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Paul-André Colombani
Question N° 1596 au Ministère de l'économie


Question soumise le 3 octobre 2017

M. Paul-André Colombani appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la nécessité de corriger les déséquilibres liés à l'évolution de la fiscalité en Corse. En Corse, la fiscalité a été très dynamique sur les dix dernières années. Pour les seuls grands impôts (IR+IS+TVA) la hausse a atteint 98 % entre 2004 et 2015 pour les montants nets prélevés, contre + 40 % au niveau national. Selon les données de la DGFiP, les principaux impôts prélevés pour le compte de l'État en Corse atteignent en 2015 : TVA : 361 millions d'euros (2004 : 201 millions d'euros) ; IR et ISF : 315 millions d'euros (2004 : 190 millions d'euros) ; IS : 101 millions d'euros (2004 : 10 millions d'euros) ; droits d'enregistrement : 57 millions d'euros (2004 : 20 millions d'euros). Selon les données du ministère des finances inscrites en loi de finances, le coût des mesures fiscales spécifiques à la Corse est de 278 millions en 2015 contre près de 350 millions d'euros en 2010. Le coût global est en recul du fait d'une convergence progressive pour certains taux de TVA ou d'autres taxes et d'une volonté de « normalisation » graduelle de la part de l'État (exemple : coût fiscal exonération taxe professionnelle : 70 millions d'euros en 2009 ; exonération CFE : 6 millions d'euros en 2015). Ces éléments permettent de souligner que la contribution de la Corse au redressement des finances publiques a été importante, avec une hausse de la pression fiscale à la fois par la réduction des dispositifs spécifiques et par la forte progression du rendement des impôts prélevés par l'État. Ceci demande d'être pris en compte par l'État sur deux points. Premièrement, dans le cadre du calcul de l'affectation de la TVA aux régions. L'évolution annuelle de la part transférée est indexée sur la variation de la TVA nationale. Cette dernière a progressé de 31 % entre 2004 et 2015. Or la TVA prélevée en Corse a augmenté de 80 % entre 2004 et 2015. Ce mode de calcul met en place une péréquation inverse entre la Corse et les régions continentales plus riches. Deuxièmement, il apparaît opportun de trouver un équilibre entre contribution à la réduction des déficits et une contribution de l'État au retour à une croissance forte et durable en Corse. Ceci passe par l'adoption d'un cadre fiscal adapté aux difficultés conjoncturelles et structurelles mais aussi capables de créer un environnement favorable à la croissance avec une fiscalité incitative, coordonnée avec les priorités de la Corse et permettant de stimuler l'innovation, l'investissement et la croissance des entreprises. Il souhaite donc savoir dans quelle mesure il pourrait engager un dialogue avec le conseil exécutif de Corse, les élus et les socioprofessionnels sur le statut fiscal et social de la Corse afin de réduire ces déséquilibres.

Réponse émise le 15 mai 2018

Sur les modalités de calcul de l'affectation de la TVA aux régions A compter du 1er janvier 2018, une fraction de TVA sera affectée à la collectivité unique de Corse, comme l'ensemble des régions. Elle correspondra à l'ancienne dotation globale de décentralisation et l'ancienne part péréquation de la DGF régionale (soit 108 M€ environ), hors le concours particulier dit « dotation de continuité territoriale ». Cette affectation de TVA progressera chaque année comme la TVA. S'agissant de l'adaptation du cadre fiscal, la Corse bénéficie d'ores et déjà d'un régime favorable destiné à compenser, comme le prévoit l'article 1er de la loi no 94-1131 du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse, « les contraintes de l'insularité et à promouvoir son développement économique et social ». De nombreux dispositifs dérogatoires s'appliquent ainsi aux entreprises, que ce soit en matière de fiscalité indirecte (taux réduits en matière de TVA), directe (création en 2002 d'un crédit d'impôt pour les investissements réalisés en Corse (CIIC) qui a été renforcé en 2016) ou locale (abattement de cotisation foncière des entreprises). De même, les particuliers bénéficient d'un régime favorable en matière de droits de mutation à titre gratuit. Le tableau ci-dessous récapitule les différentes dépenses fiscales relatives à la Corse (source : tome II « voies et moyens » du PLF pour 2017 et du PLF pour 2018) :


