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Hubert Wulfranc
Question N° 12132 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 18 septembre 2018

M. Hubert Wulfranc alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les conséquences du désengagement financier de l'État de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) pour le financement des associations naturalistes en charge de l'acquisition, la bancarisation, la validation et la valorisation des données collectées par ces structures. Le 7 août 2018, les présidents du Groupe mammalogique normand, du Groupe ornithologique normand, du Groupe d'étude des invertébrés armoricains et de l'Union régionale des centres permanents d'initiatives pour l'environnement de Normandie ont adressé un courrier commun au ministère de la transition écologique et solidaire faisant part de leur inquiétude quant à la pérennité de leurs missions de connaissance et d'expertise devant le désengagement de plusieurs de leurs partenaires publics. L'Agence de l'eau de Seine-Maritime a ainsi indiqué ne plus pouvoir financer les projets conduits par les associations naturalistes à la suite de la création de l'AFB qu'elle finance. Si l'AFB bénéficiait à sa création en 2017, de 186 millions d'euros versés par les Agences de l'eau et de 32 millions alloués sur le budget de l'État, cette dernière enveloppe a tout simplement été supprimée en 2018. Le budget de l'AFB repose dorénavant uniquement sur les Agences de l'eau, ce qui, de fait, aboutit à un financement moindre pour les actions sur la qualité des milieux aquatiques et pour la biodiversité. L'AFB, désignée comme principal organisme financeur n'a pas les capacités financières pour assumer ce rôle. En effet, l'AFB, née à moyens constants de la fusion de quatre établissements publics (l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, les parcs nationaux, l'Agence des aires marines protégées et de l'Atelier technique des espaces naturels) s'est vue confier des missions supplémentaires en plus de celles attribuées aux anciennes structures telles que la mise en place d'un plan national pour la biodiversité. Si les agents de l'AFB sont déjà dans l'incapacité de répondre à l'ensemble des missions qui leur ont été confiées, les moyens manquent tout simplement pour financer les associations naturalistes partenaires de l'AFB. Par ailleurs, ces mêmes associations dénoncent l'abandon progressif des conventions-pluri-annuelles d'objectifs par tous les financeurs publics à la faveur de multiples appels à projet, d'appels d'offres ou encore d'appels à manifestation d'intérêt qui compromettent leurs missions d'observatoires permanents et mobilisent un temps de travail croissant improductif sur le portage administratif des dossiers. Il en va de même de la pression impérative des partenaires publics français qui exigent le recours à des financements européens, lesquels mettent gravement en difficulté les trésoreries des associations du fait de délais de paiement extrêmement longs. La survie même des têtes de réseaux naturalistes régionales dans le domaine de la connaissance de la biodiversité est aujourd'hui posée du fait de l'assèchement de leurs financements publics, notamment de l'Agence française de la biodiversité et des Agences de l'eau. Dans un contexte d'urgence écologique - 23% des espèces évaluées par l'Observatoire national de la biodiversité sont aujourd'hui menacées de disparition, 133 espèces déjà éteintes pour des raisons anthropiques, les ruchers se meurent, un tiers des populations d'oiseaux ont disparu en 15 ans - le Gouvernement est tenu de renforcer son action en faveur de l'environnement. Par conséquent, il lui demande quelles actions il entend prendre pour renforcer les moyens financiers et humains de l'AFB ainsi que pour pérenniser le travail d'observation du réseau d'associations naturalistes en région.

