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Constance Le Grip
Question N° 18796 au Ministère de l'action


Question soumise le 16 avril 2019

Mme Constance Le Grip alerte M. le ministre de l'action et des comptes publics sur le sujet des contrefaçons. L'OCDE estime que 2,5 % des importations mondiales et 5 % des importations en Europe sont des faux produits. Les contrefaçons continuent d'avoir un lourd impact sur l'économie et de menacer les fabricants français. Selon une étude de l'observatoire européen de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), la contrefaçon entraine chaque année une perte de plus de 35 000 emplois et de près de 7 milliards d'euros de ventes en France. À l'échelle de l'Union européenne, cela représente plus de 434 000 emplois et près de 59 milliards d'euros. Si les saisies de faux produits ont baissé de 35,7 % entre 2017 et 2018, cela n'est malheureusement pas uniquement lié à l'efficacité accrue du travail des services douaniers, mais surtout à l'évolution des pratiques de distribution de contrefaçons. Alors que précédemment, les produits contrefaits transitaient par des grossistes, étaient livrés par conteneurs, et étaient redistribués à l'échelle nationale via des réseaux de ventes (à la sauvette, sur les marchés, chez les discounters, via les comités d'entreprises), aujourd'hui la contrebande de produits contrefaits et illicites se fait de plus en plus souvent par internet, avec une vente directe aux consommateurs. Il s'agit là d'un procédé qui pose de nouveaux défis pour la lutte contre la contrefaçon. D'après une étude réalisée en 2018 par l'IFOP, 37 % des Français âgés de 15 ans et plus ont déjà acheté de la contrefaçon sans le savoir. Parmi les faux produits saisis par les services douaniers, les produits de consommation courante occupent les premières places, avec les jeux et jouets en tête, ce qui atteste l'importance de la lutte contre la contrefaçon pour garantir la protection et la sécurité des consommateurs et notamment des plus jeunes. En effet, en l'absence de contrôles qualité et de certifications, les éléments entrant dans la composition des objets ne peuvent être évalués, représentant alors d'importants risques pour la santé et la sécurité des personnes. Par ailleurs, les incertitudes concernant le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne risquent d'entraîner un afflux de douaniers supplémentaires aux frontières avec le Royaume-Uni, avec pour conséquence une réduction des effectifs déployés dans la lutte contre les contrefaçons aux autres frontières françaises. Les actuelles grèves de douaniers témoignent des immenses défis à relever ces prochaines années. Les acteurs économiques poursuivent leur travail de sensibilisation, avec par exemple la signature le 9 avril 2019 d'un accord de coopération entre l'association française de lutte contre la contrefaçon Unifab (Union des Fabricants), son homologue italien l'Indicam (Istituto di Centromarca per la lotta alla contraffazione) et la ville frontalière de Vintimille, réputée pour son « marché ». Compte tenu, non seulement des enjeux économiques considérables, mais aussi des risques de santé liés aux faux produits et des enjeux de la protection des consommateurs, elle souhaite savoir comment le Gouvernement entend adapter sa stratégie de lutte contre la contrefaçon aux nouvelles pratiques de distribution. En outre, elle souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement compte mettre en œuvre pour davantage sensibiliser les consommateurs aux risques liés aux faux produits, et tout particulièrement les jeunes consommateurs, et rendre plus difficile l'accès aux sites internet proposant des produits contrefaits.

Réponse émise le 4 juin 2019

La lutte contre la contrefaçon constitue l'une des priorités de l'administration des douanes, et consiste à la fois à protéger la capacité d'innovation des entreprises et à lutter contre les grands trafics, au confluent de ses missions d'action économique et de lutte contre la fraude. Quelque 5,4 millions d'articles de contrefaçon ont ainsi été saisis en 2018. La mobilisation de la douane en vue de la préparation du Brexit ne se fera en aucun cas au détriment de ses autres objectifs, qu'il s'agisse de la lutte anti-contrefaçon ou de ses autres missions – bien au contraire. En effet, la préparation du Brexit n'a pas conduit à des redéploiements d'effectifs, mais à des recrutements supplémentaires déterminés pour faire face à la charge de travail supplémentaire occasionnée par le Brexit pour l'ensemble des missions de la douane. La lutte contre les trafics de contrefaçon doit cependant s'adapter sans cesse pour répondre efficacement à un trafic protéiforme et particulièrement évolutif. Le développement très rapide des achats sur Internet et des flux physiques associés constitue en effet le principal défi à relever. Les saisies en matière de e-commerce représentent désormais près de 30 % des saisies de contrefaçons, alors que le phénomène était pratiquement inexistant il y a quelques années. Dans ce cadre, les pouvoirs douaniers ont été renforcés ces dernières années. – le décret n° 2016-1064 du 3 août 2016, qui prévoit la transmission de données à la douane par les entreprises de fret express et les prestataires de services postaux afin d'améliorer le ciblage sur ce vecteur ; – la loi du 4 juin 2016 relative au renforcement de la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, qui a doté le service Cyberdouane de nouveaux pouvoirs, en permettant notamment la recherche et la constatation d'infractions par les cyberdouaniers agissant sous pseudonyme. La douane, police de la marchandise, a mis en place un service d'analyse de risques et de ciblage (SARC), structure dédiée à l'analyse des données de masse au travers du datamining. Ce service doté d'outils performants et d'agents spécialisés, a d'ores et déjà prouvé son efficacité et continue à affiner ses méthodes et à étendre son champ de recherche. Le développement du service Cyberdouane, dont l'objet est de lutter contre les fraudes douanières sur Internet, permet de mettre en œuvre des techniques visant à entraver la vente de contrefaçons en ligne. Les analystes conduisent leurs investigations sur les sites de vente, les places de marché et les réseaux sociaux qui, de manière croissante, sont utilisés pour la commercialisation de produits contrefaisants. Au-delà de ces deux services, c'est l'ensemble du maillage territorial de la douane qui est impliqué dans la lutte contre la fraude sur Internet. En 2019, un réseau Cyberdouane régional sera d'ailleurs déployé. Le plan stratégique de la douane en matière de lutte contre la fraude sur internet porte sur trois axes : – la dissuasion, c'est-à-dire la réduction de l'offre illicite et la sensibilisation des acheteurs sur les risques encourus ; – la coopération, notamment avec les acteurs de l'internet légal ; – la répression, à la fois au titre de la commercialisation de marchandises prohibées et de la fraude aux droits et taxes. Cette mise en œuvre s'appuie sur une coopération étroite avec les plateformes de e-commerce pour permettre l'accès aux données dont elles disposent, en s'appuyant notamment sur la recommandation de la Commission européenne de mars 2018. Celle-ci invite à la conclusion de protocoles de coopération avec les plateformes, fondés sur une approche transversale concernant l'ensemble des contenus illicites (terrorisme, incitation à la haine, racisme), mais également le commerce illicite, dont la contrefaçon. L'objectif est triple : retirer les contenus illicites, prévenir leur apparition en ligne et communiquer sur les contenus supprimés afin d'en évaluer l'efficacité. Enfin, la douane contribue activement à l'information et à la responsabilisation des citoyens sur les risques liés à l'achat de produits contrefaisants, par des campagnes de sensibilisation menées conjointement avec l'Union des fabricants (Unifab), notamment au moment des périodes de départ en vacances et par l'information qu'elle donne sur son site internet. Une rubrique dédiée permet ainsi aux consommateurs d'apprendre à reconnaître les contrefaçons, et à les éviter.

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