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Dominique Potier
Question N° 19085 au Ministère de l'europe


Question soumise le 23 avril 2019

M. Dominique Potier interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la position de la France vis-à-vis du processus diplomatique en cours qui vise à mettre fin à l'usage d'armes explosives à large rayon d'impact en zones peuplées, dites « EWIPA ». Soutenu par le secrétaire général des Nations Unis, Monsieur Antonio Guterres, un groupe de 12 États, mené par l'Autriche, travaille à la rédaction d'une déclaration politique internationale visant à mettre un terme aux souffrances humaines provoquées par cette pratique. Les effets de l'utilisation d'armes explosives en zone peuplées sont en effet dramatiques. En 2017, chaque jour dans le monde (en Irak, Syrie, Yémen, Ukraine), 90 civils ont été tués ou blessés par une arme explosive. Les conséquences sont parfois irréversibles : les armes explosives tuent, provoquent des blessures sévères, génèrent des handicaps et des traumatismes psychologiques durables. Même terminés, les conflits continuent à avoir des conséquences terribles dans les zones où ont été utilisées des armes explosives par l'exposition des populations locales à des « restes explosifs de guerre ». Ce sont ainsi 8 millions de tonnes de gravats contaminées par des restes explosifs qui menacent à présent les habitants de la ville de Mossoul. Alors que cette année 2019 marque le vingtième anniversaire de la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur la protection des civils en conflits armés, il souhaite connaître la position de la France sur ce processus de déclaration internationale.

Réponse émise le 19 novembre 2019

La France accorde la plus grande importance à la protection des civils dans les conflits armés. Elle est partie aux Conventions de Genève et à leurs protocoles additionnels, ainsi qu'à l'ensemble des conventions multilatérales qui visent à interdire ou limiter les effets potentiellement excessifs des armes conventionnelles. La France mesure pleinement la gravité des effets que peut produire un usage disproportionné et indiscriminé des armes dites explosives dans des zones où des civils sont présents en grand nombre. Elle condamne un tel usage de ces armes et estime que le droit international humanitaire existant définit des principes qui permettent de répondre à ce défi majeur : le principe de précaution qui prescrit de veiller constamment à épargner la population civile dans la conduite des opérations militaires ; le principe de discrimination qui impose de distinguer entre objectifs militaires et biens ou populations civils ; le principe de proportionnalité qui interdit de mener des attaques susceptibles d'infliger aux civils des dégâts trop importants par rapport à l'avantage militaire escompté. En cette année qui marque le vingtième anniversaire de la résolution 1265 des Nations unies sur la protection des civils, la France demeure pleinement engagée en faveur du renforcement des règles du droit international humanitaire, à travers leur universalisation et leur application effective. En ce qui concerne l'universalisation de ces normes, la France a émis cette année, conjointement avec l'Allemagne, un appel à l'action pour renforcer le respect du droit international humanitaire, qui vise notamment à promouvoir la ratification ou l'adhésion aux Protocoles additionnels aux Conventions de Genève. En ce qui concerne leur application effective, la mise en œuvre et le partage de bonnes pratiques peuvent améliorer le respect des principes du droit international humanitaire et renforcer la protection des civils. Pour sa part, la France a intégré le droit international humanitaire dans la formation de ses forces armées et, dans les opérations extérieures qu'elle mène pour lutter contre le terrorisme au titre de ses responsabilités internationales. Elle veille à appliquer des procédures rigoureuses, notamment en matière de ciblage et d'évaluation des dommages collatéraux, pour garantir un emploi maîtrisé de la force. La France, qui entretient un dialogue dense et régulier sur ces questions avec la société civile, est ouverte aux échanges sur ses pratiques nationales en matière d'application du droit international humanitaire. Elle salue les initiatives comme celle de l'Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), qui a organisé en septembre 2019 à Genève un atelier pour identifier les politiques et pratiques opérationnelles susceptibles d'améliorer la protection des civils, en tenant compte de la complexité des conflits en milieu urbain. Dans cet esprit d'ouverture, la France est prête à contribuer de façon constructive au processus de négociation d'une déclaration politique relative aux règles d'emploi des armes explosives en zones peuplées. Elle souhaite que ce processus puisse servir à améliorer concrètement la protection des civils, en permettant la valorisation et la diffusion de bonnes pratiques en ce domaine. A cette fin, il est essentiel que ce processus soit, conformément aux principes du multilatéralisme, ouvert, transparent et consensuel, afin de prendre en compte l'apport et l'expérience d'Etats qui, comme la France, conduisent des opérations militaires pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. La question des règles d'emploi des armes explosives doit être distinguée de celle de la protection des populations civiles contre les "restes explosifs de guerre". Les restes explosifs de guerre – c'est-à-dire les munitions non explosées ou abandonnées – font l'objet du protocole V de la Convention sur certaines armes classiques, auquel la France a adhéré. Ce protocole prévoit que l'enlèvement, le retrait ou la destruction de ces restes explosifs relève de la responsabilité des Etats parties, ou des parties à un conflit, sur les territoires qu'ils contrôlent. La France appelle l'ensemble des Etats à ratifier et mettre en œuvre ce protocole, et contribue par son action humanitaire à la dépollution des zones touchées par les restes explosifs de guerre, ainsi que par le fléau des engins explosifs improvisés.

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