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Caroline Fiat
Question N° 14884 au Ministère des solidarités


Question soumise le 4 décembre 2018

Mme Caroline Fiat interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur un nouveau scandale de prothèses mammaires, celui des prothèses Allergan, suite à la diffusion sur France 2 du documentaire « Implants : tous cobayes ? » réalisé à partir d'une enquête de Marie Maurice et Édouard Perrin. Parmi les complications liées aux dispositifs médicaux, les prothèses mammaires arrivent en tête selon les chiffres de l'ANSM avec plus de 12 000 incidents recensés depuis 2010. Les prothèses mammaires texturées Allergan sont particulièrement visées. Plus d'une cinquantaine de cas de lymphomes anaplasiques à grandes cellules (LAGC) associés aux implants mammaires a déjà été répertoriée en France depuis leur commercialisation. Le comité d'expert de l'ANSM a conclu qu'il y avait un risque de lymphome concernant ce type de prothèses. L'Institut Curie a décidé pour sa part de ne plus en poser. Enfin, en 2017 une étude scientifique réalisée en Australie et en Nouvelle-Zélande a démontré qu'une femme portant une prothèse texturée Allergan a 14 fois plus de chance de développer un lymphome qu'une femme ayant une autre prothèse mammaire texturée. L'ANSM recommande désormais de ne plus poser d'implants texturés mais n'en interdit toujours pas la pose. Le professeur Lantieri nous apprend en outre que la tarification actuelle incite les chirurgiens à implanter ce type de prothèses mammaires plutôt que d'utiliser d'autres techniques de reconstruction. Elle lui demande donc si elle compte demander instamment l'interdiction de la pose d'implants texturés Allergan sans attendre les résultats de nouvelles études.