N° de la mesure

Intitulé

Coût en 2015 (données PLF 2017) en M€

Estimation pour 2018 en M€ (données PLF 2018)

730306

Taux particuliers applicables en matière de TVA à divers produits et services consommés ou utilisés en Corse :

1/ Taux de 0,9 % au lieu de 2,1 % pour les 120 premières représentations de certains spectacles et les ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie effectuées à des personnes non assujetties à la TVA ;

2/ Taux de 2,1 % au lieu de 5,5 % ou 10 % pour les livraisons de certains biens (eau et produits destinés à l'alimentation humaine, livres, bois de chauffage, engrais) et pour certaines prestations de services (notamment logement et pension, fourniture de repas dans les cantines d'entreprises et scolaires, location d'emplacements sur les terrains de camping-caravanning classés, les spectacles, théâtres, cinémas, transports de voyageurs, abonnements à certains services de télévision, abonnements relatifs aux livraisons d'énergie...) ;

3/ Taux de 10 % au lieu de 20 % pour les travaux immobiliers et les ventes de matériels agricoles livrés en Corse dans les conditions fixées par arrêté, les ventes à consommer sur place de boissons alcooliques et les ventes d'électricité effectuées en basse tension, la fourniture de logement en meublé ou en garni ;

4/ Taux de 13 % au lieu de 20 % pour les ventes de produits pétroliers énumérés au tableau B de l'article 265 du code des douanes.

170

185

210305

Crédit d'impôt sur le revenu et sur les sociétés pour investissement en Corse : en application de l'article 244 quater E du code général des impôts (CGI), les PME peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre de certains investissements réalisés jusqu'au 31 décembre 2020 et exploités en Corse. Ce crédit d'impôt est égal à 25 % du prix de revient hors taxe des investissements éligibles.

54

56

110245

Réduction d'impôt sur le revenu au titre de souscriptions en numéraire de parts de fonds d'investissement de proximité (FIP) dont l'actif est constitué d'un quota d'investissement minimum en valeurs mobilières, parts de société à responsabilité limitée et avances en compte courant émises par des sociétés qui exercent leurs activités exclusivement dans des établissements situés en Corse.

25

35

520112

Exonération temporaire des droits d'enregistrement en matière de mutations par décès portant sur des immeubles et des droits immobiliers situés en Corse.

20

21

90104

Réduction de 25 % des bases imposées en Corse en matière de cotisation foncière des entreprises (CFE) au profit des communes et des EPCI. Suppression des parts départementales et régionales.

6

7

720201

Exonération de TVA de la partie du trajet effectué à l'intérieur de l'espace maritime national pour les transports aériens ou maritimes de personnes et de marchandises en provenance ou à destination de la Corse.

5

5

60104

Exonération totale de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur de certaines terres agricoles situées en Corse.

2

2

800302

Détaxe en matière de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable à certains supercarburants et essences consommés en Corse.

1

1

550104

Taxe de publicité foncière - Exonération du droit de partage de 2,5 % pour les actes de partage de succession et les licitations de biens héréditaires survenus entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2027 à hauteur de la valeur des immeubles situés en Corse.

nc

nc
Ainsi, les entreprises établies en Corse et les ménages bénéficient déjà de nombreux dispositifs fiscaux dérogatoires. Toute démarche, visant à accentuer les différences de traitement entre les entreprises établies en Corse et les ménages y résidant et les autres entreprises et ménages qui ne seraient pas fondées sur des critères objectifs et rationnels, serait porteuse de risques tant sur le plan constitutionnel qu'au regard du droit européen en matière d'aides d'Etat.

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