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Éric Bothorel
Question N° 14942 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 11 décembre 2018

M. Éric Bothorel attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les totaux admissibles de capture (TAC) pour 2019 et 2020 relatifs aux stocks de poissons d'eau profonde. En effet, les caractéristiques spécifiques de ces espèces « lente croissance, longue espérance de vie, mais faible fécondité » les rendent singulièrement vulnérables face aux activités de pêche. Toutefois, alors que le Conseil des ministres européens de la pêche déterminera les TAC de ces stocks lors de la réunion des 19 et 20 novembre 2018, la Commission européenne a proposé de supprimer le TAC d'une de ces espèces, la mostelle de fond (phycis blennoides). Cette proposition est fondée sur l'avis du Conseil international pour l'exploration de la mer, selon lequel la suppression des TAC pour les stocks de mostelle de fond ne générerait qu'un faible risque d'exploitation non durable, à la double condition que ladite suppression n'ait pas pour effet d'augmenter la pêche ciblée sur cette espèce, et que cette dernière demeure une prise accessoire. Or la France dispose localement de pêcheries ciblant spécifiquement cette espèce. Par ailleurs, les pêcheries visant des espèces telles que la baudroie ou la langoustine génèrent des rejets substantiels de mostelle de fond. Aux termes de l'article 2 du règlement européen du 11 décembre 2013 relatif à la politique commune de la pêche, ladite politique garantit que les activités de pêches soient durables sur le plan environnemental, et applique l'approche de précaution en matière de gestion des pêches, afin que les stocks soient rétablis ou maintenus au-dessus des niveaux permettant d'obtenir le rendement maximal durable. Dès lors, il est essentiel que la France prenne position pour garantir la préservation des stocks de poissons d'eau profonde, par la fixation de TAC en accord avec les recommandations scientifiques et les dispositions de l'article 2. Aussi, il lui demande de lui indiquer les mesures qui pourront être prises pour éviter toute augmentation des activités de pêche sur les stocks de mostelle de fond, afin que ceux-ci puissent être rétablis à des niveaux permettant d'obtenir le rendement maximal durable, conformément aux dispositions de la politique commune de la pêche.

Réponse émise le 19 mars 2019

Ces dernières années, en particulier grâce aux efforts consentis par les professionnels de la pêche, des progrès considérables ont été accomplis dans l'atteinte de taux d'exploitation permettant d'obtenir le rendement maximal durable (RMD), et ce pour de très nombreux stocks halieutiques faisant l'objet de captures dans les eaux de l'Union européenne (UE). Cet objectif ne peut toutefois s'appliquer que pour les stocks pour lesquels les connaissances scientifiques permettent de déterminer les paramètres biologiques correspondant au RMD. Les espèces d'eaux profondes présentent la particularité d'avoir des données scientifiques très limitées, ce qui explique en partie que les avis sont tous des avis de précaution. Les totaux admissibles de captures (TAC) et quotas pour ces espèces sont fixés sur la base de l'approche de précaution comme le prévoit la politique commune de la pêche pour les stocks dont le RMD n'est pas connu. C'est le cas de la phycis de fond, dont il convient cependant de noter qu'elle ne fait pas partie des espèces identifiées comme « profondes » par le nouveau règlement de l'UE encadrant la pêche de ces espèces. La phycis de fond est principalement pêchée à des profondeurs inférieures à 400 mètres, le plus souvent en captures accessoires par des navires artisans ciblant d'autres espèces comme le merlu, la cardine ou la baudroie. Selon les avis scientifiques, la biomasse de ce stock fluctue depuis plusieurs années sans qu'il soit possible d'identifier une tendance. La valeur marchande de la phycis étant faible, le conseil international pour l'exploitation de la mer (CIEM) a indiqué dans un avis de juillet 2018 que la suppression du TAC de phycis n'entraînerait qu'un faible risque que cette espèce soit exploitée de façon non durable. Avec la généralisation de l'obligation de débarquement en 2019, la phycis était identifiée par les scientifiques comme une espèce dont le TAC aurait pu être limitant pour les activités de pêche ciblant d'autres espèces et capturant la phycis de façon involontaire. Les pêcheurs contraints de débarquer toute capture de phycis auraient été dans l'obligation, après consommation de leur quota, d'arrêter toute activité présentant un risque de capture involontaire de phycis. Une telle obligation n'étant pas justifiée au regard de l'état du stock de phycis, la Commission européenne a donc supprimé le TAC de phycis dans sa proposition de règlement fixant les possibilités de pêche des espèces de fond pour 2019-2020. Le Gouvernement français a soutenu cette proposition, étant entendu que le CIEM continuera à évaluer l'état de ce stock.

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