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Fadila Khattabi
Question N° 15241 au Secrétariat d'état aux personnes handicapées


Question soumise le 18 décembre 2018

Mme Fadila Khattabi attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur la situation des femmes en situation de handicap victimes de violences. Dans un rapport sur les violences faites aux femmes en Europe publié en 2014, l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne révélait entre autres que 34 % des femmes handicapées avaient subi des violences physiques ou sexuelles de la part d'un partenaire, contre 19 % des femmes valides. Certaines associations d'aide aux victimes indiquent même que 4 femmes en situation de handicap sur 5 en France auraient subi ou subissent des violences. Un chiffre que le Conseil français des personnes handicapées n'a pu valider, faute de données précises sur le sujet. Quoiqu'il en soit, les violences envers les femmes handicapées est une réalité que l'on ne peut contester. Un numéro d'appel et d'écoute a d'ailleurs été mis en place en 2016. Géré par l'association Femmes pour le dire, femmes pour agir (FDFA), ce numéro reçoit en moyenne 51 appels par mois. Pour autant, l'association pointe le fait que les appels diminuent lorsque le numéro n'est plus relayé par les médias. Aussi, il semble essentiel de mener une véritable campagne de sensibilisation sur ce sujet mais aussi et surtout de réfléchir à de véritables structures d'accueil pour ces femmes. Elle l'interroge donc sur la possibilité d'inclure une telle démarche dans l'un des cinq grands chantiers nationaux présentés à l'occasion de la dernière conférence nationale du handicap (CNH), notamment dans le cadre du cinquième chantier dédié à la représentation des personnes en situation de handicap dans la construction des politiques publiques.

