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Philippe Dunoyer
Question N° 21979 au Ministère de la justice


Question soumise le 30 juillet 2019

M. Philippe Dunoyer attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'expérimentation d'une peine citoyenne de réparation applicable aux personnes majeures civilement responsables des mineurs délinquants. Un récent rapport d'information de la commission des lois a fait le constat d'une tendance à l'aggravation des infractions commises par les mineurs et au rajeunissement de leurs auteurs, dont il résulte un accroissement des audiences devant le tribunal pour enfants et, par conséquent, un allongement des délais de jugement. Dans le contexte de préparation de la réforme de la justice des mineurs par voie d'ordonnance, le rapport de la commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, remis par MM. les députés Jean-Michel Fauvergue et Christophe Naegelen, préconise de rendre la réponse pénale « plus immédiate et significative pour les mineurs ». La proposition n° 11 de ce même rapport suggère de « créer les conditions d'une réponse éducative et pénale efficace aux actes de délinquance commis par des mineurs [et d'] expérimenter notamment de permettre au juge de prononcer des peines citoyennes destinées aux majeurs civilement responsables après examen de la situation familiale et de la responsabilité éducative ». Il précise que cette demande d'expérimentation est directement inspirée d'une proposition des députés de Nouvelle-Calédonie qui soutiennent la création d'une telle peine sur leur territoire qui se caractérise par une forte implication des mineurs dans les faits de délinquance (en Nouvelle-Calédonie, selon les chiffres publiés par l'État-major de sécurité (février 2019), les moins de dix-huit ans représentent encore aujourd'hui environ un quart des personnes impliquées dans des faits de délinquance). Il soutient pleinement l'expérimentation de cette peine au niveau national, qui aurait vocation à responsabiliser les parents en leur permettant d'effectuer une peine dans des structures d'accueil publiques ou auprès d'associations agréées. Il souhaiterait donc savoir si le Gouvernement entend prendre en compte cette préconisation et mener cette expérimentation, dans le cadre de l'élaboration de la réforme de la justice des mineurs, et le cas échéant, dans quel délai et selon quelles modalités.

Réponse émise le 23 juin 2020

Plusieurs dispositions du code pénal permettent de réprimer les parents d'un mineur délinquant lorsque cette délinquance résulte d'une faute de ces derniers ou lorsque ceux-ci profitent de cette délinquance. Ainsi, l'article 227-17 de ce code réprime le fait pour le responsable légal d'un mineur de se soustraire à ses obligations légales au point de compromettre, notamment, la moralité ou l'éducation du mineur. L'article 227-21 réprime quant à lui la provocation de mineur à la commission de crimes ou délits. L'article 321-6 réprime en outre le fait de ne pouvoir justifier des ressources correspondant à son train de vie lorsqu'on est en relations habituelles avec une personne se livrant à la commission de certaines infractions, en prévoyant des peines aggravées lorsque la personne vivant habituellement avec l'auteur des infractions a autorité sur ce dernier, et donc lorsque ce délit est reproché à des parents à la suite des infractions commises par leurs enfants. En application de l'article 131-5-1 du code pénal, les parents auteurs de ces différents délits peuvent notamment être condamnés à la peine de stage de responsabilité parentale qui a pour objet de rappeler au condamné les obligations juridiques, économiques, sociales et morales qu'implique l'éducation d'un enfant. Depuis l'entrée en vigueur le 24 mars 2020 des dispositions relatives aux peines de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, cette peine de stage est applicable à tous les délits punis d'emprisonnement, et pourra donc être également prononcée à chaque fois qu'un parent serait considéré comme complice, par aide ou assistance, d'une infraction commise par son enfant. Dans toutes ces hypothèses, les parents des enfants délinquants peuvent également être condamnés à la peine de stage de citoyenneté, ou à la peine de travail d'intérêt général, cette dernière peine pouvant s'effectuer dans des structures publiques ou dans des structures privées agréées. Il ne paraît donc pas nécessaire de modifier notre législation, même à titre expérimental. Par ailleurs, prévoir, hors les hypothèses précédemment rappelées, une possibilité de sanction pénale contre les parents d'enfants délinquants du seul fait de leur responsabilité civile, serait contraire au principe constitutionnel selon lequel nul n'est responsable pénalement que de son propre fait, découlant des articles 8 et 9 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et rappelé par l'article 121-1 du Code pénal.

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