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Didier Quentin
Question N° 12091 au Ministère de la justice


Question soumise le 11 septembre 2018

M. Didier Quentin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la recrudescence de la délinquance routière. En effet, beaucoup de familles de victimes de la route se plaignent de la non-application des peines encourues ou de nombreux classements sans suite. Il en résulte une grande indignation devant la réponse pénale apportée aux comportements dangereux des conducteurs qui provoquent, sur les routes, de graves accidents, parfois mortels. Un durcissement des peines est donc attendu, notamment par la requalification d'homicide involontaire en homicide routier, en cas de circonstances aggravantes, ainsi que par la réintroduction des peines planchers. Les contours de ce délit se fonderaient sur le modèle de l'homicide involontaire prévu à l'article L. 221-6 du code pénal, auquel s'ajouterait l'article L. 221-8 du code pénal qui prévoit des peines complémentaires aux infractions commises par des personnes physiques. De plus, il serait opportun d'instaurer une prise en charge immédiate des victimes dans chacun des départements, ainsi que de créer une journée spécifique, dans chaque tribunal, pour juger des homicides routiers, afin de mieux respecter la dignité des victimes. Par ailleurs, il est étonnant que certaines associations perçoivent des subventions de l'État, pour défendre les familles de victimes de la route et pas d'autres, alors que dans certaines figurent des avocats au sein de leur conseil d'administration... Il conviendrait donc d'instaurer une certaine équité entre elles. Enfin, les associations souhaitent l'organisation d'une journée nationale des victimes de la route et de la délinquance routière, avec comme date le 16 mai, pour mettre en évidence l'importance de la prévention routière. C'est pourquoi il lui demande les mesures qu'elle entend prendre pour mieux rassurer les familles des victimes et mieux prendre en compte les drames liés à la délinquance routière.

Réponse émise le 9 octobre 2018

Chaque année, près de 40 % des jugements correctionnels sanctionnent des infractions au code de la route. Les dispositions répressives de ce code ont été renforcées à plusieurs reprises, par la création, notamment, de peines complémentaires obligatoires ou automatiques, telles que la confiscation du véhicule du condamné ou l'annulation de son permis de conduire. La répression des délits d'homicide et blessures involontaires par conducteur d'un véhicule terrestre à moteur n'échappe pas à cette politique de fermeté. Ainsi, le code pénal prévoit des peines aggravées lorsque l'homicide ou les blessures involontaires ont été causés à l'occasion de la conduite d'un véhicule. L'article 221-6-1 du code pénal prévoit des peines d'emprisonnement s'élevant de 5 à 10 ans en fonction de l'existence d'une ou plusieurs circonstances aggravantes. En cas de récidive légale, ces peines sont doublées. En ce sens, les peines encourues pour un homicide involontaire par conducteur sont plus lourdes que celles prévues pour un homicide involontaire de l'article 221-6 du code pénal. En effet, ce dernier article prévoit des peines d'emprisonnement s'élevant de 3 à 5 ans en fonction de l'existence d'une circonstance aggravante. Par ailleurs, l'article 221-8 du code pénal énumère d'ores et déjà les peines complémentaires spécifiquement applicables au délit d'homicide involontaire par conducteur. Enfin, s'il peut s'envisager qu'un véhicule soit considéré comme une arme lorsqu'il est utilisé à des fins volontairement homicides, ce caractère volontaire ne saurait se déduire d'une conduite à risque, quel que soit le degré de danger qu'elle peut faire courir aux autres usagers. Dès lors, aucune modification du droit existant n'est actuellement envisagée. La création d'audiences dédiées aux homicides involontaires par conducteurs est une pratique d'ores et déjà en vigueur dans certaines juridictions. Améliorer l'accompagnement des victimes des accidents de la circulation et de leurs familles revêt une dimension essentielle dans le traitement judiciaire des délits routiers. Le Comité interministériel de la Sécurité Routière du 2 octobre 2015 a placé cet enjeu au cœur de ses recommandations. Le ministère de la justice a mis en place des mesures tendant à accélérer et améliorer les informations données aux victimes, notamment par la disponibilité et la professionnalisation de leurs interlocuteurs. Le ministère de la justice s'engage depuis plusieurs années en faveur du soutien financier des associations d'aide aux victimes sur l'ensemble du territoire national. Le budget de l'aide aux victimes a quasiment doublé en trois ans, passant de 15 millions d'euros en 2015 à 27,7 millions d'euros en 2018. Le Service de l'Accès au Droit, à la Justice et de l'Aide aux Victimes apporte ce soutien financier à des associations d'aide aux victimes dans la France entière via notamment le réseau France Victimes. Cette fédération comprend 132 associations d'aide aux victimes généralistes qui accompagnent toute victime en apportant un soutien psychologique, juridique, social. Des associations nationales de victimes de violences routières également soutenues (la Ligue contre les Violences Routières et l'Association Victimes et Citoyens contre l'Insécurité Routière) peuvent aussi contribuer à la prise en charge de ces victimes. L'Association Victimes et Citoyens intervient d'ailleurs dans 24 hôpitaux et centres de rééducation et des associations d'aides aux victimes, membres du réseau France Victimes interviennent également au sein de 29 hôpitaux. Prenant en considération les demandes formulées par de nombreuses associations depuis plusieurs années, le ministre de l'intérieur a saisi le Conseil national de la sécurité routière (CNSR), afin de recueillir son avis sur l'organisation d'une journée des victimes de la route. Lors de son assemblée plénière du 29 novembre 2013, le CNSR a recommandé de retenir comme date celle de la journée européenne des victimes, fixée au 22 février, en indiquant que cette journée doit être « le moyen de mieux connaître les victimes d'accidents de la circulation », et qu'elle doit aussi être « le point d'étape annuel des travaux menés en vue d'une amélioration des suites de l'accident ». Enfin, suivant une résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies pour la sécurité routière adoptée en 2005 encourageant les pays à célébrer chaque année, le troisième dimanche de novembre, la journée mondiale du souvenir des victimes des accidents de la route, sont organisées à cette date, en France, différentes actions en général à l'initiative des associations de victimes de la route.

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