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Yannick Kerlogot
Question N° 18575 au Secrétariat d'état Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action


Question soumise le 9 avril 2019

M. Yannick Kerlogot attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, sur les discriminations d'accès à l'emploi des personnes séropositives. En 2019, de nombreux emplois demeurent interdits aux personnes atteintes du VIH, notamment dans la gendarmerie, la police, les sapeurs-pompiers ou encore l'armée. Jusqu'en 2015, l'accès à l'École nationale de la magistrature (ENM) leur était également interdit. L'explication régulièrement avancée pour justifier ces restrictions d'accès à l'emploi est l'inaptitude au terrain des personnes séropositives. Or, si cette explication pouvait s'entendre il y a quelques décennies, elle paraît aujourd'hui anachronique. En effet, depuis la fin des années 1990, la trithérapie permet aux porteurs du VIH de réduire considérablement la charge virale dans leur organisme et de maintenir un bon système immunitaire. Du fait de ces progrès thérapeutiques, la majorité des personnes vivant avec le VIH ont aujourd'hui une charge virale indétectable et ne peuvent donc pas transmettre le virus. Au regard de cette situation, les interdictions d'exercer certains emplois apparaissent aujourd'hui comme de véritables discriminations envers les personnes concernées. Ces restrictions vont à l'encontre de droit international et droit français. Elles entrent notamment en contradiction avec l'alinéa 18 du Préambule de la constitution de 1946 qui garantit à tout citoyen l'accès à la fonction publique. Ainsi, il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour mettre fin à ces discriminations d'accès à l'emploi.

Réponse émise le 2 juillet 2019

La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne comporte pas d'interdictions de principe de recrutement de personne atteinte d'un type particulier d'affection. En effet, son article 5 permet l'accès à la fonction publique sous réserve « des conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction compte tenu des possibilités de compensation du handicap ». Afin de vérifier cette aptitude générale à exercer un emploi public, les fonctionnaires des trois versants de la fonction publique passent, à leur entrée dans l'administration, une visite médicale auprès d'un médecin généraliste agréé par l'administration. Par ailleurs, l'admission dans certains corps, fixés par décrets ou arrêtés, peut plus précisément être subordonnée à des conditions d'aptitude physique particulières conformément aux dispositions des articles 20 et 22 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires (fonction publique de l'État), des articles 10 et 12 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux et des articles 10 et 12 du décret n° 88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière. Dans ces situations, toutefois, le contrôle de ces conditions d'aptitude physiques particulières ne porte que sur la capacité de l'agent à exercer les fonctions auxquelles ces corps donnent accès afin, d'une part, de ne pas l'exposer inconsidérément à un risque auquel son état de santé ne lui permettrait de faire face et, d'autre part, de garantir la protection des usagers ou de la population avec lesquels il sera en contact à l'occasion de ses fonctions.   Pour les corps concernés, l'évaluation médicale s'appuie sur des critères spécifiques définis par les décrets ou arrêtés qui prévoient ces conditions d'aptitude physique particulières. Par exemple, dans les Armées, l'arrêté du 20 décembre 2012 du ministre de la défense relatif à la détermination du profil médical d'aptitude en cas de pathologie médicale ou chirurgicale des personnels militaires prévoit une mesure du profil médical par la définition de sept rubriques auxquelles sont associés des coefficients exprimant le niveau d'aptitude correspondant. Ces rubriques sont identifiées par un sigle et reprises sous le vocable de référentiel « SIGYCOP », chaque sigle correspondant à une région du corps ou à un état général et psychique qui font l'objet d'un examen. À la suite de l'examen médical, un coefficient est attribué à chacun des sigles et ce résultat définit le « profil médical » du candidat qui est ensuite comparé aux profils d'aptitudes minimales requis pour le corps qu'il souhaite intégrer. L'élaboration de ce profil SIGYCOP est assurée par le service de santé des armées en lien étroit avec la Haute Autorité de santé. Concernant les coefficients attribués aux infections au VIH, leur révision au regard des progrès réalisés dans le traitement de ces pathologies relève de la compétence du ministère des armées. Ce point a d'ailleurs récemment fait l'objet d'une proposition (n° 12) du rapport d'information présenté par MM. Bastien Lachaud et Christophe Lejeune, députés, en conclusion des travaux d'une mission d'information sur l'évaluation des dispositifs de lutte contre les discriminations au sein des forces armées et enregistré le 27 mars 2019 à l'Assemblée nationale par la commission de défense nationale et des forces armées. Plus généralement sur l'aptitude physique, l'article 17 du projet de loi de transformation de la fonction publique actuellement en cours de débats parlementaires prévoit d'autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant notamment à simplifier les règles applicables aux agents publics relatives à l'aptitude physique à l'entrée dans la fonction publique. Ainsi, la problématique d'accès à certains emplois spécifiques pour les personnes atteintes du VIH sera-t-elle pleinement intégrée, au même titre que d'autres situations médicales qui ont été signalées, à l'occasion des réflexions qui seront menées dans le cadre de la préparation de ces ordonnances et dans le respect des objectifs d'intérêt général de préservation de la santé des agents publics et des usagers des services publics.

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