Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Christophe Lejeune
Question N° 1795 au Ministère de l'enseignement supérieur


Question soumise le 10 octobre 2017

M. Christophe Lejeune attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, sur la place des mouvements pédagogiques agréés dans la formation des maîtres. Aujourd'hui, ces mouvements sont reconnus par l'éducation nationale comme partenaires à part entière. Ils siègent au conseil de l'innovation pour la réussite éducative. Pour autant, ils n'apparaissent toujours pas dans les textes ministériels, ni dans les maquettes des ESPE, ni dans les programmes de formation destinés aux futurs professeurs des écoles. Or, comme l'a récemment rappelé le Premier ministre, la formation des professeurs est un des déterminants fondamentaux de la réussite des élèves, notamment de ceux les plus en difficulté. L'enjeu est d'autant plus grand que l'enseignement est appelé à être profondément transformé par les développements du numérique. Le Grand plan d'investissement 2018-2022 tel qu'il a été présenté a pour objectif de mobiliser des expérimentations innovantes en faveur de la formation des maîtres et des professeurs, propice à promouvoir l'excellence et à faire émerger de nouvelles solutions. Pourtant, les enseignants, praticiens des mouvements pédagogiques comme l'Institut coopératif de l'école moderne - ICEM - pédagogie Freinet - sont bien présents dans certains établissements. Ils constituent un réseau de professionnels, de praticiens chercheurs-formateurs, tant au plan national qu'international, disposé à nourrir les formations initiales et continues, à enrichir les pratiques et à accompagner les jeunes professeurs de leur expérience. En substance, l'innovation et ses expérimentations pédagogiques existent depuis plus d'un siècle, mais restent confinées, méconnues, voire stigmatisées par une pesanteur hiérarchique souvent opposée à toute forme de transformation. Or l'évolution des pratiques implique de travailler avec les enseignants qui portent l'innovation au cœur de l'école, du collège ou du lycée. Il importe que les institutions universitaires où se forment les enseignants de demain deviennent, dans leurs domaines, des pôles de recherche sur des pratiques pédagogiques nouvelles. C'est ce que préconise le grand plan d'investissement 2018-2022. Aujourd'hui, force est de constater l'absence des mouvements pédagogiques au sein du processus de formation. Dans la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, leur place est inexistante. Il souhaiterait connaître les dispositions concrètes envisagées en vue de permettre à ces praticiens chercheurs de pouvoir se regrouper au sein d'écoles, de pouvoir expérimenter, accueillir des enseignants stagiaires, en un mot déverrouiller les blocages persistants à l'échelle académique de telle sorte que s'ouvre la formation initiale et continue aux mouvements pédagogiques agréés et que leur place soit ainsi légitimement et officiellement reconnue comme elle l'est dans d'autres pays européens comme la Finlande.

