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Sophie Panonacle
Question N° 18595 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 9 avril 2019

Mme Sophie Panonacle attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la problématique du contentieux relatif à l'implantation des parcs éoliens en mer. En effet, les trois projets lauréats du premier appel d'offres du 12 avril 2012 font toujours l'objet de recours devant le juge administratif à ce jour, soit 7 ans après la décision d'attribution. Le décret du 8 janvier 2016 concernant les ouvrages de production et de transport d'énergie renouvelable en mer a donné compétence à la Cour administrative d'appel (CAA) de Nantes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges en la matière. Toutefois, l'expérience prouve que le délai de 12 mois donné à la CAA pour statuer à compter du dépôt du recours n'a pas permis d'accélérer notablement l'examen des recours. Ceci s'explique par la formation quasi systématique de pourvoi en Conseil d'État à l'encontre de la décision rendue. Aucune disposition spécifique du décret venant préciser les modalités de ces recours, c'est donc le droit commun qui s'applique. Ainsi, un délai supplémentaire de 7 à 9 mois peut s'écouler entre la décision de la CAA de Nantes et le rejet du pourvoi par le Conseil d'État, et même un délai de 10 mois simplement pour déclarer un recours recevable. En ajoutant un nouveau délai d'instruction de l'affaire par le Conseil d'État, c'est une période de plus de 18 mois qui peut s'écouler entre la décision de la CAA de Nantes et la décision du Conseil d'État, sachant que cette dernière peut consister en un renvoi du cas d'espèce devant la CAA de Nantes pour une nouvelle instruction, accroissant d'autant les délais de jugement. Ce renvoi pour statuer au fond a pour effet de limiter les bénéfices attendus du décret de 2016, comme l'a souligné le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en avril 2018. A l'inverse, octroyer une compétence directe au Conseil d'État serait de nature à permettre de confirmer la légalité des décisions administratives dans un délai de 12 à 18 mois. Cette avancée permettrait en outre de participer activement à l'amélioration de la visibilité du calendrier de développement des projets, mais aussi à confirmer la tendance actuelle de réduction des coûts de production. De plus, une telle avancée ne serait pas incompatible avec le respect du droit au recours, dans la mesure où le Conseil d'État est directement compétent concernant des projets susceptibles d'affecter l'environnement, en application de l'article R. 311-1 du code de justice administrative. Cette mesure permettrait en outre de « réduire l'incertitude juridique pesant sur les projets de construction et prévenir les recours abusifs susceptibles de décourager les investissements », comme énoncé par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2017-672 QPC du 10 novembre 2017. Le nombre limité de contentieux relatif à l'éolien en mer n'entraînerait pas d'encombrement supplémentaire pour le Conseil d'État, puisque celui-ci connaît déjà actuellement de la quasi-totalité des litiges en cassation. Enfin, la charge des coûts de raccordement des parcs éoliens en mer, estimée entre 150 et 300 millions d'euros, incombe dorénavant à RTE, aux termes de la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures. C'est également RTE qui devrait supporter les coûts échoués de raccordement en cas d'abandon du projet, suite à une annulation finale et définitive des autorisations délivrées à l'exploitant. Bien que des garanties puissent être constituées par l'exploitant au profit de RTE, celles-ci n'auraient vocation qu'à couvrir les coûts échoués en cas d'abandon du projet pour défaillance de celui-ci. Or la seule annulation juridictionnelle jamais enregistrée à ce jour avait pour cause une faute de l'État et non de l'exploitant. Une efficience accrue des délais d'instruction des recours serait ainsi bénéfique et plus sécurisant financièrement pour RTE et la bonne gestion deniers publics. Aussi, elle lui demande de lui indiquer les mesures qui pourraient être prises en vue d'améliorer l'efficience des recours juridictionnels, afin d'accélérer la concrétisation de la transition énergétique et d'alléger les risques financiers supportés par la collectivité.

Réponse émise le 16 juin 2020

Le développement des énergies renouvelables en mer est au cœur de la transition énergétique et de la croissance bleue dans lesquelles la France s'est engagée. Le Gouvernement a mené un grand nombre de réformes afin de simplifier et d'accélérer le développement des énergies renouvelables en mer : autorisation environnementale unique, accélération du traitement des contentieux, généralisation du dialogue concurrentiel, réforme du raccordement dorénavant à la charge de RTE et mise en place d'un régime indemnitaire en cas de retard ou d'avarie du raccordement. En particulier, la réforme du contentieux relatif aux installations de production d'énergie renouvelable en mer et leurs ouvrages connexes, mise en œuvre par le décret du 8 janvier 2016, a permis, en donnant compétence en premier et dernier ressort à la Cour d'appel administrative de Nantes, de réduire en moyenne de deux ans la durée d'une procédure contentieuse. Cette réforme, respectueuse du principe général du droit qu'est le droit au recours, a donc un bilan positif sur le temps de développement des projets. La simplification et l'accélération des procédures de développement des projets éoliens en mer sont quant à elles permises notamment en application du décret du 21 décembre 2018 relatif aux procédures d'autorisations des installations de production d'énergie renouvelable en mer. En premier lieu, le processus décisionnel est accéléré tout en conservant le bon niveau d'association de l'ensemble des acteurs concernés par les projets. Il favorise en effet une meilleure acceptabilité des projets, grâce à une participation du public organisée par la Commission nationale du débat public (CNDP). Le public est notamment consulté sur la localisation de la ou des zones potentielles d'implantation d'un parc éolien marin envisagée. En deuxième lieu, la notion d'autorisations à caractéristiques  inscrite à l'article L. 181-28-1 du code de l'environnement est précisée. Les autorisations relatives à la construction et à l'exploitation d'un parc éolien en mer, autorisation environnementale, concession d'utilisation du domaine public maritime pourront comporter des caractéristiques variables y compris sur des éléments décisifs comme le nombre d'éoliennes ou encore la puissance unitaire de la turbine, afin que le projet puisse être ajusté en fonction des connaissances acquises lors du processus de développement du projet, et de la maturité des technologies, sans avoir besoin de recourir à des actes modificatifs. Par ailleurs, la Ministre de la transition écologique et solidaire a annoncé le 14 juin 2019 l'accélération du développement de l'éolien en mer qui passe en premier lieu par la réalisation des projets déjà engagés. Avec le rejet par le Conseil d'État des recours déposés contre le projet de parc à Saint-Nazaire, ce sont 80 éoliennes, produites à Saint-Nazaire qui seront installées en mer d'ici 2022. Elles permettront de couvrir 20 % de la consommation électrique de Loire-Atlantique et généreront 8 millions d'euros par an de recettes fiscales pour les collectivités locales et les pêcheurs. Cette accélération passe enfin par la réalisation immédiate de nouveaux projets soutenus par le ministère de la Transition écologique et solidaire à l'instar de la construction et l'exploitation du parc éolien de Dunkerque. Ce site est le premier à bénéficier des dernières réformes mises en place par le Gouvernement, en particulier la réforme du contentieux, la mise en place du dialogue concurrentiel, la modernisation du cadre de raccordement et l'introduction d'autorisations à caractéristiques variables. Enfin, la programmation pluriannuelle de l'énergie fixe un calendrier pour le développement des projets éoliens en mer, avec 6 projets à attribuer d'ici 2023, puis 1 GW par an à attribuer à partir de 2024. Ce rythme d'attribution des projets, accéléré de façon très ambitieuse par rapport aux années précédentes, permet de donner de la lisibilité aux acteurs de la filière et contribue à l'atteinte des objectifs transition énergétique.

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