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Jérôme Lambert
Question N° 10273 au Ministère des solidarités


Question soumise le 3 juillet 2018

M. Jérôme Lambert attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur un vide juridique très préjudiciable aux assistants maternels. En effet, les assistants maternels sont fréquemment confrontés, dans l'exercice de leur profession, à des accusations de maltraitance ou d'abus sexuels dont les conséquences sont graves tant au niveau professionnel qu'au niveau personnel et familial. Lorsqu'une telle mise en cause survient, parfois sur simple dénonciation, et avant même qu'une enquête soit diligentée et que l'assistant maternel soit informé ou entendu, avant même que n'intervienne une quelconque décision de justice, l'assistant maternel se voit retirer les enfants confiés. L'agrément est alors suspendu sur simple décision du président du conseil départemental. La durée de la suspension est de quatre mois. Au-delà et même sans nouvel élément, si l'enquête n'est pas terminée, l'agrément est définitivement retiré. L'assistant maternel pourra percevoir une indemnité de suspension d'agrément pendant les quatre mois, puis sera licencié par son employeur. Les assistants maternels devraient pouvoir bénéficier de la présomption d'innocence dont bénéficient, entre autres, tous les autres professionnels de l'enfance dans les mêmes circonstances. Ainsi, il pourrait être envisageable de prolonger la suspension de l'agrément jusqu'au terme de la procédure judiciaire. Il lui demande si une réponse législative ou réglementaire rapide pourrait être apportée à cette situation très préjudiciable pour ces professions devenues aujourd'hui essentielles dans l'équilibre de la société.

Réponse émise le 10 juillet 2018

Les professions d'assistant maternel et d'assistant familial ont en commun de concerner l'accueil d'enfants dès leur plus jeune âge et pour des périodes parfois de longue durée au domicile de ces professionnels et pour les assistants maternels également au sein d'une maison d'assistants maternels. Il s'agit de professions réglementées par le législateur, lequel a en effet prévu de conditionner cette activité professionnelle à l'octroi d'un agrément accordé par une personne publique. L'agrément dispensé aux assistants familiaux permet de vérifier que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé, et l'épanouissement de l'enfant en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. Le cadre d'exercice professionnel des assistants familiaux situé dans la sphère privée peut dans certains cas soulever des problèmes en cas de suspicion de maltraitance de l'assistant maternel ou familial sur les enfants accueillis. Dans certaines situations le principe de précaution et de protection amène l'employeur à retirer les enfants confiés à l'assistant familial dès que des accusations surviennent. La suspension de l'agrément peut être décidée par le président du conseil départemental en cas d'urgence (art. L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles), notamment s'il existe une suspicion de maltraitance ou de danger grave et imminent pour la santé ou la sécurité des enfants accueillis. La décision de suspension s'accompagne dans ce cas de garanties pour l'assistant familial. Elle doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés (art. L. 421-6). La commission consultative paritaire départementale est obligatoirement informée et la durée de la suspension est de quatre mois (art. R. 421-24). La décision de suspension peut être contestée selon les voies de recours de droit commun (recours gracieux, recours contentieux). En application des articles L. 423-8 et D. 423-3 du code de l'action sociale et des familles, l'assistant familial employé par une personne morale de droit privé perçoit une indemnité compensatrice qui ne peut être inférieure par mois, au montant minimum de la part correspondant à la fonction globale d'accueil définie au 1° de l'article D. 423-23. Enfin, à sa demande, l'assistant familial peut parfois bénéficier d'un accompagnement psychologique même si celui-ci ne concerne juridiquement que les assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé. Si au terme des quatre mois de suspension, au regard notamment de l'enquête administrative qu'il aura provoquée, le président du conseil départemental estime qu'un risque de maltraitance est avéré, il doit, indépendamment de l'enquête pénale le cas échéant toujours pendante, retirer l'agrément dans la mesure où le principe de protection de l'enfant prime. La question de l'éventuelle réparation du préjudice subi par un assistant familial ayant fait l'objet d'une suspension d'agrément, notamment suite à des suspicions de maltraitance, considérées postérieurement comme non fondées par la justice pénale, peut se poser. Dès lors qu'une décision administrative lui fait grief, l'assistant familial rétabli dans ses droits par le juge, comme tout justiciable se trouvant dans cette situation, peut demander réparation du préjudice causé par la décision dans les conditions de droit commun. En cas de refus d'indemnisation par le département, l'assistant familial concerné peut saisir le juge administratif d'un recours contre cette décision. Les conseils départementaux et les syndicats et fédérations d'assistants familiaux interpellent depuis plusieurs années les pouvoirs publics sur la conciliation des deux principes d'intérêt supérieur de l'enfant qui impose de le protéger et de le retirer de la famille d'accueil dès lors qu'il existe une suspicion de maltraitance et le principe de présomption d'innocence. Afin d'apporter des réponses à ces interpellations, d'homogénéiser les pratiques des décideurs sur le territoire et de de ne pas fragiliser la situation professionnelle de l'assistant familial ou maternel et de respecter ses droits, le ministère en charge des affaires sociales avait travaillé en 2016 avec un groupe d'experts et de représentants des départements et des professionnels pour permettre de concilier au mieux ces deux principes. Un guide doit désormais être publié en septembre 2018 suite à ces travaux. Il permettra de venir en appui des assistants familiaux, de leurs employeurs et des conseils départementaux par un rappel du cadre réglementaire et des procédures à suivre, ainsi qu'en partageant les recommandations et les bonnes pratiques qui ont été soulevées par le groupe d'experts, de praticiens et de représentants des départements. Les travaux n'ont pas mis en avant de nécessité d'évolutions législatives par rapport au cadre actuel.

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