Réponse émise le 17 juillet 2018

L'association des enseignants, des étudiants et des mouvements pédagogiques agréés dans la mise en œuvre de la formation dispensée dans les Ecoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) est prévue par la loi no 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République ainsi que par les quatre textes réglementaires qui en découlent. La loi précitée dans son article L. 721-2 dispose que les ESPE assurent les missions qu'elle leur confie « avec les autres composantes de l'établissement public, les établissements publics d'enseignement supérieur partenaires et d'autres organismes, les services académiques et les établissements scolaires, le cas échéant dans le cadre de conventions conclues avec eux ». Elle prévoit que « leurs équipes pédagogiques intègrent des professionnels intervenant dans le milieu scolaire, comprenant notamment des personnels enseignants, d'inspection et de direction en exercice dans les premier et second degrés ainsi que des acteurs de l'éducation populaire, de l'éducation culturelle et artistique et de l'éducation à la citoyenneté ». L'arrêté du 27 août 2013 fixant le cadre national des formations dispensées au sein des masters « métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation » énumère (art. 2) les compétences que la formation initiale vise à faire acquérir à tous les étudiants et précise que les thèmes d'éducation transversaux et les grands sujets sociétaux peuvent être traités selon des modalités propres et prévoir les « interventions de partenaires extérieurs, d'associations partenaires de l'école ». Il dispose (art. 3) que la formation est assurée par « des équipes pédagogiques pluricatégorielles relevant des composantes concernées des établissements d'enseignement supérieur de l'académie - personnels enseignants, d'éducation et de direction en exercice dans les premier et second degrés - et associant des professionnels intervenant en milieu scolaire dans le cadre de partenariats éducatifs ainsi que des professionnels de la formation ». Le dossier présenté par chaque ESPE, conformément à l'arrêté fixant les modalités d'accréditation des écoles supérieures du professorat et de l'éducation, a permis la vérification de la capacité « à mobiliser, par son action, l'ensemble des potentiels présents dont des équipes pluricatégorielles associant des enseignants, des enseignants-chercheurs, des professionnels intervenant dans le milieu scolaire ». Enfin, l'arrêté du 1er juillet 2013 relatif au référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l'éducation à acquérir en formation initiale et à développer tout au long de la carrière fait de la capacité à « Coopérer avec les partenaires de l'école » une compétence à part entière (la 13e) et en précise la portée : il s'agit pour chacun de « coopérer, sur la base du projet d'école ou d'établissement, le cas échéant en prenant en compte le projet éducatif territorial, avec les autres services de l'Etat, les collectivités territoriales et les associations complémentaires de l'école, les structures culturelles et les acteurs socio-économiques en identifiant le rôle et l'action de chacun de ces partenaires ». Il revient en conséquence à chaque ESPE, composante de l'université, de développer une culture collégiale et pluricatégorielle ouverte au partenariat et aux associations agréées partenaires de l'école, de faire connaître leur champ d'action et de proposer leur contribution à l'offre de formation initiale et continue. De fait, les liens avec les mouvements pédagogiques sont présents dans toutes les ESPE. Une convention a été signée entre le réseau des ESPE et le CAPE (Centre collectif des associations partenaires de l'école où notamment l'ICEM est partie prenante) et nombre de dossiers d'accréditation d'ESPE font apparaître de manière expresse la sollicitation de différents partenaires dont le CAPE à la formation des enseignants, en particulier dans le tronc commun. C'est le cas, par exemple, à l'ESPE de Reims où est organisée une journée obligatoire pour les fonctionnaires stagiaires dite « journée des partenaires » pour laquelle l'ensemble des partenaires existants sont sollicités en fonction de la thématique retenue. Cette journée est obligatoire pour les fonctionnaires stagiaires du premier degré et s'inscrit dans le développement de la compétence “Coopérer avec les partenaires de l'école”. C'est aussi le cas à l'ESPE de Marseille qui revendique dans son projet un important réseau de partenariat et annonce l'implication dans le tronc commun d'associations comme le CAPE ainsi que d'entreprises de l'économie sociale et solidaire (MAIF, MGEN). Les Centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (CEMEA) interviennent à l'ESPE de Limoges dans le premier degré dans des modules centrés sur le travail en équipes. Des colloques, journées de formation se tiennent dans les ESPE comme la manifestation organisée par l'ESPE de Lorraine et l'Institut coopératif de l'école moderne le 12 juin 2017 (www.icem-pédagogie-freinet.org) : « Coopérer pour apprendre », pas moins d'une centaine d'enseignants, enseignants-chercheurs et étudiants ont assisté aux débats et participé aux différents ateliers. Dans nombre de cas des délégués régionaux de mouvements pédagogiques et associatifs siègent au conseil d'orientation scientifique et pédagogique des ESPE, ce qui est une autre illustration de la place donnée aux mouvements pédagogiques en formation initiale, en synergie avec les nombreux champs de recherche qui sont convoqués pour éclairer et orienter la pratique pédagogique des enseignants : recherches en neurosciences, en linguistique, en didactique des disciplines pour n'en citer que quelques-uns. Dans plusieurs académies, des collaborations ont été conduites entre des équipes pédagogiques d'établissements scolaires et des équipes de recherche dans le cadre de projets académiques. Par exemple, le rectorat d'Aix-Marseille a sélectionné six projets de ce type sur des écoles et collèges de REP (réseau d'éducation prioritaire) et REP+ avec un budget de 120 000 €. Les exemples sont nombreux et témoignent d'une démarche forte de rapprochement entre les praticiens-chercheurs et les chercheurs qui devrait conduire à une amélioration sensible de la diffusion des pratiques efficaces en termes d'apprentissage et de bien-être à l'école.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.