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Carole Grandjean
Question N° 22198 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 6 août 2019

Mme Carole Grandjean attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les possibles effets contraignants, pour la filière fromagère fermière de la campagne de prévention actuelle rappelant les précautions à prendre dans la consommation de produits au lait cru par les enfants. En effet, si des précautions doivent effectivement être prises pour les enfants de moins de 5 ans, une application trop stricte de la règle préventive risque de nuire fortement aux producteurs fermiers, notamment ceux qui fournissent les services de restauration collective. On observe notamment que certaines cuisines centrales, par souci de simplification des approvisionnements et de croisement de produits, suppriment totalement les produits au lait cru pour l'ensemble de leurs clients, même pour ceux qui ne sont pas qualifiés de « population à risque ». Cette situation est d'autant plus paradoxale que les accords issus de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite « loi EGALIM » prévoient que l'ensemble de la restauration collective devra proposer au moins 50 % de produits biologiques ou de production locale au plus tard au 1er janvier 2022. Alors que les bénéfices de la consommation de lait cru ont été démontrés en termes de réduction des pathologies allergiques notamment, elle lui demande que soit développée la recherche visant à l'analyse du rapport bénéfice-risque et que soit portée à la connaissance des citoyens une information juste et équilibrée ne risquant pas de mettre en péril une filière et le savoir-faire fermier qui y est attaché.

Réponse émise le 5 novembre 2019

Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est très attaché au développement des produits agricoles sous signe de qualité, qui permettent de répondre aux attentes du consommateur tout en maintenant un tissu économique rural dynamique. S'agissant des fromages, trois quarts sont fabriqués à base de lait cru. Aliments de qualité, typiques ou élaborés dans le respect de l'environnement et du bien-être animal, ils font partie du patrimoine alimentaire français et la loi EGALIM, par les objectifs de qualité des approvisionnements qu'elle définit, va créer de nouveaux débouchés pour les producteurs de produits sous signes de qualité. Ces fromages au lait cru renferment une flore vivante variée, qui peut être favorable en termes de santé (exemple : bactéries lactiques diverses), comme l'a récemment rappelé l'institut national de la recherche agronomique. Cependant, ils peuvent également comporter des agents pathogènes ; cette présence peut être observée dans un contexte où les animaux des troupeaux laitiers sont porteurs asymptomatiques de divers pathogènes dans leur tube digestif (salmonelles, E. coli, etc.). Cette présence d'agents pathogènes peut poser des problèmes de santé majeurs, particulièrement pour les populations sensibles, dont les enfants. En moins d'un an, on a recensé trois séquences de cas groupés (soit une trentaine d'enfants atteints) de syndrome hémolytique et urémique (SHU) chez les tout petits (nourrissons et enfants de moins de 5 ans) à la suite d'une infection à E. coli hautement pathogène en lien avec la consommation de fromages au lait cru. Il s'agit d'un syndrome d'insuffisance rénale aiguë, entraînant chez ces très jeunes enfants, hospitalisés en urgence, un risque de séquelles rénales ou neurologiques définitives voire de décès. Si les bonnes pratiques d'élevage, l'hygiène de la traite et de la fabrication des fromages au lait cru permettent de réduire ce risque, elles ne permettent toutefois pas de garantir une absence d'exposition des consommateurs à ces pathogènes en consommant du lait cru ou des produits au lait cru. Ce risque majeur a conduit le ministère de l'agriculture et de l'alimentation à rappeler les règles essentielles de consommation des fromages au lait cru et l'existence de populations à sur-risque comme les enfants. Selon l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, il existe en effet un sur-risque significatif (110 fois plus de risque de SHU) dans la tranche 0-5 ans par rapport à la population générale adulte. Ce sur-risque diminue ensuite avec l'âge, et rejoint la population générale à partir de l'âge de 15 ans. Dans le contexte de la restauration collective scolaire, le respect de ces règles conduit à distinguer les produits servis aux enfants selon leur âge voire selon le type d'école (maternelle ou primaire). La diversité des organisations retenues dans chaque commune ne permet pas de définir un modèle national et il revient à chaque responsable de restaurant collectif de définir la manière la plus appropriée de répondre conjointement aux enjeux sanitaires d'une part et de qualité d'autre part. Il n'y a donc pas de contradiction entre les objectifs de qualité découlant de l'article 24 de la loi EGALIM et la mise en œuvre des mesures de prévention détaillées ci-dessus, adaptées à l'âge des enfants. Les 35 millions d'euros du programme européen « lait et produits laitiers » et « fruits et légumes » sont ciblés dès la rentrée scolaire 2019-2020 pour accompagner le déploiement de cette mesure.

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