Réponse émise le 9 novembre 2021

Les violences sexuelles subies par les femmes en situation de handicap font l'objet d'une mobilisation constante de la part du Gouvernement et sont prises en compte de manière transversale dans les politiques publiques qu'il met en œuvre. Ainsi, dans le cadre de la Grande cause du quinquennat dédiée à l'égalité entre les femmes et les hommes par le Président de la République, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles engage l'ensemble du Gouvernement. Quatre femmes handicapées sur cinq seraient victimes de violences physiques, psychiques, sexuelles mais aussi économiques. 31 % de femmes tous handicaps confondus sont victimes de violences physiques, le chiffre pour les violences sexuelles passe à 80 % pour les femmes atteintes de troubles psychiques et à 90 % pour celles atteintes des troubles du spectre de l'autisme. Si le handicap accroît, pour les femmes, le risque de violences, notamment sexuelles, les violences elles-mêmes sont également à l'origine de handicaps, comme le relève l'Avis sur les violences contre les femmes et les féminicides de la CNCDH du 26 mai 2016, qui souligne les troubles physiques et psychiques très invalidants imputables aux violences ainsi que les handicaps permanents liés aux violences sexuelles. La mobilisation des acteurs publics, dans le cadre du Grenelle des violences conjugales de novembre 2019, a permis de de porter un effort spécifique à destination des femmes des victimes de violence. Sur le plan de la dépendance financière au conjoint, un dispositif de prise en compte très réactive du changement de situation du bénéficiaire de l'AAH en cas de séparation suite à des violences conjugales, est mis en œuvre par les CAF. Les femmes dans ces situations n'ont pas à justifier de la situation de violence, c'est la séparation qui est alors retenue. Il est possible de prendre en compte une séparation même lorsque les deux ex-conjoints résident encore sous le même toit sous réserve de produire des justificatifs attestant de démarches en vue de trouver un logement (par exemple par la production d'une demande de logement social). Cela suppose néanmoins que la personne acquière une certaine autonomie par rapport à son conjoint, ce qui peut être difficilement réalisable pour celle qui subit l'emprise de son conjoint violent. Cette emprise, qui est un obstacle commun à toutes les femmes victimes de violence, est d'autant plus compliquée à surmonter pour celles qui sont en situation de handicap. Afin de proposer des mesures destinées à améliorer le repérage et l'accompagnement des femmes, des travaux in situ sur deux territoires d'expérimentation (la Gironde et dela Loire Atlantique), appuyés par le groupe de travail « handicap » mis en place dans le cadre du grenelle des violences à l'encontre des femmes (co-pilotage DGCS et SG CIH), devront permettre de :déterminer puis expérimenter un cadre permettant une plus grande réactivité du montant de l'AAH aux situations de violence conjugale, en envisageant avec les CAF sur un département pilote une mesure dérogatoire de neutralisation des ressources du conjoint qui viendrait s'appliquer en cas de dépôt par la victime d'une main courante, d'une plainte ou par l'obtention d'une ordonnance de protection (en s'inspirant du dispositif de déblocage de l'épargne salariale et/ou en se rapprochant des mesures prises dans le cadre du RSA), y compris sans séparation du couple : ces éléments seraient ainsi constitutifs d'un changement de situation de nature à entraîner une individualisation de la prestation.prévoir une organisation territoriale avec les différents acteurs (associations, dispositifs de la justice, santé, intérieur mais également acteurs du secteur bancaire) permettant de mieux repérer les personnes handicapées concernées, de mettre en place l'accès à un accompagnement de la personne pour surmonter l'emprise exercée par son conjoint et l'aider dans les démarches à réaliser notamment bancaires.identifier les autres sujets qui peuvent se poser : selon sa situation, la personne victime de violences pourrait en effet perdre son logement indépendant et les compléments à l'AAH (MVA et CR) en cas d'individualisation de la prestation.mettre en place des indicateurs permettant d'évaluer l'impact de ces mesures en vue d'une généralisationproposer les modifications nécessaires des textes réglementaires. Enfin, le renforcement du partenariat avec les associations contribue à la prévention des violences subies par les femmes en situation de handicap. Ainsi, en matière de téléphonie sociale, la prise en charge de ce public s'inscrit dans celle plus globale des femmes victimes de violences. Le 3919, numéro d'écoute et d'orientation géré par la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF) est destiné aux femmes victimes de toutes violences, à leur entourage et aux professionnels concernés. Le 3919 apporte une réponse gratuite, depuis les téléphones fixes et les portables, en métropole et dans les départements d'outre-mer. Il fonctionne sept jours sur sept, du lundi au vendredi de 9 heures à 22 heures, les samedis, dimanches et jours fériés de 9 heures à 18 heures. Le 3919 assure un premier accueil des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles et une réponse directe et complète pour les femmes victimes de violences au sein du couple. Pour les autres types de violences, le 3919 assure une réponse de premier niveau et effectue une orientation ou un transfert d'appel vers les numéros téléphoniques nationaux ou locaux des associations partenaires en fonction de la problématique. La situation de handicap induit des difficultés particulières pour ces personnes quant à leur vie relationnelle, affective et sexuelle, très souvent mise sous tutelle. C'est pourquoi, concernant les établissements médico-sociaux, le Mouvement Français du planning Familial (MFPF), soutenu notamment par la DGCS, s'est engagé dans un travail de promotion de la vie relationnelle, affective et sexuelles des personnes en situation de handicap par le programme « Handicap et alors ? ». Ce programme, qui sera pérennisé dans les établissements sociaux et médico-sociaux prenant en charge des personnes en situation de handicap, s'inscrit également dans une visée préventive de violences sexistes et sexuelles. Il vise, au moyen d'outils d'animation adaptés au vécu émotionnel et cognitif de ces publics, à l'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, à favoriser l'accès à l'information, à libérer la parole, à favoriser l'accès au corps, à la vie affective et à la sexualité et à aider les familles, professionnels et institutions accompagnant les personnes en situation de handicap au quotidien notamment dans les ESMS. Il s'articule autour de 4 axes : - les personnes elles-mêmes, au moyen d'entretiens individuels et de groupes de parole, en s'adaptant à leur handicap et en le prenant en compte afin de leur permettre de prendre conscience de leur rapport aux risques sexuels et de s'approprier les moyens de prévention ; - les familles, en leur ouvrant un espace de parole et de réflexion sur l'accompagnement de leur enfant afin de les emmener vers leur propre autonomie ; - les professionnels, par un soutien méthodologique, des formations et des groupes d'analyse des pratiques ; - les institutions, en leur proposant un appui technique pour prendre en compte, dans leurs structures, les questions de la vie affective, relationnelle et sexuelle.

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