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José Evrard
Question N° 22432 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 13 août 2019

M. José Evrard alerte M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences au sein des forces de l'ordre de la répression des « Gilets jaunes ». Devant le tribunal correctionnel de Paris s'est tenu le procès de l'ancien PDG d'orange et de six de ses cadres sous l'accusation de harcèlement moral ayant entraîné le suicide de plusieurs salariés. Si le suicide d'individus tient du mystère ou d'éléments complexes de la vie de chacun, l'administration de la justice a fait droit à poursuite pour des proches des personnes ayant mis fin à leurs jours. Il semble donc plausible qu'un phénomène concernant un nombre significatif de personnes puisse relever d'une décision d'une hiérarchie et que celle-ci fasse l'objet de poursuites pénales. À ce jour, 41 fonctionnaires de police se sont suicidés en 2019. L'année précédente, ils étaient 68 à mettre fin à leurs jours. Il fût remarqué une augmentation significative du phénomène. Nous sommes donc face à un phénomène de masse qui ne peut être examiné en dehors des décisions des missions demandées aux forces de l'ordre. Compte tenu de la concomitance des temps, la répression des « Gilets jaunes » n'est pas étrangère au phénomène. À leurs revendications, il fût répondu principalement par la répression. On ne gagne pas la paix en poursuivant la guerre. Les mutilations dont ont été l'objet ces compatriotes manifestant pacifiquement ont profondément heurté les consciences. La réaction de la masse policière n'a pu être indifférente à ce qu'elle vivait au contact dans la rue, elle a été choquée d'entendre un responsable syndical policier saluer la perte d'un œil d'un manifestant par un « c'est bien fait pour sa gueule ! ». Elle a eu honte d'avoir de tel représentant et les plus faibles psychologiquement ont dû mesurer que le salut ne viendrait pas de ce syndicalisme policier. Le contexte n'est pas favorable à la diminution du mécontentement. Il va s'accroître à la rentrée en quantité et en sujets, le risque de poursuite de l'escalade de la répression est patent, de la violence aussi. Les conditions de l'effondrement de la force publique sont posées, au moment où d'autres menaces apparaissent. Il lui demande s'il n'est pas temps de répondre aux revendications légitimes, de revoir les relations avec les mouvements sociaux en général, de rechercher l'apaisement au risque de voir se déchaîner des forces qui seront difficilement maîtrisables.

Réponse émise le 29 octobre 2019

Les policiers et les gendarmes assurent chaque jour, avec dévouement et professionnalisme, le respect de la loi républicaine et la protection de nos concitoyens, dans des situations fréquemment difficiles et dangereuses, parfois au péril de leur vie. Pendant plusieurs mois, face au mouvement dit des « gilets jaunes », ils ont une nouvelle fois été soumis cet été à un rythme d'emploi exceptionnel et ont subi des attaques parfois extrêmement violentes. Améliorer les conditions de travail des policiers et des gendarmes et leur donner les moyens de remplir leurs missions dans les meilleures conditions d'efficacité et de sécurité possibles constitue donc une priorité du Gouvernement. Malgré le contexte budgétaire, le budget des forces de l'ordre est donc en augmentation depuis 2017. Cette année, ce sont par exemple 525 M€ supplémentaires qui bénéficient à la police et à la gendarmerie. Ce budget en hausse permet notamment aux policiers et aux gendarmes d'être mieux équipés et mieux protégés : nouveaux véhicules, nouvelles armes, équipements de protection, etc. Sur le plan immobilier, si important pour les conditions de travail, les crédits d'investissement permettent un effort majeur, avec un budget de 300 M€ par an au titre de la programmation triennale 2018-2020 pour la police et la gendarmerie. Par ailleurs, 10 000 postes de policiers et de gendarmes seront créés durant le quinquennat. Cette augmentation des moyens des forces de l'ordre va se poursuivre, notamment dans le cadre de la future loi de programmation. Plusieurs chantiers engagés par le Gouvernement visent également à répondre aux attentes des forces de l'ordre concernant l'exercice de leur métier. Une nouvelle dynamique a été impulsée pour accélérer la suppression des tâches indues, intensifier la substitution de personnels administratifs aux effectifs policiers et simplifier la procédure pénale. La police de sécurité du quotidien, qui a été mise en place sur tout le territoire, vise aussi à recentrer les policiers sur le cœur de leur métier (le contact, la voie publique, etc.) et à leur donner les moyens d'agir efficacement au plus près des situations et difficultés locales. Les travaux, en cours, visant à l'élaboration d'un nouveau schéma national de maintien de l'ordre, permettront aux forces de l'ordre de mieux répondre aux nouvelles formes de contestation, fréquemment marquées par des débordements de violences, que l'on observe depuis plusieurs années. Les questions de sécurité, d'hygiène et de santé des personnels constituent aussi des enjeux de premier plan. Des travaux sont en cours concernant les questions du temps de travail, des heures supplémentaires et de la fidélisation des effectifs. Des réformes structurelles sont en effet programmées au sein de la police nationale en application du protocole conclu le 19 décembre 2018 avec les organisations syndicales du corps d'encadrement et d'application de la police nationale. Ce protocole, qui se traduit par des avancées indemnitaires substantielles, constitue en effet aussi la base d'un projet de transformation de la police nationale, qui se construit dans le cadre d'un dialogue social avec les syndicats sur des sujets structurels : organisation du temps de travail, notamment concernant les heures supplémentaires, mesures de fidélisation fonctionnelle, notamment pour accroître l'attractivité de la filière judiciaire, dispositifs de fidélisation territoriale, etc. De nouveaux cycles horaires de travail seront en particulier expérimentés dès le 15 septembre. Ce régime de travail libérera du potentiel opérationnel et répondra mieux aux aspirations des policiers en matière de conciliation entre exigences du service et vie personnelle. Face à la question du suicide, qui est une préoccupation majeure, la police nationale s'est dotée en mai 2018 d'un nouveau « programme de mobilisation contre le suicide », qui se décline actuellement. Il met notamment l'accent sur l'amélioration du quotidien au travail, sous l'angle en particulier de la solidarité, du « collectif » et du management. Dès la fin avril 2019, a par ailleurs été créée une « cellule alerte prévention suicide ». Depuis le printemps et jusqu'à l'automne, sont organisés des séminaires sur la prévention du suicide dans chaque zone de défense et de sécurité. Un « mémento pratique pour les encadrants », visant à apporter des réponses concrètes à des interrogations liées aux suicides, est également diffusé. Par ailleurs, le service de soutien psychologique opérationnel de la police nationale, qui disposait déjà d'une astreinte téléphonique nationale pour les situations opérationnelles, a vu son système évoluer. Un numéro vert (0805 20 17 17) est désormais actif depuis le 3 juillet 2019 et, depuis le 2 septembre, un second numéro (0805 230 405) donne accès à un dispositif d'écoute psychologique 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. C'est donc tant sur le plan des moyens, des modes d'action et du management que le Gouvernement agit pour améliorer les conditions de travail des forces de l'ordre, garantir leur protection, leur fournir les moyens d'une plus grande efficacité et donner du sens et des perspectives ambitieuses à leur métier.

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