Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Émilie Guerel
Question N° 13308 au Ministère de l'économie


Question soumise le 16 octobre 2018

Mme Émilie Guerel interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la suppression annoncée (PLF 2019) du tarif réduit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) dont bénéficie à l'heure actuelle le gazole non routier (GNR). Vécue comme brutale et soudaine par les professionnels du BTP, cette décision aurait des conséquences graves sur l'activité du secteur. En effet, selon les estimations, son impact direct serait de 500 millions d'euros pour la seule activité des travaux publics (soit environ 60 % de marge des entreprises) : les travaux routiers ainsi que ceux de terrassement seraient particulièrement affectés. Les conséquences de cette hausse de la fiscalité, au regard des contrats en cours et du niveau d'activité des travaux publics, gagneraient donc à être étudiées de manière exhaustive. Pour rappel, les deux tiers de l'activité des travaux publics en France dépendent de la commande publique, ce qui induit une relation inégalitaire entre le donneur d'ordre public et l'entreprise. Aussi, cette mesure, si elle n'est pas « neutralisée » dans ses effets économiques, réduirait davantage le taux de marge déjà très bas du secteur (environ 2 %) et pénaliserait fortement les PME de travaux publics. D'autre part, malgré l'évolution des coûts de production, tous les contrats ne prévoient pas de formules de révision de prix dans le cadre d'un chantier d'une longue durée ; une telle augmentation de la fiscalité créerait donc un déséquilibre économique très préjudiciable aux entreprises. Interpellée par la fédération du BTP du Var, elle souhaite savoir si le Gouvernement serait favorable à une « neutralisation » de l'ensemble des effets de déstabilisation économique du secteur des travaux publics en France. Pour ce faire, il pourrait être envisagé, lorsqu'un contrat ne comporte pas de clause de révision de prix, la mise en place d'un avenant obligatoire intégrant la hausse des coûts de production induite pour les ouvrages concernés. De plus, compte tenu de la substitution du prix du GNR par celui du gazole, la structure des index INSEE pourrait être redéfinie rapidement afin d'éviter tout écart de coûts au regard de la situation réelle.

Réponse émise le 4 février 2020

Le tarif réduit de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) appliqué au gazole sous conditions d'emploi, ou gazole non routier (GNR), ne se justifie pas sur les plans économique et environnemental et sa suppression progressive contribuera à orienter le choix des acteurs vers des usages ou des technologies plus vertueuses. Sa suppression doit également contribuer au financement des mesures prises en réponse à la crise des « gilets jaunes », notamment la baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes. La suppression du tarif réduit sera mise en œuvre de façon progressive à compter du 1er juillet 2020, permettant aux acteurs concernés de disposer d'un délai d'une année complète à compter de l'annonce de la mesure pour s'adapter. Par ailleurs, un important travail de concertation avec l'ensemble des secteurs économiques concernés a permis d'identifier les mesures d'accompagnement à retenir. Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), le Gouvernement propose de porter de 5 % à 10 %, par décret au Conseil d'Etat, le taux minimal de l'avance versée par les collectivités locales dans le cadre des marchés publics. Parallèlement, les collectivités locales bénéficieront de l'extension de l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA sur des travaux portant sur les réseaux. Par ailleurs, afin de ne pas affecter l'économie générale des contrats en cours, une majoration de plein droit de ces derniers est prévue lorsque la part du GNR dans les coûts d'exploitation excède 2 %. Dans les secteurs ferroviaire et agricole, les tarifs réduits de TICPE demeureront quant à eux inchangés. Le secteur agricole bénéficiera en outre, à partir de 2022, d'un gain de trésorerie résultant de l'application directe du tarif très réduit auquel il est éligible au moment de l'acquisition du produit, et non après dépôt d'une demande de remboursement. Dans les secteurs des industries extractives à forte valeur ajoutée et des activités de manutention portuaire dans l'enceinte des ports maritimes, compte tenu de leur forte exposition à la concurrence internationale, la hausse de tarif a été neutralisée par l'application de tarifs réduits pour le gazole utilisé pour les travaux statiques et de terrassement. Les activités de manutention portuaire bénéficieront, en outre, d'un tarif réduit de la taxe sur la consommation finale d'électricité. Par ailleurs, l'acquisition d'engins non routiers fonctionnant avec un carburant alternatif au GNR sera favorisée par le biais d'un dispositif de suramortissement de ces engins : les entreprises, notamment de travaux publics, d'exploitation de remontées mécaniques et de domaines skiables, pourront déduire de leur résultat imposable 40 % du prix de revient de ces investissements. Dans le secteur du transport frigorifique, un mécanisme spécifique d'indexation des prix en fonction de l'évolution du coût du carburant routier est prévu. Enfin, le contrôle de l'interdiction d'utiliser du gazole au tarif de TICPE applicable aux travaux agricoles à d'autres types de travaux, notamment des travaux publics, sera renforcé. En particulier, la faculté d'incorporer des colorants et des traceurs est prévue afin de prévenir ou de lutter contre les vols de carburant et les contrôles sur sites seront renforcés grâce au concours de la police et de la gendarmerie nationales. Par ailleurs, l'obligation, pour l'ensemble des donneurs d'ordre et des bénéficiaires du remboursement agricole, de tenir un registre des travaux relevant du secteur du BTP permettra une instruction plus efficace des dossiers de demande de remboursement de TICPE. La large concertation dont a fait l'objet cette mesure a ainsi permis d'apporter un ensemble de solutions concrètes aux difficultés rencontrées par les secteurs les plus affectés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.