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Pierre Morel-À-L'Huissier
Question N° 20355 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 11 juin 2019

M. Pierre Morel-À-L'Huissier alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le problème de la retraite et de la protection sociale des vétérinaires sanitaires. Ceux-ci ont effectué, pour le compte de l'État et sous mandat sanitaire, des prophylaxies collectives afin d'enrayer les épidémies qui frappaient certains élevages français. L'État, à l'époque, n'a pas versé de cotisations sociales pour ces services, alors que cela leur aurait ouvert des droits à la retraite et à la protection sociale. Cette situation a donné lieu à une décision du Conseil d'État du 14 novembre 2011, enjoignant aux pouvoirs publics de réparer ce préjudice. Or, à l'heure actuelle, tous les cas n'ont pas été réglés de manière satisfaisante : certains vétérinaires se sont vus opposer la prescription quadriennale, d'autres n'ont pas reçu d'indemnisation pleine et entière car ils ont agi avant que la jurisprudence ne soit définitivement fixée. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures envisagées par le Gouvernement pour mettre fin définitivement à ce contentieux qui oppose l'État et les vétérinaires sanitaires, dans des conditions satisfaisantes pour ces derniers.

Réponse émise le 16 juillet 2019

L'État a tiré toutes les conséquences de la jurisprudence du Conseil d'État du 14 novembre 2011 relative à la responsabilité de l'État suite au défaut d'affiliation dont ont fait l'objet les vétérinaires au titre des activités réalisées avant 1990 sous mandat sanitaire. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice financier découlant de ce défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale. Cette procédure est longue et complexe. Elle s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire jusqu'en 1990. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable selon les praticiens et ce indépendamment du département d'exercice. 1.257 vétérinaires ont déposé un dossier recevable et complet et accepté la proposition d'assiette sur laquelle seront calculés les arriérés de cotisation dus aux caisses de sécurité sociale ainsi que les minorations de pension échues pour les vétérinaires déjà retraités. Si une petite minorité d'entre eux a fait le choix d'interrompre le processus amiable à la faveur d'une action contentieuse, 1.113 vétérinaires et ayants droit de vétérinaires ont d'ores et déjà été indemnisés suite à la signature d'un protocole transactionnel avec le ministère. Certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières en raison d'un dépôt tardif. L'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions n° 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, n° 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si cet article prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi. Après plus de 6 années d'existence, la cellule ministérielle strictement dédiée au processus transactionnel de régularisation, qui recevait encore récemment les dernières demandes de bénéfice de la procédure amiable, touche désormais à sa fin. En effet, la perspective de la clôture du processus initié a été amenée par la diminution progressive et significative du volume de dossiers introduits ; elle a fait l'objet d'une annonce officielle en amont, très largement relayée auprès des professionnels. Le traitement des dernières requêtes recevables a vocation à se poursuivre dans les prochains mois afin d'aboutir à l'indemnisation de l'ensemble des demandeurs éligibles avant la fin de l'année 2019, conformément aux engagements du ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Il convient de souligner que la clôture du processus transactionnel, qui devrait intervenir au second semestre, n'est aucunement de nature à priver les intéressés d'un droit effectif à l'indemnisation de leur préjudice, dont ils pourront toujours se prévaloir devant le juge administratif.

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