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Marie-France Lorho
Question N° 22114 au Ministère de la culture


Question soumise le 30 juillet 2019

Mme Marie-France Lorho attire l'attention de M. le ministre de la culture sur l'inquiétante disparition du patrimoine mobilier mis à la disposition de la présidence. Dans une précédente question en date du 18 juin 2019, à ce jour restée sans réponse, Mme la députée interrogeait M. le ministre sur la traçabilité des dépôts d'œuvres d'art du patrimoine français. Cette question se pose avec une urgence toute particulière, spécialement lorsque l'on constate que le patrimoine laissé en dépôt, par les Français, aux mains de ses administrateurs fait l'objet d'une dilapidation, voire d'une attribution frauduleuse de la part de ceux qui sont aux responsabilités. L'Oiseau bleu de François-Xavier Lalanne, la paire de chenets Directoire en cuivre ou encore la chaise Empire Jacob-Desmalter font partie de ce patrimoine remarquable et pourtant aujourd'hui, restent introuvables. L'Élysée, c'est 80 000 tapis, meubles, pendules, déposés à des fins de décorations ou usuelles. La commission de récolement des dépôts et œuvre d'art (CRDOA) a réalisé une synthèse portant sur les résidences de la présidence de la République. Après avoir passé au crible tous les inventaires des dépôts à la présidence depuis le XIXe siècle, et après les avoir mis en contradiction avec ce qui se trouve réellement dans les pièces et les placards, la commission a abouti au chiffre trop élevé de 57 165 biens recherchés. Cela concerne huit sites dont le palais de l'Élysée, ses annexes mais aussi le fort de Brégançon ou la Lanterne dans les Yvelines. Lorsque la manufacture de Sèvres repère une partie de la vaisselle fournie à l'Élysée en vente sur un site de vente en ligne, on ne peut que se poser des questions sur la façon dont est traitée la propriété du peuple français. De nouvelles pièces ayant été commandées il lui semble urgent que soient mises en places des procédures veillant à la conservation de ce patrimoine. Jusqu'en 2017 aucun inventaire rigoureux n'était disponible. Une telle situation n'est pas normale. Si l'Élysée a déposé pas moins de 81 plaintes depuis 2012, selon la CRDOA, la présidence de la République serait trop lente à saisir la police en cas de disparition, les procédures étant très lourdes. Cela laisse le recel se faire en toute impunité. La question qui se pose est donc celle de savoir, d'une part, où sont les œuvres qui manquent à l'appel et où en sont les procédures visant à les retrouver, et, d'autre part, quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour éviter que ne surviennent de telles disparitions, et, si par extraordinaire cela venait à se produire malgré tout, comment améliorer les procédures pour les rendre plus efficaces.

Réponse émise le 16 février 2021

Le volume des biens manquants doit être relativisé, comme ne manque pas de le souligner la Commission de récolement des dépôts d'œuvres d'art (CRDOA) dans son rapport. En effet, les dépôts manquants à l'Élysée, dont le volume impacte très fortement le taux global de biens recherchés, correspondent pour 92 % à des pièces de services de table livrées pour la plupart très anciennement par la Manufacture de Sèvres et dont la fragilité a souvent conduit à des casses, qui ne font pas toujours l'objet d'une documentation. Par vagues, entre 1960 et 2009, la Présidence a retourné à la Manufacture de Sèvres plus de 1,6 tonne de porcelaines qu'il n'est malheureusement pas possible de dénombrer précisément. Pour s'en tenir à la seule période 1980-2017, sur 5 576 dépôts, le nombre de non localisés ne s'élève plus qu'à 570, soit un peu plus de 10 %. Cette tendance, observable chez tous les dépositaires, est à mettre en relation avec l'essor des opérations de récolement, largement portées par le ministère de la culture. Ces dernières constituent désormais une opération permanente pour les institutions déposantes (décennale pour les musées nationaux, quinquennale pour le Mobilier national), qui ont su mettre en place, depuis vingt ans, sous l'égide de la CRDOA, une méthodologie rigoureuse et efficace. Le récolement permet ainsi, à échéances régulières, de faire le point sur les biens manquants (biens réapparus ou, inversement, nouvelles disparitions). Il doit cependant être poursuivi sur la durée, ce qui est la seule manière de contribuer à réduire les disparitions d'œuvres. Les déposants veillent par ailleurs régulièrement à mettre fin au dépôt des biens dont ils estiment que les conditions de conservation ou de sûreté ne sont pas satisfaisantes. Ils doivent déposer plainte lorsqu'une disparition est suspectée ou établie, ou signaler sur leurs sites internet respectifs, ou sur celui du ministère de la culture, les biens manquants : en effet, leur signalisation permet aux différents acteurs du marché de l'art, comme aux responsables des collections, d'en assurer une veille ; elle permet surtout aux propriétaires de faire valoir leurs droits en cas de réapparition de ces acquisitions. Ce signalement, alternatif à des dépôts de plainte systématiques (dont le nombre s'élève à 2 036), permet d'éviter d'encombrer les tribunaux de plaintes insuffisamment documentées (notamment pour les biens très anciens, dont on ne dispose pas de photographie) ou concernant des objets sans valeur marchande issus de collectes ethnographiques ou archéologiques et souvent disparus depuis longtemps. S'agissant des dépôts placés sous la responsabilité du ministère de la culture, le catalogue collectif des musées de France en ligne, Joconde, permet de signaler – et de rechercher – les biens manquants, conformément aux préconisations de la note-circulaire du 4 mai 2016 relative aux opérations de post récolement. Le moteur de recherche Collections (http://www.culture.fr/Ressources/Moteur-Collections) a par ailleurs vocation à recueillir l'ensemble des notices des biens culturels manquants appartenant aux autres institutions du ministère.

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