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Fabien Gouttefarde
Question N° 15884 au Ministère de la justice


Question soumise le 15 janvier 2019

M. Fabien Gouttefarde interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question prioritaire de constitutionnalité, renvoyée devant le Conseil constitutionnel par décision du Conseil d'État en date du 12 novembre 2018, au sujet de certaines dispositions de la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées. Les parties demanderesses, parmi lesquelles neufs associations dont Médecins du Monde et le Syndicat du travail sexuel (Strass), devant le Conseil d'État, ont argué que l'instauration de la pénalisation des clients des personnes prostituées et d'une peine complémentaire consistant en un stage de sensibilisation à l'achat d'actes sexuels seraient contraires à certains droits et libertés fondamentaux, à savoir le droit à la vie privée garanti par l'article 2 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à la liberté d'entreprendre garantie par son article 4 et au principe de nécessité et de proportionnalité des peines garanti par son article 8, pour considérer les dispositions de la loi de 2016 contraires à la Constitution. En dépit des affirmations selon lesquelles ce nouveau cadre législatif a conduit à augmenter la précarisation des conditions de vie des personnes en situation de prostitution, en proie à une augmentation des violences à leur encontre, de nombreuses études ont, à plusieurs reprises, constaté que la prostitution est avant tout et surtout une histoire de violence ; de la violence avant d'être exposé à la prostitution : globalement, plus de soixante-quinze pourcents des personnes prostituées ont subi des violences sexuelles alors qu'elles étaient mineures ; de la violence pendant l'exposition à la prostitution : plus des deux tiers subissent des violences physiques entrainant des dommages corporels ; de la violence après la sortie du système prostitutionnel : les troubles psycho-traumatiques résultant de l'exposition aux violences de la prostitution constituant le risque majeur d'être à nouveau victime de violences. Aussi, et sans préjuger de la décision du Conseil constitutionnel à venir, il l'interroge sur la position du Gouvernement dans la procédure pendante devant le Conseil constitutionnel, et particulièrement à la lumière du principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation (Décision n° 94-343/344 DC, 27 juillet 1994).

Réponse émise le 21 mai 2019

Le Gouvernement a pleinement soutenu la constitutionnalité du dispositif répressif issu de la loi de 2016 n° 2016-444 du 13 avril 2016 qui vise à garantir le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. Le Gouvernement considère notamment que la situation d'exploitation et de contrainte subie par la très grande majorité des personnes prostituées justifie une telle intervention du législateur pour réprimer l'achat d'actes sexuels. Dans sa décision n° 2018-761 QPC du 1er février 2019, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du code pénal qui répriment l'achat d'actes sexuels. Il a jugé en particulier que « si le législateur a réprimé tout recours à la prostitution, y compris lorsque les actes sexuels se présentent comme accomplis librement entre adultes consentants dans un espace privé, il a considéré que, dans leur très grande majorité, les personnes qui se livrent à la prostitution sont victimes du proxénétisme et de la traite et que ces infractions sont rendues possibles par l'existence d'une demande de relations sexuelles tarifées. En prohibant cette demande par l'incrimination contestée, le législateur a retenu un moyen qui n'est pas manifestement inapproprié à l'objectif de politique publique poursuivi. »

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