aux fluoropyrimidines : Méta-analyses et état des lieux des pratiques en France. », coordonné par le Groupe de Pharmacologie Clinique Oncologique (GPCO) et le Réseau national de pharmacogénétique (RNPGx) actuellement en cours. Ce projet vise notamment à clarifier les performances des différentes stratégies existantes de dépistage du déficit en DPD – génotypage et phénotypage et élaborer des propositions collégiales pour une future prescription sécurisée des fluoropyrimidines basée sur le dépistage pré-thérapeutique des déficits en DPD. Les conclusions finales de ce PHRC sont attendues pour début 2018. Elles devront faire l'objet de recommandations nationales sous l'égide de l'INCA.

1 commentaire :

Le 28/02/2018 à 14:05, Brunori a dit :

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Le médecin doit-il avoir l'obligation d'informer le patient le rend-t-il responsable si ce n'est pas fait

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