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Joaquim Pueyo
Question N° 19482 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 14 mai 2019

M. Joaquim Pueyo attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les inquiétudes pesant sur l'avenir de l'ONF. Rétablir sa santé financière à court terme tout en devant assumer les missions de gestion durable de la forêt, telle est l'équation que l'ONF ne peut parvenir à résoudre dans les délais actuellement impartis. En effet, il est manifeste que l'Établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) confronté à la faiblesse du versement compensateur de l'État, à la baisse de la recette des produits vendus et dernièrement à l'augmentation des cotisations patronales sur les pensions, ne peut conduire correctement ses missions de gestion durable de la forêt. De nombreux citoyens dénoncent une industrialisation de la forêt (intensification des récoltes, monocultures résineuses, raccourcissement des cycles) ne répondant qu'à une injonction marchande, constituant une entorse au code forestier. Concrètement, en trente ans l'ONF a été conduit à se séparer de plus d'un tiers de ses salariés qui exercent des compétences globales pour une gestion durable et multifonctionnelle de la forêt (écologique, sociale et économique) De plus, ces dernières années, les fonctionnaires de l'ONF sont remplacés par des personnels contractuels, privés de la formation permettant l'exercice des missions globales de protection de l'environnement (interventions auprès du public, police judiciaire et administrative en exécution du code forestier, gestion des risques majeurs en forêt, etc...). En conséquence, les personnels forestiers se trouvent contraints de répondre principalement à l'objectif commercial de l'EPIC en développant des méthodes de travail contraires aux objectifs sociaux et écologiques qu'ils devraient poursuivre. Il convient de rappeler que ce phénomène ayant conduit à une grande déstabilisation de la profession, s'est traduit par de nombreux suicides. La forêt est unanimement reconnue par les citoyens comme le poumon de la planète. Son rôle est déterminant dans la reconquête de la biodiversité indispensable à la survie de l'humanité. Aujourd'hui, face aux impératifs climatiques, il est évident que le rôle historique de l'opérateur public qu'est l'ONF dans la gestion des forêts publiques doit être renforcé. Le coût et le bénéfice de l'exercice de l'ensemble des missions de service public doivent être réévalués dans le cadre d'une planification à moyen et long terme. Au-delà de la valeur du bois, la valeur économique des services rendus par la gestion forestière publique (régulation du cycle de l'eau, fixation du carbone, préservation des sols, effets positifs sur la santé, etc) doit être prise en compte. C'est ainsi que les performances économiques, écologiques et sociales pourront se conjuguer. Pour rester globale et cohérente, la réflexion sur la gestion de la forêt publique doit se garder de segmenter activités commerciales et non-commerciales. La tentation d’une privatisation de certains services de la gestion des forêts publiques est trop dangereuse dans un contexte concurrentiel. Il est évident qu'elle conduirait à ne répondre qu'à un objectif de rentabilité immédiate, délétère pour les questions environnementales. Il convient de rappeler que les premiers principes du régime forestier ont été mis en place pour sauver la forêt française de la surexploitation du bois. L'État français se doit de protéger son patrimoine forestier, encore plus indispensable aujourd'hui dans les enjeux de la lutte contre le dérèglement climatique. Il lui demande quelles mesures il compte mettre en œuvre pour renforcer la gestion multifonctionnelle de toutes les forêts publiques françaises.

Réponse émise le 25 juin 2019

L'action de l'office national des forêts (ONF), établissement public à caractère industriel et commercial, est guidée par la mise en œuvre d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) fixant ses axes de travail. Le COP a été signé par l'État, la fédération nationale des communes forestières et l'ONF le 7 mars 2016 pour la période 2016-2020. Le COP confie en premier lieu à l'ONF la mission, prévue à l'article L. 221-2 du code forestier, de gérer durablement les forêts publiques, en intégrant leur triple vocation écologique, sociale et économique. L'exploitation raisonnée des forêts est prévue dans le cadre d'aménagements forestiers programmant les coupes et les travaux. La récolte de bois dans les forêts publiques contribue à l'approvisionnement de la filière bois et apporte des recettes aux communes concernées permettant notamment d'investir dans le renouvellement de ces forêts. L'ONF joue ainsi un rôle moteur, au sein de la filière forêt-bois, en faveur de la transition énergétique et dans la préservation et le développement de notre patrimoine forestier. Le secteur forêt-bois constitue en effet un secteur stratégique pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 inscrite dans le plan climat et déclinée par la stratégie nationale bas carbone en cours de révision. Il alimente l'économie en produits bio-sourcés et renouvelables, fournit la biomasse pour l'énergie et constitue un puits de carbone significatif. Dans ce contexte, les ministères de tutelle, ministère de l'agriculture et de l'alimentation et ministère de la transition écologique et solidaire, accordent la plus grande importance à son bon fonctionnement. Le COP prévoit en effet la stabilité des financements de l'État, ce qui mérite d'être souligné dans le contexte budgétaire actuel. À ce titre, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation maintient ses financements à l'ONF à hauteur de 140,4 M€ par an au titre du « versement compensateur », pour contribuer à la couverture du coût que représente pour l'ONF la gestion des forêts des collectivités et à hauteur de 26,2 M€ par an pour financer les missions d'intérêt général qui sont confiées à l'ONF. Dans le même temps, l'ONF doit améliorer la marge de ses activités commerciales et maîtriser ses charges, et donc ses effectifs, pour limiter son endettement. Cette orientation implique des changements significatifs passant notamment par une gestion dynamique des ressources humaines. L'exercice 2017, difficile, a conduit à la dégradation de la situation financière de l'ONF et a accru son endettement qui a atteint 320 M€, pour un plafond de 400 M€. Cette dégradation est due à une activité en repli du fait d'un marché du bois moins dynamique qu'anticipé, tandis que les charges ne diminuent pas à due concurrence des produits. Le dépassement observé en 2017 sur la masse salariale (+ 4,8 M€) a conduit à la prise de décisions interministérielles en gestion pour permettre à l'établissement de mieux maîtriser ses dépenses et ne pas aggraver encore plus sa situation financière. L'État a décidé de verser l'ensemble de la contribution d'équilibre en 2018 et a ainsi mobilisé 5,7 M€ supplémentaires par rapport aux crédits inscrits au budget initial. En contrepartie, l'ONF a gelé 145 équivalent temps plein travaillé (ETPT) pour assurer la maîtrise de la masse salariale. L'ONF s'efforce de limiter l'impact de ce gel sur la qualité des missions qu'il assume. Ces efforts consentis par l'ONF devront être poursuivis en 2019, avec l'application d'un schéma d'emploi de - 80 ETP portant ainsi le plafond d'emploi à 8 536 ETPT en loi de finances initiale. Cette situation financière tendue ne remet cependant pas en cause l'avenir de l'établissement. Dans le cadre de son contrat d'objectifs et de performance 2016-2020, l'ONF a engagé de gros efforts pour améliorer l'efficacité de sa gestion : augmentation du chiffre d'affaire et de la valeur ajoutée, maîtrise des charges, autant d'efforts qui commencent à porter leurs fruits comme en témoigne la relative amélioration du résultat en 2018. Une mission interministérielle a été lancée par le Gouvernement afin de proposer les évolutions possibles pour assurer un modèle soutenable pour l'ONF et son articulation avec le développement des territoires. Elle contribuera à la préparation du futur COP, afin que celui-ci participe à l'objectif de relance de la filière engagé dans le cadre du plan d'actions interministériel forêt-bois. Les conclusions de la mission devraient être rendues très prochainement.

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