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Dimitri Houbron
Question N° 14577 au Ministère auprès de la ministre de la cohésion des territoires


Question soumise le 27 novembre 2018

M. Dimitri Houbron appelle l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement sur l'ampleur des mauvaises pratiques des promoteurs immobiliers lors de l'achat de logements sur plan dit « Vefa ». Il rappelle qu'il est devenu impératif de mettre sur pied un cadre législatif et réglementaire afin de sécuriser spécifiquement ce marché, et éliminer les préjudices que connaissent actuellement les consommateurs. Il appuie ses explications sur l'étude publique, réalisée par l'association UFC Que Choisir, qui relève, sur l'année 2017, que 35 000 logements seront concernés par des retards de livraison, soit près d'un tiers, ce qui occasionne un préjudice financier estimé à 156 millions d'euros pour l'ensemble des consommateurs. Il souligne que les motivations des promoteurs, pour justifier ces retards, mettent en lumière l'existence de causes exonératoires trop extensives, notamment sur les intempéries, de nature à leur offrir le loisir de ne pas compenser financièrement le préjudice affectant les consommateurs. Il ajoute que cette étude fait aussi le constat qu'un seul logement sur cinq est livré sans réserve alors que, pour les autres, c'est en moyenne douze réserves qui sont émises. Il précise que dans 16 % des cas, les acquéreurs signalent des problèmes nuisant tout bonnement à l'habitabilité des logements, comme l'absence d'eau ou de chauffage, ce qui permet de remettre en question le sérieux de certains professionnels du secteur visé. Il note que la législation actuelle autorise les promoteurs à livrer des logements ayant une surface jusqu'à 5 % plus petite que celle achetée et ce, sans aucune compensation financière. Il constate, de ce fait, au regard des prix du neuf au mètre carré, que le manque à gagner pour le consommateur peut rapidement augmenter : de 8 700 euros pour un studio en en Île-de-France, à près de 12 000 euros pour un 3 pièces en province. Il en déduit que, dans l'objectif d'offrir un cadre sécurisé aux consommateurs achetant leur logement sur plan auprès d'un promoteur immobilier, et constatant les litiges relatifs à la « Vefa » ont augmenté de 84 % sur l'année 2018, qu'il est impératif que soit opéré un cadre législatif et réglementaire propre. Il propose, ainsi, d'encadrer de manière stricte les causes légitimes de report de livraison et de rendre obligatoires les pénalités de retard ; de mieux définir la notion d'achèvement des travaux afin de ne pas permettre la livraison de logements qui ne soient ni sûrs, ni habitables ; de mettre en place un système de consignation obligatoire et automatique d'une partie du prix du logement au moment de la livraison, jusqu'à la levée des réserves et d'assurer que toute réduction de surface, par rapport à celle établie contractuellement, donne lieu à une réduction proportionnelle du prix du bien. Ainsi, il le remercie de lui faire part de ses orientations et avis sur cette problématique relative à l'amélioration du cadre législatif et règlementaire des « Vefa ».

Réponse émise le 9 juillet 2019

Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) permet l'acquisition d'un immeuble qui n'existe pas ou qui est en cours de construction lors de la conclusion du contrat de vente. Le vendeur s'engage à livrer dans un délai déterminé un immeuble qu'il doit édifier et l'acquéreur à s'acquitter du paiement du prix à mesure de l'avancement des travaux de construction. Dans ce cadre, l'acquéreur, qui acquiert un bien qui n'existe pas encore et paie une partie de son prix avant l'achèvement de la construction, fait face à des risques, tels que le défaut d'achèvement par le vendeur, la livraison d'un bien non conforme aux prévisions contractuelles ou comportant des vices de construction, ou encore le retard dans la livraison de l'immeuble. Lorsqu'ils se réalisent, ces risques ont des conséquences lourdes pour l'acquéreur, pouvant générer notamment des frais supplémentaires ou la nécessité de trouver un logement alternatif. C'est la raison pour laquelle la réglementation applicable encadre strictement l'obligation du vendeur d'un immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, d'achever l'immeuble. Ainsi, d'une part, l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que l'immeuble vendu en l'état futur d'achèvement est réputé achevé lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement indispensables à son utilisation, conformément à sa destination. À cet égard, l'absence de chauffage ou d'eau dans un immeuble à usage d'habitation est de nature à rendre l'immeuble impropre à son habitabilité et à une utilisation conforme à sa destination, ce qui fait donc obstacle à ce que l'immeuble puisse être considéré comme achevé. D'autre part, afin également de protéger l'acquéreur, le vendeur est tenu de souscrire, avant la conclusion du contrat de vente, soit une garantie financière de remboursement ayant pour objet le remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d'achèvement, soit une garantie financière d'achèvement de l'immeuble, par laquelle un tiers s'engage, en cas de défaillance financière du promoteur, à faire l'avance des sommes nécessaires à l'achèvement des travaux. Les modalités de mise en œuvre de cette garantie financière d'achèvement ont été améliorées par l'article 75 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), qui permet désormais au garant financier, en cas de défaillance financière du vendeur, d'obtenir du juge la désignation d'un administrateur ad hoc dont la mission est d'achever l'immeuble. En revanche, il est vrai qu'en l'état actuel de la législation, le vendeur n'est sanctionné par aucune pénalité légale pour son retard dans la livraison de l'immeuble, alors que la loi prévoit une pénalité à l'encontre de l'acquéreur en cas de retard dans le paiement du prix. De la même façon, la pratique consistant à subordonner la remise des clefs au paiement intégral du prix, faisant ainsi obstacle à la consignation du solde (5 % du prix) et à l'émission de réserves par l'acquéreur, n'est pas sanctionnée. Toutefois, toute difficulté rencontrée postérieurement qui rendrait le lien impropre à sa destination permet au particulier de se retourner contre le vendeur maître d'ouvrage au titre de l'assurance dommage ouvrage et de la responsabilité decennale des constructions permettant d'obtenir réparation. S'agissant de la surface du bien acquis, le principe d'une tolérance de 5 % résulte, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, de l'article 1619 du code civil, qui ne permet la diminution du prix pour moindre mesure qu'autant que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d'un vingtième en plus ou en moins, sauf stipulation contraire. Cette tolérance s'applique aussi bien à la vente d'immeubles à construire qu'à la vente d'immeubles anciens et figure également à l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, en cas de vente d'un lot de copropriété. Dès lors que les contrats usuellement conclus au titre de la VEFA ne prévoient pas de limitation de cette tolérance, seule une disposition législative peut en restreindre la portée. Le Gouvernement est ouvert à réfléchir, avec l'ensemble de la profession, à l'évolution de cette règle générale. En effet, elle se justifie par le caractère relativement peu industrialisé de l'activité de construire qui légitime une tolérance entre le produit annoncé et livré due aux incertitudes résultant de l'exécution de l'ouvrage. La modernisation en cours des techniques constructives, notamment la préfabrication et les modélisations numériques, permettrait d'envisager à terme une diminution de cette tolérance.

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