Réponse émise le 18 juin 2019

Tout dispositif médical (DM) mis sur le marché français doit être revêtu du marquage CE, qui atteste que le produit est conforme aux exigences essentielles de santé et de sécurité qui lui sont applicables. Si cette déclaration de conformité, nécessaire à l'apposition du marquage CE, est toujours établie par le fabricant lui-même, elle est accompagnée, pour les DM des classes IIa à III (les DM étant répartis en quatre classes I, IIa, IIb et III par ordre croissant de niveau de risques) d'un certificat délivré par un organisme notifié en France désigné par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), couramment dénommé « organisme habilité » ou par toute autre autorité compétente d'un Etat membre. Par ailleurs, concernant la surveillance du marché des dispositifs médicaux,  les autorités nationales compétentes, dont l'ANSM, ont un pouvoir d'intervention complémentaire aux organismes notifiés reposant sur la gestion des vigilances, le contrôle de la conformité des produits et l'inspection. En ce sens, un système de matériovigilance a été institué par le décret n° 96-32 du 15 janvier 1996 et implique notamment que tout incident ou risque d'incident mettant en cause un dispositif ayant entrainé ou susceptible d'entraîner la mort ou la dégradation grave de l'état de santé d'un patient, d'un utilisateur ou d'un tiers donne lieu obligatoirement et sans délai à un signalement à l'ANSM. S'agissant des prothèses mammaires, elles sont, depuis 2003, des dispositifs médicaux qui relèvent de la classe III précitée à savoir la classe correspondant aux produits présentant le plus de risques pour la santé. Ces dispositifs médicaux, utilisés tant dans le cadre d'une chirurgie à visée reconstructrice que dans le cadre d'une chirurgie esthétique, sont destinés à restaurer ou augmenter le volume des seins. Les implants mammaires sont classés en quatre catégories : les implants en polyuréthane, les implants lisses, les implants micro-texturés et les implants macro-texturés. La traçabilité des dispositifs médicaux implantables, dont font partie les implants mammaires, est encadrée par le décret n° 2006-1497 fixant les règles particulières de la matériovigilance exercées sur certains dispositifs médicaux et l'arrêté du 26 janvier 2007 relatif aux règles particulières de la matériovigilance exercés sur certains dispositifs médicaux, pris en application de l'article L. 5212-3 du code de la santé publique, rappelés dans la Note d'information n° DGOS/PF2/2019/69 du 27 mars 2019 relative à la traçabilité des disposi¬tifs médicaux implantables dans les établissements de santé et aux outils d'auto-évaluation et d'accompagnement disponibles. Elle consiste notamment à déterminer les responsabilités des patients et des établissements de santé quant à la conservation des informations relatives aux implants posés soit : une carte d'implant pour le patient et l'enregistrement de ces informations pendant 10 ans par l'établissement de santé. Or, il est effectivement constaté que beaucoup de patientes ne conservent pas leurs cartes d'implants. Aussi, les institutions de santé travaillent sur un projet d'amélioration de l'information des patientes en chirurgie esthétique et reconstructrice pour qu'elles conservent leur carte d'implant et qu'elles soient informées des risques liés au port d'implant mammaire. En France, les implants commercialisés, avant novembre 2018, étaient majoritairement texturés (84 % de part de marché contre 14 % lisses et 3 % en polyuréthane). La société ALLERGAN est depuis 2001 le leader du marché français des implants mammaires. Au cours de l'année 2011, des cas de cancers, des lymphomes anaplasiques à grandes cellules (LAGC), ont été identifiés chez des femmes porteuses d'un implant mammaire en France. En conséquence, constatant une augmentation significative du nombre de LAGC à partir de l'année 2011, l'ANSM, tout en effectuant un suivi des signalements de matériovigilance, a mené de nombreuses investigations afin d'étudier le lien entre la survenue des cas de LAGC et la texture des implants mammaires. Au 1er avril 2014, 63 cas de LAGC ont été déclarés à l'ANSM après une double lecture par le réseau Lymphopath en France. A cet égard, trois comités scientifiques spécialisés temporaires (CSST), réunissant notamment des experts et des associations de patients ont été organisés par l'ANSM entre avril 2015 et février 2019. Ces CSST étaient notamment destinés à comprendre les causes d'apparition de ce type de cancer et définir une classification des implants mammaires en fonction de leur texturation. Suite à ces CSST, l'ANSM a recommandé le 21 novembre 2018 aux chirurgiens d'utiliser de préférence des implants mammaires lisses en chirurgie esthétique ou reconstructrice. En février 2019, le groupe d'experts du CSST a préconisé dans son avis du 8 février 2019 « d'interdire le recours à la texture Biocell d'Allergan [et qu'une] plus grande prudence doit être réservée aux implants mammaires de textures équivalentes et aux implants polyuréthane. Le comité ne recommande toutefois pas d'explantation préventive de ces implants texturés ». Dans la continuité de ces différents travaux, l'ANSM, par mesure de précaution, a décidé de retirer du marché les implants mammaires dits macrotexturés ainsi que les implants mammaires à surface recouverte de polyuréthane, afin de réduire l'exposition des femmes au risque de LAGC qui, bien que rare, reste grave. Par décision du 2 avril 2019 appliquée le 5 avril 2019, la mise sur le marché, la distribution, la publicité et l'utilisation d'implants mammaires macrotexturés et recouverts de polyuréthane, listés en annexe de la décision, sont interdites. Aussi par cette mesure, l'ANSM a-t-elle interdit la pose des implants ALLERGAN de surface BIOCELL, et de tous les implants macrotexturés de ce même type ainsi que ceux recouverts de polyuréthane En conséquence, à ce jour, les implants mammaires à surface Biocell, macrotexturée, fabriqués par la société Allergan ne peuvent plus être mis sur le marché, distribués et utilisés en France, tant dans le cadre d'une chirurgie à visée reconstructrice que dans le cadre d'une chirurgie à visée esthétique. Par ailleurs, le certificat CE des implants mammaires et des expandeurs texturés (toutes textures confondues) de la société ALLERGAN n'a pas été renouvelé par leur organisme notifié. Toutefois, ni l'INCa, ni la société savante de chirurgie reconstructrice et esthétique (SOFCPRE), ni l'ANSM ne recommande d'explantation préventive pour les femmes porteuses d'implants visés par la décision de police sanitaire précitée. Il est rappelé pour toutes les femmes porteuses d'implants mammaires la nécessité d'un suivi clinique annuel par leur chirurgien ou autre professionnel de santé (médecin généraliste, gynécologue) Enfin, le 9 avril 2019, la création d'un registre national des implants mammaires a été annoncée par la SOFCPRE qui devrait débuter très prochainement, suite à l'accord favorable de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Ce registre permettra ainsi de répertorier l'ensemble des femmes porteuses d'implants mammaires et d'améliorer leur suivi.

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