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Émilie Cariou
Question N° 1334 au Ministère de l’économie


Question soumise le 26 septembre 2017

Mme Émilie Cariou interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la mise en place d'une nouvelle taxation « d'égalisation » sur les GAFA débattue lors de la réunion informelle à Tallinn les 15 et 16 septembre 2017. Formalisée lors de cette rencontre entre ministres européens de l'économie et des finances de l'Union européenne, cette annonce relative à la taxation des géants du numérique rencontrent un écho favorable chez les Français. C'est ainsi poursuivre le projet présidentiel, celui d'imposer les grands groupes de l'Internet sur leur chiffre d'affaires réalisé sur le territoire national. Néanmoins, certaines interrogations demeurent, et donner déjà des éléments de réponse permettrait de discerner clairement si la bonne direction est bel et bien prise sur ce sujet. Mme la députée souhaite ainsi obtenir des éclaircissements sur les points suivants : quel est le calendrier à venir pour cette initiative française soutenue par l'actuelle présidence estonienne de l'Union européenne ; quelles seraient les caractéristiques essentielles de cette nouvelle imposition qui de prime abord s'annonce comme une taxation sur le chiffre d'affaires ; la Cour de justice de l'Union européenne développe une jurisprudence très stricte notamment sur le respect du domaine de la TVA, prélèvement qui concerne éminemment le chiffre d'affaires (CJCE, arrêts du 31 mars 1992, « Dansk Denkavit » et « Poulsen Trading », C 200/90) ; quelle efficacité de cette nouvelle imposition pour les finances publiques française ; quel rendement en serait attendu ; quels seraient les outils mis en place pour éviter que les GAFA ne répercutent cette nouvelle taxation sur les autres acteurs européens et donc in fine sur d'autres impositions perçues en Europe ; quelles articulations pour cette nouvelle taxe avec l'imposition de droit commun sur les bénéfices à laquelle il convient de venir ; assujettir à une taxation particulière les GAFA présente un intérêt conjoncturel certain, un « premier pas » et un vrai signal envoyé face au sentiment d'impunité fiscale ressenti par les Français et les entreprises françaises face aux géants du numérique. Il convient de ne pas perdre notre réel objectif, celui de les remettre dans le droit chemin du droit commun, quitte à adapter ce dernier. Or ces adaptations sont justement en cours, avec les travaux de l'OCDE notamment sur la notion d'établissement stable virtuel, soutenue par la présidence estonienne de l'Union européenne et le projet de directive relancé à l'automne 2016 par la Commission européenne dit ACCIS (assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés) et ses mécanismes antifraudes. Elle lui demande quelle est la position du Gouvernement sur ses sujets.

Réponse émise le 3 mai 2022

Désireux d'adapter les règles de la fiscalité internationale afin d'assurer notamment une juste taxation des entreprises du secteur numérique, et plus largement des multinationales, le Gouvernement a instauré une taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique (TSN) par la loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 portant création d'une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés. Cette taxe met ainsi à contribution les grandes entreprises qui tirent une part significative de leur valeur de la participation d'internautes localisés sur le territoire national. Concrètement, sont taxées, à hauteur de 3 %, les recettes tirées des prestations de ciblage publicitaire, qui s'appuient sur les données collectées auprès des internautes, notamment via les moteurs de recherche et les réseaux sociaux, et des prestations de mise en relation entre internautes, en particulier les places de marché. Ces prestations de service sont taxées à proportion de la part de l'activité des internautes qui est réalisée depuis la France. Le commerce en ligne et la fourniture de services numériques ne sont pas concernés. Sont en outre exemptés les services de communication, les services de paiement et les services financiers réglementés. Seuls les services disposant d'une large audience et générant des revenus importants sont concernés. Deux seuils d'assujettissement sont prévus : 750 millions d'euros de services numériques taxables au niveau mondial, et 25 millions d'euros de services numériques taxables au niveau français. La taxe sur les services numériques a vocation à s'appliquer tant que les règles de la fiscalité internationale n'auront pas été adaptées aux enjeux particuliers posés par les entreprises du secteur numérique. Dans cette perspective, les travaux conduits en ce sens par le Cadre inclusif de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) ont débouché le 8 octobre 2021 sur un accord politique soutenu par 137 États ou juridictions et prévoyant une solution en deux piliers. Le « pilier 1 » consiste à réattribuer une part des bénéfices dégagés par les multinationales les plus rentables aux juridictions de marché, c'est-à-dire celles dans lesquelles les utilisateurs et consommateurs finaux des biens et services vendus par le groupe sont situés, quand bien même ces multinationales n'y auraient pas de présence physique. Selon l'OCDE, plus de 100 groupes seraient concernés, y compris les principaux géants du secteur numérique. Le Cadre inclusif travaille actuellement à l'élaboration d'un traité multilatéral nécessaire à la mise en œuvre du pilier 1. Le « pilier 2 » vise à garantir un taux d'imposition effectif minimum mondial de 15 % pour les grands groupes réalisant un chiffre d'affaires d'au moins 750 millions d'euros. A la suite de l'accord du 8 octobre 2021, il a donné lieu à une proposition de directive de la Commission européen visant à traduire l'accord politique en droit de l'Union européenne. L'adoption de cette directive constitue une priorité de la Présidence française de l'Union européenne.

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