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Vincent Rolland
Question N° 22702 au Ministère auprès du ministre de l’économie


Question soumise le 10 septembre 2019

M. Vincent Rolland souhaite interroger M. le ministre de l'économie et des finances au sujet des difficultés rencontrées par la filière aluminium en Europe et en France. Le secteur subit en effet une grave crise, face à une concurrence internationale dopée par le dumping économique, social et environnemental de certains pays. Si la communauté européenne a pris des mesures pour protéger le secteur en établissant des barrières douanières, force est de constater que ces dernières n'ont pas permis d'enrayer la perte de vitesse de la filière. Le déclin de la filière aluminium européenne pose également une question de souveraineté : on détient actuellement un savoir-faire technique important, fruit de décennies d'innovation, qu'il convient de préserver sur le sol français. De plus ce métal entre dans la composition de nombreux produits manufacturés, comme l'automobile ou l'aéronautique. L'indépendance de la France est donc en jeu. Par conséquent, il souhaite connaitre la position du Gouvernement sur le sujet et les positions qu'il compte prendre pour doter la France, et l'Europe, d'une véritable vision stratégique industrielle pour la filière aluminium.

Réponse émise le 12 janvier 2021

Depuis une vingtaine d'années, l'industrie de l'aluminium mondiale subit des changements structurels importants associés à la croissance du marché asiatique. Ainsi, entre 2000 et 2019, la production chinoise d'aluminium primaire est passée de 3 à 36 Mt par an pour atteindre 57 % de la production mondiale, alors même que les productions européenne et française ont très peu évolué au cours de cette période pour atteindre respectivement aujourd'hui environ 8,5 Mt et 430 Kt d'aluminium primaire. Structurellement, en Europe, l'activité de la filière est très concentrée sur la partie aval qui représente 70 % du chiffre d'affaires (CA) annuel de l'industrie européenne de l'aluminium et près de 92 % de l'emploi de toute la chaine de valeur. Alors que l'Asie exporte peu d'aluminium primaire, l'aval de la filière est fortement concurrencé par les semi-produits et produits finis asiatiques. La filière est très fortement consommatrice d'électricité, et sa performance passe par un accès à une énergie électrique à coût compétitif. Depuis 2016, l'État a mis en place des dispositifs permettant de limiter le prix de l'électricité pour les industriels électro-intensifs (abattement sur le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité, valorisation de l'effacement industriel, valorisation du service d'interruptibilité fourni par les industriels, compensation carbone pour compenser le coût du carbone inclus dans les prix de l'électricité…). Les travaux et les réflexions sont poursuivis, au niveau européen et au niveau national, afin de s'assurer que le prix de l'électricité reste compétitif pour les industries électro-intensives, au premier rang desquelles se trouvent les industries de l'aluminium. La compétitivité doit s'accompagner d'une concurrence équitable. C'est le rôle des outils de défense commerciale qui relèvent de la compétence exclusive de la Commission européenne car l'Union européenne est le bon niveau d'intervention pour peser face aux grandes économies mondiales avec lesquelles nous sommes en concurrence. Dans ce cadre, la France est un des États de l'Union européenne les plus actifs, qui a été à l'initiative et au soutien d'une utilisation plus forte des outils de défense par la Commission européenne. Pour le secteur de l'aluminium, des droits antidumping ont été instaurés pour protéger certains produits finis en aluminium tels que les jantes, les radiateurs ou encore les feuilles d'aluminium. Une procédure antidumping est également en cours, à la suite d'une plainte déposée auprès de la Commission européenne et soutenue par la France, concernant de fortes importations de profilés d'aluminium originaires de Chine. Par ailleurs, depuis 2018, à l'instar du secteur de l'acier, des mesures de surveillance de l'importation de certains produits en aluminium ont été mises en place au niveau de l'UE afin d'obtenir rapidement des données précoces sur les échanges commerciaux, pour être en mesure de réagir à temps à de brusques variations des marchés mondiaux susceptibles de fragiliser le marché de l'aluminium européen. Dans les années à venir, l'Europe va disposer sur son territoire, d'un gisement de plusieurs millions de tonnes d'aluminium à recycler issu, chaque année, de tous les champs d'activités (bâtiment et travaux publics -BTP-, automobile, emballage, …) offrant un atout pour positionner la filière aluminium sur un axe stratégique du recyclage en phase avec les objectifs environnementaux ambitieux que se sont fixés la France et l'Union européenne. C'est dans cette perspective que le contrat de filière signé entre le comité stratégique de filière « mines et métallurgie » et l'État le 18 janvier 2019 soutient le projet structurant « recycler le véhicule hors d'usage (VHU) de demain ». De plus, l'État et les collectivités locales soutiennent plusieurs projets innovants, en cours ou en phase de montage, comme l'optimisation du procédé d'électrolyse de l'aluminium pour réduire la consommation d'énergie et les émissions CO2, le développement de portières en aluminium dans des voitures de grandes séries, ou la massification du recyclage de l'aluminium issu du BTP pour une réutilisation dans le marché du BTP. Enfin, dans le contexte difficile de la crise sanitaire actuelle, le Gouvernement a déployé, sur tout le territoire, un plan de relance inédit de 100 Md€, pour soutenir massivement la reprise de l'économie en France. Les moyens déployés doivent contribuer à relever l'ambition industrielle et environnementale de la filière aluminium en France, qui pourra par exemple présenter ses projets en réponse à l'appel à projet « soutien à l'investissement dans les secteurs stratégiques pour la résilience de notre économie » ou encore aux différents appels à manifestation d'intérêt et appels à projets engagés par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) en faveur de la décarbonation de nos industries.

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