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Isabelle Valentin
Question N° 1730 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 3 octobre 2017

Mme Isabelle Valentin attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le fait que la France est aujourd'hui confrontée à une menace terroriste d'une intensité exceptionnelle et susceptible de frapper à nouveau au cœur du territoire national. À ce titre, les établissements scolaires constituent plus que jamais une cible privilégiée. Tous les moyens doivent être alors mis en œuvre pour prévenir des attaques au sein même de ces établissements. Or il est aujourd'hui impossible aux employeurs publics, tels que les maires, présidents de conseils départementaux et régionaux, de vérifier préalablement les risques de recrutement d'individus radicalisés et suivis par les services de renseignements, au cours des procédures de recrutement des personnels ayant vocation à exercer dans les établissements scolaires. Il est alors manifeste que l'arsenal législatif français en la matière est insuffisant. Il est nécessaire avoir les moyens juridiques d'agir en aval et non après. Il est donc indispensable d'améliorer la sécurité intérieure en adaptant l'arsenal législatif relatif au contrôle du recrutement des personnels de l'éducation. Ainsi, elle souhaite savoir si de promptes mesures seront prises.

Réponse émise le 7 mai 2019

Le I de l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure (CSI) dispose que « les décisions administratives de recrutement […] prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses […] peuvent être précédées d'enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales intéressées n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées. Ces enquêtes peuvent donner lieu à la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification ». Ces dispositions permettent de réaliser une enquête administrative préalablement à l'intervention d'une décision administrative de recrutement pour certains emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat ainsi que certains emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense. La liste de ces emplois pour lesquels une décision de recrutement peut donner lieu à une enquête administrative en application de l'article L. 114-1 du CSI est précisée aux 2° et 3° de l'article R. 114-2 du CSI. Les décisions de recrutement des personnels dans les établissements scolaires ne figurent pas au sein de cette liste, dans la mesure où ces personnels ne peuvent être regardés comme occupant des emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'État ou relevant du domaine de la sécurité ou de la défense. La réalisation d'une enquête administrative constitue une atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En application de l'article 8§2 de cette convention, cette atteinte doit être prévue par la loi mais également constituer « une mesure, qui dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ». Cet article impose ainsi que les enquêtes administratives poursuivent l'un des buts précités prévus à l'article 8§2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que l'atteinte portée au droit au respect de la vie privée soit proportionnée au but poursuivi. La Cour européenne des droits de l'homme met ainsi en balance les intérêts de l'Etat et le droit de la personne concernée et exige l'existence d'un « besoin social impérieux » afin que l'Etat puisse porter atteinte à ce droit. En l'état du droit, les enquêtes administratives préalables à des décisions administratives de recrutement prévues aux articles L. 114-1 et R.114-2 du CSI constituent des atteintes au droit au respect de la vie privée mais sont justifiées par des exigences de sécurité publique et sont proportionnées au but poursuivi. En revanche, prévoir la possibilité d'effectuer des enquêtes administratives préalablement au recrutement de tous les personnels ayant vocation à exercer dans tout établissement scolaire serait de nature à constituer une atteinte non nécessaire et non proportionnée au sens de l'article 8§2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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