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Mathilde Panot
Question N° 12720 au Ministère des solidarités


Question soumise le 2 octobre 2018

Mme Mathilde Panot attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les clauses de conscience spécifiques aux droits des femmes. Récemment, le président du Syndicat des gynécologues obstétriciens, qui compte près d'un quart des praticiens de la spécialité, a qualifié publiquement l'IVG d' « homicide ». Ces propos, juridiquement fallacieux et d'une rare violence, démontrent à quelle point la criminalisation symbolique de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est encore puissante dans nos sociétés. Ces propos ont par ailleurs fait écho au débat sur l'existence d'une clause de conscience spécifique à l'IVG dans le code de la santé publique (article L. 2212-8). Il est en effet surprenant que cette disposition n'ait pas été supprimée, dans le mesure où la clause de conscience est déjà protégée par l'article R. 4127-47 du même code, et ce pour tous les actes médicaux. Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes ainsi que le Défenseur des droits ont déjà tous deux préconisé la suppression de cette clause de conscience spécifique, respectivement depuis 2013 et 2015. Dans ce cadre, le maintien d'un tel article orienté vers l'IVG entérine l'idée qu'il s'agit d'un acte spécifiquement condamnable au regard de la morale, que ce droit acquis au fil de tant de luttes reste exceptionnel alors même qu'une femme sur trois y a recours dans sa vie. Cette clause de conscience spécifique interroge également sur les conditions matérielles d'accès à l'IVG. Certaines femmes de la Sarthe doivent ainsi parcourir plusieurs dizaines de kilomètres pour pratiquer un IVG, le seul gynécologue de l'hôpital de Bailleul à la Flèche acceptant auparavant de le faire étant parti à la retraite. Alors qu'en France 39 départements ont une densité de gynécologues en dessous de la moyenne nationale, et que six départements ne comptent aucun gynécologue médical, la clause de conscience spécifique à l'IVG menace l'accès des femmes à ce droit, a fortiori en ce qui concerne les plus défavorisées. Il n'est pas anodin que le seul autre acte régi par une clause de conscience supplémentaire soit la stérilisation définitive à visée contraceptive. Dans ce cadre, les clauses de consciences spécifiques à la santé des femmes vont-elles être supprimées ? Quelles mesures seront mises en oeuvre pour assurer à toutes les femmes qui le souhaitent un accès effectif à l'IVG ? À l'heure d'une telle communication culpabilisante sur cette pratique, elle lui demande s'il sera assuré aux femmes que leurs droits ne seront pas sacrifiés au profit des convictions personnelles de certains individus.

Réponse émise le 29 janvier 2019

L'interruption volontaire de grossesse (IVG) est un droit de la femme, un droit humain. Ce droit, inscrit dans notre patrimoine juridique, est une question de liberté, de respect et de dignité des femmes. Il a sauvé la santé et la vie de milliers de femmes. Ce droit garantit l'accès à l'information, à des services de soins dédiés mais aussi à des interruptions de grossesse sécurisées, volontaires ou pour des raisons médicales. La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a amélioré les conditions d'accès à l'IVG, en supprimant notamment le délai de réflexion de 7 jours au profit d'un délai librement choisi par la femme. Lors des débats parlementaires concernant la loi suscitée, la clause de conscience n'a pas été remise en cause dès lors qu'elle contribue au juste équilibre établi par la loi Veil. Aujourd'hui, il n'y a pas de volonté de revenir sur cet équilibre. La clause de conscience est un droit pour les professionnels de santé qui, pour une raison personnelle, ne souhaitent pas pratiquer cet acte. Toutefois, comme le prévoit le code de la santé publique (article L. 2212-8), le praticien qui fait valoir ce droit « doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus, et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention ». Cette information et cette orientation sont impératives pour permettre à la femme d'exercer son droit. Concernant l'égal accès des femmes à l'IVG, un état des lieux est demandé aux agences régionales de santé afin d'identifier les difficultés rencontrées et d'y remédier.

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