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Jean-Louis Bricout
Question N° 13401 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 16 octobre 2018

M. Jean-Louis Bricout interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les intentions du Gouvernement s'agissant de la révision des barèmes d'amende en matière d'excès de vitesse. Suite à la récente mesure fixant la limite de circulation à 80 km/h sur les routes nationales ou départementales, les conducteurs peuvent encourir jusqu'à 135 euros d'amende et un retrait de 2 points du permis s'ils se font « flasher » à 101 km/h. Or il semblerait qu'une telle législation soit disproportionnée au regard des risques effectivement encourus par les conducteurs. À ce titre, il convient de rappeler que d'autres pays aux caractéristiques analogues à la France possèdent une législation très différente. En effet, en Allemagne ou au Royaume-Uni, il est légal de se déplacer à une vitesse similaire sur le même type de route. Dès lors, il lui demande si le Gouvernement mettra en place une législation proportionnée aux risques de sécurité qu'encourent les conducteurs.

Réponse émise le 8 janvier 2019

Le bilan de l'accidentalité de 2017, disponible en ligne sur http://www.securite-routiere.gouv.fr/la-securite-routiere/l-observatoire-national-interministeriel-de-la-securite-routiere, confirme si besoin était que la vitesse est la première cause d'accidents mortels de la route. Lorsqu'elle n'est pas la cause principale, elle en constitue systématiquement le facteur de gravité. C'est pour cela que lutter contre les vitesses excessives reste la priorité du Gouvernement en matière de lutte contre l'insécurité routière, dans le cadre d'un plan ambitieux et global que le comité interministériel de la sécurité routière du 9 janvier 2018 a validé ; de ce fait, la décision du Gouvernement d'abaisser à 80 km/h la vitesse maximale autorisée (VMA) sur les routes bidirectionnelles hors agglomération n'a pas pour finalité d'augmenter le nombre des contraventions en matière d'excès de vitesse mais, à l'inverse, d'agir de manière équilibrée sur tous les leviers afin de réviser à la baisse le taux de mortalité sur ces routes étant les plus accidentogènes. Au Royaume-Uni, si la vitesse maximale autorisée sur ces mêmes routes est de 97 km/h (soit 60 mph), la vitesse moyenne pratiquée observée est de 77 km/h à cause d'un réseau secondaire particulièrement sinueux et étroit. Ceci explique en partie les bons résultats du Royaume-Uni en matière d'accidentalité routière, d'autant qu'il convient de rappeler que la vitesse maximale autorisée sur autoroute est de 112 km/h (soit 70 mph). Il faut également souligner qu'au Royaume-Uni, le parc des radars est beaucoup plus important que celui installé en France, de l'ordre de 50 % supérieur en nombre (un peu plus de 4 000 en France pour plus de 6 000 au Royaume-Uni), étant précisé de surcroît que le réseau routier britannique représente un kilométrage moitié moindre que le réseau français. Les pays que sont Chypre, le Danemark, la Finlande, Malte, les Pays-Bas, la Suisse et la Norvège ont limité la vitesse à 80 km/h sur les routes hors agglomération. La Suède a décidé d'une vitesse limitée non pas à 80km/h, mais à 70 km/h. Concernant les taux de tués par million d'habitants, le taux moyen dans l'UE est en 2017 de 49, en France il est de 53. Ce taux place notre pays au 15ème rang en termes de résultats de sécurité routière dans l'UE, la Suède est au 1er rang, avec un taux de 25 et le Royaume-Uni au 2ème avec un taux de 27 ; à noter que, hors UE, la Suisse et la Norvège ont toutes deux un taux de 25. Les barèmes en matière de sanctions pénales en cas de dépassement de la vitesse sont déjà adaptés. D'une part, ils sont proportionnels,  en prenant en compte la dangerosité du comportement : le nombre de points retirés sur le permis de conduire dépend du niveau de dépassement de la vitesse maximale autorisée : 1 point pour un dépassement de moins de 20 km/h, 2 points pour un dépassement entre 20 et 30 km/h, 3 points entre 30 et 40 km/h, 4 points entre 40 et 50 km/h et 6 points à partir de 50 km/h au-dessus de la VMA. D'autre part, ils sont adaptés aux circonstances : le code de la route distingue déjà un excès de vitesse inférieur à 20 km/h s'il a été commis hors agglomération où il est puni d'une amende prévue par les contraventions de la 3e classe. Ce même dépassement de la vitesse, commis en agglomération, se trouve sanctionné d'une amende de la 4e classe. En matière de contrôle des excès de vitesse, une marge technique s'établit automatiquement sur les appareils de contrôle. Les forces de l'ordre appliquent en effet, à l'avantage du conducteur, un abattement de 5 % par rapport à la mesure effectuée par l'appareil de contrôle de la vitesse pour une vitesse supérieure à 100 km/h et de 5 km/h pour une vitesse inférieure. Ainsi, un conducteur qui, dans le cas évoqué, se fait « flasher » à 101 km/h sur une route dont la vitesse est limitée à 80km/h, roule en réalité à une vitesse de 106 km/h, soit 26 km/h de plus que la vitesse maximale autorisée. Nul ne peut prétendre que rouler 20 km/h au-dessus d'une vitesse autorisée ne constitue pas un comportement très dangereux sur une route sans séparateur central et bidirectionnelle où le flux des autres véhicules est à 80 km/h. La perte de points, qui repose sur un principe égalitaire, constitue un signal/avertissement donné au conducteur qu'il doit adopter une conduite plus prudente. Ce principe fonctionne, il suffit de regarder la manière dont les points se reconstituent sur les permis de conduire de la grande majorité de nos concitoyens après la perte de 1 ou deux points. Les automobilistes disposent de la possibilité de récupérer jusqu'à quatre points perdus de leur permis de conduire en suivant un stage de sensibilisation à la sécurité routière, qui peut s'effectuer dans un des centres agréés par les préfectures. D'autre part, le système de pertes-récupération permet également pour les excès de vitesse inférieurs à 20 km/h, de récupérer le point perdu en six mois en l'absence d'autre infraction. Dans tous les cas, si le permis de conduire n'est pas invalidé, sans infraction pendant trois ans, un automobiliste récupère tous ses points. A titre d'illustrations, 8 personnes sur 10 ont 12 points sur leur permis, 3,1 millions de conducteurs ont vu le rétablissement de leur capital initial de 12 points après 2 ou 3 ans sans nouvelle infraction, et 6,1 millions de conducteurs ont récupéré un point au terme de 6 mois sans nouvelle infraction. En ce sens, les règles en vigueur sont adaptées. Aussi, pour l'ensemble des raisons évoquées ci-dessus, le Gouvernement n'envisage pas de modifier le barème des sanctions pour excès de vitesse prévues par le code de la route. Sensible au caractère vertueux du comportement prudent de nombreux automobilistes, le Premier ministre a chargé le conseil national de la sécurité routière (CNSR) d'une réflexion relative à la valorisation des comportements exemplaires sur la route (mesure 3 du comité interministériel de la sécurité routière du 9 janvier 2018). Le CNSR doit rendre le fruit de ses réflexions au début de l'année 2019.

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