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Yannick Kerlogot
Question N° 22211 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 6 août 2019

M. Yannick Kerlogot attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la prolifération du choucas des tours et ses impacts sur les cultures. Le choucas des tours est une espèce d'oiseau de la famille des corvidés présente sur tout le territoire hexagonal, à l'exception du sud-ouest et de la Corse. En Bretagne, cette espèce est très présente et occasionne des dégâts considérables sur les cultures, en particulier sur les parcelles de maïs. Les cultures légumières, notamment les plantations de choux et de haricots, sont également touchées. En outre, le choucas des tours investit de plus en plus fréquemment les stabulations : les déjections produites dans des zones d'élevages constituent potentiellement un risque sanitaire qu'il est aujourd'hui difficile d'évaluer. Par ailleurs, sa nidification dans les cheminées pose de réels problèmes de sécurité pour les habitants des communes touchées. Les obstructions de cheminées, dues à ces nidifications, entraînent des départs de feu. La profession agricole a pu constater des impacts particulièrement sévères au printemps 2019 qui auront des conséquences indéniables sur les rendements attendus à l'automne 2019. De nombreux témoignages d'agriculteurs sont remontés aux chambres d'agricultures et rendent compte d'une prolifération de cette espèce dans la région. Depuis l'arrêté du 29 octobre 2009, le choucas des tours est considéré comme une espèce protégée, ce qui rend impossible le versement d'un dédommagement aux agriculteurs touchés par ce fléau. Certains agriculteurs renoncent à remplir un formulaire de constatation des dégâts car ils savent qu'ils ne seront pas indemnisés. Plusieurs dérogations à l'interdiction de destruction de l'espèce ont été accordées, notamment dans le Finistère. Dans les Côtes-d'Armor, un décret datant de 2017 a autorisé le prélèvement de 4 000 choucas sur deux ans. Ces décisions, bien que nécessaires, restent peu efficaces au regard de l'ampleur du fléau. Pour endiguer cette prolifération, il est indispensable de connaître précisément le nombre d'individus qui sévit dans chaque région. Mi-mai 2019, une demande de dérogation pour destruction du choucas des tours a été déposée à la DDTM par la chambre d'agriculture de Bretagne (dossier d'accompagnement du CERFA n° 13616/01). Dans les Côtes-d'Armor, trois comptages ont été réalisés sur 83 communes : 2 306 couples ont été recensés. « À partir de 2 300 couples observés, l'augmentation de la population pourrait donc être probablement autour de 6 000 jeunes par an », estime le rapport cité en référence. Cette étude, très partielle, met en évidence une augmentation potentielle nettement supérieure aux prélèvements annuels effectués depuis 2017. Les agriculteurs ont la possibilité d'utiliser plusieurs matériels pour éloigner les choucas dont des canons ou des effaroucheurs. Le constat largement partagé est que l'effarouchement peut être ponctuellement une solution pour empêcher des dégâts sur culture. Mais il n'apporte pas de solutions suffisantes à terme. Enfin, le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a rendu un avis sur la question dans sa séance du 22 février 2019 dans lequel il précise : « Si le CNPN peut comprendre l'exaspération localement, il est regrettable que rien ne soit dit et établi depuis que le phénomène existe (depuis plus de dix ans). Quant à l'évolution des populations concernées (...) - alors que des laboratoires spécialisés existent régionalement, - pourquoi rien ne semble avoir été entrepris, sinon de poser les problèmes de moyens au seul ministère de l'Écologie ». Au printemps 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire a annoncé le lancement d'un programme d'analyse et de recherche dans le but d'éclaircir les causes de la dynamique démographique des choucas des tours et d'identifier les solutions les plus adaptées pour limiter les dégâts aux cultures. Ainsi, il souhaiterait avoir confirmation du lancement de cette étude et connaître le calendrier de remise des résultats. Par ailleurs, il l'interroge sur les solutions pouvant être mises en place pour permettre dès l'automne 2019 l'indemnisation des agriculteurs ; il souhaite notamment connaître son avis sur la levée du statut d'espèce protégée qui rendrait possible l'indemnisation.

Réponse émise le 15 octobre 2019

Le choucas des tours (Corvus monedula) est une espèce d'oiseau de la famille des corvidés présente sur tout le territoire métropolitain à l'exception du Sud-Ouest (Landes et Pyrénées-Atlantiques) et de la Corse. À l'échelle nationale, sa population nicheuse a été évaluée entre 150 000 et 300 000 couples (Atlas des oiseaux nicheurs de France métropolitaine, 2015). Sa population hivernante est estimée à un million d'individus. Le choucas est classé en « préoccupation mineure  » sur la liste rouge nationale de 2016. Le choucas des tours est effectivement une espèce protégée en France par l'arrêté du 29 octobre 2009 relatif à la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et aux modalités de leur protection. À ce titre, sa destruction est interdite sauf dérogation prévue au L. 411.2 et suivants du code de l'environnement. Cette espèce est également inscrite à l'annexe II/2 de la directive oiseaux, la France ne faisant pas partie des États membres qui ont autorisé la chasse à cette espèce. Dans l'Ouest de la France, et notamment dans certains départements bretons, la population de choucas a fortement augmenté depuis les années 90 et peut occasionner des dommages aux cultures (semis de maïs, pois, pommes de terre et ensilage). Afin de limiter ces dégâts, des dérogations à l'interdiction de destruction de l'espèce sont accordées dans le Finistère depuis 2007, et dans les Côtes d'Armor et le Morbihan, plus récemment. Dans le Finistère, département où cette problématique est la plus forte, le prélèvement de 5 000 oiseaux, accompagné de mesures d'effarouchement, a été autorisé en 2018. Ces prélèvements ont été effectués par les lieutenants de louveterie qui ont consacré l'essentiel de leurs interventions à cette opération. Cette opération sera reconduite cette année dans ce département avec un prélèvement augmenté, de l'ordre de 7 000 oiseaux, qui sera réparti sur les cinq secteurs du département les plus impactés, de manière à minimiser les dégâts sur les cultures. Mais cette situation n'est pas pérenne. Il faut comprendre en effet pourquoi certaines espèces d'oiseaux désertent nos campagnes alors que d'autres plus opportunistes profitent au contraire de l'augmentation des ressources alimentaires disponibles issues des nouvelles productions agricoles. Une maîtrise à long terme des populations de choucas des tours implique des méthodes raisonnées de prévention et de lutte, et devra nécessairement passer, entre autres, par la réduction de l'accès à ces ressources alimentaires à l'échelle des exploitations agricoles.

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