Réponse émise le 27 novembre 2018

La situation financière et administrative des associations naturalistes locales est fragile. Ces structures et leurs membres, salariés comme bénévoles représentent des forces vives indispensables à une connaissance fine de nos écosystèmes et constituent une ressource précieuse venant en appui des équipes des services de l'État et opérateurs de l'eau et de la biodiversité. Cette importance a été soulignée dans l'axe 5 du plan biodiversité présenté le 4 juillet dernier. Pour autant, le Gouvernement se trouve face à une exigence de respect des engagements budgétaires de la France en matière de maîtrise des dépenses et du déficit public et de réduction de la pression fiscale, exigence qui incite à la plus grande prudence quant à tout engagement inconsidéré sur une hausse des financements publics dans le domaine. Cette prudence est d'autant plus de rigueur que le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, est attaché au principe d'autonomie des établissements publics, et donc de respect des prérogatives des conseils d'administration et des organes dirigeants dans leur marge d'appréciation de l'opportunité des aides à apporter, ainsi que des modalités de mobilisation des parties prenantes telles que les appels à projet. Ceci étant dit, il convient de ne pas laisser penser que le ministère de la transition écologique et solidaire et ses opérateurs ne mèneront aucune action en la matière. La programmation 2019-2024 des agences de l'eau doit s'inscrire dans un plafond de redevances qui totalisera 12,63 milliards d'€ sur 6 ans (soit 2,105 milliards par an). Dans sa dernière lettre de cadrage des XIèmes programmes d'intervention des agences de l'eau en date du 27 juillet 2018, le ministre insiste sur l'importance du maintien des interventions des agences de l'eau en faveur de la connaissance environnementale. Le nouveau programme de l'Agence de l'eau Seine Normandie vient d'être approuvé par les instances de bassin : celui-ci prévoit une intervention en faveur de la restauration des milieux humides et aquatiques, élargie aux zones connectées aux milieux marins ou humides, et à la trame verte lorsque celle-ci joue plusieurs rôles pour la biodiversité et la protection de l'eau. Le volume financier des aides est maintenu à un haut niveau correspondant à celui du 10ème programme (340 M€ d'aides pour 2019-2024), alors même que l'ensemble du programme est réduit de 12 %. Ce programme permet de financer des projets d'études et d'acquisition de connaissance, dans la mesure où ils sont liés à court ou moyen terme à un plan d'action ou à des travaux de restauration, voire à une stratégie d'actions partagée. Il est primordial, comme le suggère ce cadrage, que cette consolidation des connaissances s'inscrive dans une démarche ensemblière structurée. Cette démarche reste à développer sur les milieux terrestres, à l'image de ce qui peut exister sur les milieux aquatiques et marins en application des directives européennes. L'Agence française pour la biodiversité (AFB) est aujourd'hui appelée à s'investir sur ce travail de structuration, qui permettra in fine d'alimenter le système d'information sur la biodiversité, lui aussi largement à construire, et dont cette même agence assurera la coordination technique. Par ailleurs, elle apporte des crédits au niveau local en faveur de la connaissance au travers de l'appel à manifestation d'intérêt pour les « Atlas de la biodiversité » en faveur des communes et intercommunalités. Le plan biodiversité adopté par le Gouvernement en juillet 2018, prévoit le soutien de la réalisation de 600 nouveaux atlas d'ici 2020 au plan national. Le contenu du dossier de candidature est simple et la candidature dématérialisée. Cela se traduit également en Normandie par la mobilisation de l'AFB qui a présenté, lors de sa dernière commission, des interventions un dossier de subvention au Groupe ornithologique normand portant sur la coordination de suivis ornithologiques dans le cadre du programme de surveillance des sous-régions marines Manche-Mer du Nord et Mer celtique pour la mise en œuvre de la directive cadre stratégie pour le milieu marin. Sur le sujet plus spécifique de l'implication des associations naturalistes dans cette dynamique d'évolution des acteurs de la biodiversité, le ministre souligne l'intérêt de la démarche de constitution d'Agences régionales de la biodiversité (ARB) entre l'AFB et les régions, cheffes de file en matière de biodiversité et autorités de gestion d'une part importante des fonds européens. Ces ARB se veulent être un outil de mobilisation de l'ensemble des parties prenantes régionales. Elles doivent être un lieu de dialogue régulier, au plus proche des territoires, permettant une bonne coordination des acteurs et la mobilisation la plus efficace des financements existants, notamment au bénéfice de la connaissance des milieux. La région Normandie s'est lancée tôt dans ce processus qui est, à ma connaissance, en passe d'aboutir dans les prochains mois. Enfin, concernant les fonds européens, le ministre ne néglige pas la charge administrative que leur mobilisation peut représenter et qu'expérimentent également les opérateurs de l'État. Il revient bien sûr à chacun d'apprécier le bilan « coût-avantages » de chaque projet au regard de cette charge, mais le ministre tient à souligner l'intérêt que présente ces fonds européens dans un domaine où les ressources financières sont encore trop rares. Là encore, les ARB, et l'échange d'expérience entre ces dernières, doivent permettre d'apporter appui et conseils aux acteurs locaux. Dans le cas de la Normandie, la direction régionale de l'eau, de l'aménagement et du logement a apporté à cette date plusieurs réponses aux sollicitations de ces associations par un montant des subventions accordées concernant la connaissance et l'expertise en augmentation entre 2017 et 2018. Ces subventions sont notamment accordées dans le cadre de 9 conventions pluriannuelles d'objectif en 2017-19, avec différents bénéficiaires (dont l'union régionale des centres permanents d'initiatives pour l'environnement (URCPIE), l'assemblée générale statutaire de printemps (GRETIA), le groupe ornithologique et naturaliste (GON) ). La signature de nouvelles conventions n'est pas remise en cause.

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