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Sonia Krimi
Question N° 15946 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 22 janvier 2019

Mme Sonia Krimi interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les perspectives du Gouvernement pour accompagner la filière des carottes de Créances à la suite de l'interdiction de l'utilisation du dichloropropène. En vertu du principe de précaution et afin de prévenir les usages nocifs de ce pesticide classé 2B (peut-être cancérigène) par le Centre international de recherche sur le cancer, l'utilisation dérogatoire du dichloropropène, fondée sur l'article 53 du règlement européen n° 1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, n'a pas été prolongée. À court terme, l'évolution soudaine de la réglementation menace l'équilibre de la filière des carottes de Créances dans le département de la Manche. En outre, l'accompagnement financier des exploitants connaissant des pertes substantielles exceptionnelles ne permettra pas d'assurer la pérennité de cette appellation d'origine contrôlée importante pour l'économie du territoire et l'identité du terroir normand. En l'absence, à ce jour, de produit de remplacement suffisamment performant, et considérant le nombre de producteurs concernés et la baisse du tonnage attendue, elle l'interroge sur le contenu du plan envisagé par le Gouvernement pour assurer le maintien de cette culture dans le respect de l'environnement.

Réponse émise le 19 mars 2019

La filière des carottes de Créances est une filière importante au niveau national et pour le développement économique du département de la Manche puisqu'elle représente environ 12 % de la production française de carottes et s'étend sur 1 620 hectares. Environ 300 exploitations agricoles produisent des carottes dans la Manche. Jusqu'en 2018, le dichloropropène était utilisé par les producteurs de carottes de Créances pour désinfecter le sol et lutter contre un nématode à kystes, Heterodera carotae, qui constitue un danger phytosanitaire de premier ordre pour cette culture. Cette substance présente sur le marché européen depuis de nombreuses années n'a pour autant jamais bénéficié d'une autorisation européenne de mise sur le marché en raison d'un niveau de préoccupations sanitaires et environnementales élevé. Une nouvelle demande a été déposée en 2013 et est toujours en cours d'instruction. Cependant, le rapport final sur l'évaluation de la substance a été publié par l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) le 19 novembre 2018. Les conclusions y sont très défavorables et non compatibles avec une approbation, puisque le rapport n'identifie pas d'usage sûr pour ce produit. Des préoccupations critiques sont par ailleurs relevées en ce qui concerne le potentiel mutagénique, le très haut potentiel de contamination des eaux souterraines, les risques élevés pour les organismes aquatiques, pour les arthropodes non cibles et pour les organismes du sol. Au vu du projet des conclusions du rapport de l'EFSA (projet connu au printemps prochain), une approbation européenne n'est pas envisageable. En France, une réponse négative a ainsi été donnée à la demande de dérogation pour l'usage du dichloropropène en cultures légumières et en pépinières de vignes, dérogation régulièrement accordée en France chaque année depuis 2012. Toutefois, afin d'accompagner la transition vers des alternatives moins préoccupantes, le Gouvernement a engagé plusieurs actions. Des travaux d'expérimentation sont menés en partenariat avec les professionnels de la filière pour développer des méthodes alternatives de contrôles du nématode Heterodera carotae sur la culture de carottes. La rotation des cultures introduisant des plantes « pièges », le recours à des biofumigants ou à des produits de biocontrôle constituent des pistes envisagées afin d'abaisser les populations de parasites en dessous du seuil de nuisibilité. Par ailleurs, le nématode Heterodera carotae a récemment été classé comme un danger sanitaire de catégorie 2 permettant un éventuel accompagnement des pertes de production et des coûts de lutte pour les prochaines campagnes par le fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental. Cet accompagnement est néanmoins subordonné à diverses conditions, notamment la mise en place d'un plan de lutte obligatoire. Enfin des outils d'accompagnement au changement de pratiques sont proposés aux agriculteurs de la zone de Créances via les mesures agro-environnementales et climatiques qui accompagnent la diversification des cultures. Les outils du volet agricole du grand plan d'investissement pourront être également mobilisés pour accompagner cette transition.

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