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Philippe Latombe
Question N° 22418 au Ministère de l’économie


Question soumise le 13 août 2019

M. Philippe Latombe alerte M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les mesures prises par Amazon France pour contrecarrer la taxe sur les services numériques au taux de 3 % et continuer ainsi à échapper à l'impôt en en faisant supporter le coût à ses clients. Dans un courrier adressé à ces derniers, la firme (6,6 milliards de CA en France, impôt sur les bénéfices quasi nul) se dit contrainte « d'ajuster les taux de [ses] frais de vente pour refléter ce coût supplémentaire » et précise qu'« à compter du 1er octobre, le montant des frais de vente applicables aux ventes effectuées sur Amazon.fr augmentera de 3 % ». Cette taxe dite « taxe GAFA » prise directement sur le chiffre d'affaires se trouve ainsi systématiquement répercutée sur le client, qui la répercute lui-même sur le consommateur, ce qui équivaut à une augmentation indirecte et insidieuse de 3 % de la TVA, à moins que le client d'Amazon ne l'impute sur sa propre marge, ce que bon nombre d'opérateurs des marketplaces ne peuvent supporter financièrement. Dans un communiqué, la firme précise sa position : « Étant donné que nous opérons dans le secteur très concurrentiel et à faible marge du commerce de détail et que nous investissons massivement dans la création d'outils et de services destinés à nos clients et à nos vendeurs partenaires, nous ne sommes pas en mesure d'absorber une taxe supplémentaire assise sur le chiffre d'affaires et non sur les bénéfices ». Le raisonnement d'Amazon France est théoriquement juste mais, dès l'instant où la firme organise systématiquement le contournement de l'impôt sur les bénéfices, cette défense est singulièrement entachée de mauvaise foi et entre en conflit avec ce qui est l'esprit même de l'impôt dans le pays. Mais surtout, Amazon fausse le jeu de la concurrence au détriment des PME qui sont, elles, assujetties de plein fouet à l'IS. Il lui demande comment il envisage de sanctionner le comportement d'Amazon afin d'éviter un effet de contagion chez les autres GAFAM et quelle initiative européenne urgente il compte lancer pour contrer cette quasi-impunité fiscale d'Amazon.

Réponse émise le 22 décembre 2020

Le Gouvernement est pleinement conscient de l'enjeu d'équité fiscale que soulève la question de la taxation des grandes entreprises du numérique. C'est pourquoi il œuvre activement, notamment au sein de l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE), afin que de nouveaux principes de taxation permettent de mieux appréhender les bénéfices des grandes entreprises, notamment du numérique, là où ils sont créés. Compte tenu des délais nécessaires pour faire évoluer les principes de fiscalité internationale, la France a également promu la mise en place au niveau européen d'une solution temporaire mais plus globale permettant d'atteindre cet objectif. Ce n'est que face à l'échec de la négociation européenne qu'il a été décidé de mettre en place une taxe nationale sur la base des principes discutés au sein de l'Union européenne. Désormais, l'équité fiscale est mieux assurée dès lors qu'en France les grandes entreprises du numérique quels que soient le lieu de leur siège social ou la localisation de leurs actifs, acquittent de l'impôt. La marketplace d'Amazon entre pleinement dans le champ de la taxe sur les services numériques. Sur le cas particulier mentionné, il n'appartient pas au Gouvernement de commenter le choix annoncé par le groupe concerné d'augmenter ses prix, ni celui consistant à présenter ce choix comme une conséquence de l'institution de la taxe dont il est redevable. Il appartient uniquement à l'administration de s'assurer que chaque redevable déclare et acquitte le montant de taxe dû. En effet, sauf cas particulier lié à des situations exceptionnelles ou des difficultés structurelles du fonctionnement de la concurrence, le principe de liberté des prix qui prévaut en France depuis 1987 fait obstacle à toute intervention étatique sur la fixation des tarifs librement consentis entre acteurs économiques. Enfin, il est très exagéré de prétendre qu'au stade du consommateur final cette répercussion de la taxe sur les services numériques, pour autant qu'elle ait le caractère automatique que l'on veut bien lui prêter, serait équivalente à une augmentation indirecte de la TVA de 3 %. En effet, cette taxe s'applique sur les seuls revenus que l'opérateur tire des opérations d'intermédiation, lesquels ne représentent qu'une fraction, faible, très minoritaire du prix de vente appliqué au consommateur.

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