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Justine Benin
Question N° 22747 au Ministère des outre-mer


Question soumise le 10 septembre 2019

Mme Justine Benin alerte Mme la ministre des outre-mer sur les inégalités que subissent les producteurs rhumiers de la Guadeloupe au profit des producteurs de rhum d'autres départements d'outre-mer. Ces inégalités concernent en premier lieu le programme POSEI (programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité), qui consiste en un accompagnement financier au bénéfice des productions agroalimentaires locales des régions ultrapériphériques. A ce jour, les producteurs rhumiers de la Guadeloupe se trouvent fortement lésés par rapport aux producteurs d'autres départements, comme ceux de la Martinique, alors qu'ils se situent pourtant à un niveau de production équivalent. La répartition du programme POSEI pour la transformation de la canne en rhum agricole est fixée par l'arrêté du 2 décembre 2009, modifié par un autre arrêté pris le 23 avril 2015. Si ce dernier a partiellement réduit les écarts entre les producteurs de la Martinique de la Guadeloupe, force est de constater que des écarts importants subsistent entre les producteurs guadeloupéens et martiniquais à production égale. Par ailleurs, une autre iniquité réside dans la répartition inégale des contingents d'exportation de rhum traditionnel. Depuis 1923, les rhums produits en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à la Réunion font l'objet d'un droit d'accise fiscale spécifique qui vise à garantir la compétitivité des productions face à la concurrence internationale. Ce taux réduit est applicable à un contingent de 144 000 hectolitres d'alcool pur (HAP), réparti ensuite par voie d'arrêté par le Gouvernement entre ces quatre départements et, en leur sein, entre toutes les distilleries. Pourtant, à ce jour, la répartition du contingent ne reflète pas la réalité des productions et pénalise fortement les rhumiers de la Guadeloupe. En effet, aujourd'hui, la répartition du contingent sur la base de 144 000 HAP s'élève à 17 007,36 HAP pour le rhum agricole de la Guadeloupe, contre 52 789,10 HAP pour le rhum agricole de la Martinique, soit un rapport de 1 à 3,10 en faveur de la Martinique. Pourtant, au regard des productions de rhum agricole de l'année 2018, la Guadeloupe a produit 47 325 HAP de rhum agricole contre 90 063 HAP pour la Martinique, soit un rapport de 1 à 1,90 en faveur de la Martinique. Le différentiel de production entre la Guadeloupe et la Martinique n'a d'ailleurs cessé de se réduire sur les cinq dernières années, alors que l'attribution des contingents n'a, quant à elle, que très peu évolué. Il est donc difficilement compréhensible qu'à production égale, les distilleries de rhum agricole de la Guadeloupe bénéficient concrètement de deux fois moins de débouchés à l'export que ceux de la Martinique. Les filières sucre-canne-rhum sont essentielles pour le développement économique de la Guadeloupe. Elles appartiennent au patrimoine culturel et historique de notre archipel, elles sont également pourvoyeuses de nombreux emplois dans l'agriculture, dans l'industrie et dans l'innovation. Connaissant l'engagement du Gouvernement pour accompagner les agriculteurs et les producteurs dans tous les territoires, elle souhaite ainsi savoir quelles actions elle entend mettre en place afin de mieux équilibrer, au bénéfice de la Guadeloupe, la réglementation applicable à la production et à l'exportation du rhum agricole, notamment dans le cadre du programme POSEI ainsi que dans le système contingentaire.

Réponse émise le 4 mai 2021

La culture de canne à sucre est insérée au sein d'une filière dont les débouchés sont le sucre, le rhum et la bagasse. La France et l'Union européenne sont fortement mobilisées pour accompagner le maintien et le développement de la filière de canne-sucre-rhum à travers la mise en place de plusieurs dispositifs d'aides dédiés pour un montant total de près de 300 millions d'euros par an. La France a défendu et obtenu le maintien du dispositif programme d'option spécifique à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) et de son enveloppe à son niveau actuel dans le cadre des négociations sur la future politique agricole commune (PAC). Dans ce cadre, les producteurs de rhum agricole des départements d'outre-mer bénéficient plus particulièrement d'une aide à la transformation de canne à sucre en rhum agricole d'un montant annuel de 5,7 millions d'euros. Pour la campagne 2019, les montants versés au titre de l'aide à la transformation de rhum agricole ont atteint 3,8 millions d'euros pour la Martinique, 1,7 millions d'euros pour la Guadeloupe, et 0,14 millions d'euros par an pour la Guyane. La Guadeloupe a ainsi bénéficié de 30 % de l'enveloppe. Conformément à l'arrêté du 2 décembre 2009, révisé le 27 novembre 2018 à la demande des professionnels guadeloupéens, la répartition de l'aide entre les départements d'outre-mer est révisée tous les trois ans. Cette révision s'effectue au prorata des quantités de rhum agricole réellement produites dans chaque département. Un autre mécanisme d'aide prend la forme d'un avantage fiscal de 50 % sur l'accise perçue sur les rhums vendus dans l'hexagone avec une quantité économique globale répartie en contingents départementaux entre les 4 départements producteurs (Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion). Cette ventilation a été plusieurs fois revue pour suivre l'augmentation du contingent global qui est passé de 90 000 hectolitres d'alcool pur (hap) en 2002 à 144 000 hectolitres d'alcool pur aujourd'hui. La dernière modification du 13 juin 2018 a été favorable aux producteurs guadeloupéens. Ainsi, la Guadeloupe a bénéficié d'une augmentation de 22,37 %, dont 50,71 % d'augmentation pour le rhum agricole et 12 % pour le rhum de sucrerie. Suite à l'action du Gouvernement, le Conseil de l'Union européenne a publié le 1er décembre 2020 une décision autorisant la France à augmenter le volume maximum de rhum pouvant bénéficier de l'aide à 153 000 hap, contre 144 000 hap actuellement. Cette augmentation doit encore être validée par la direction générale de la concurrence au titre des aides d'Etat. La procédure est en cours dans la perspective de pouvoir inscrire ce nouveau contingent dans la loi de finances pour 2022. Parallèlement, les administrations ont initié, en lien avec le conseil interprofessionnel des rhums traditionnels, un travail pour revoir le décret en Conseil d'Etat qui fixe les bases de la ventilation du contingent afin que celle-ci ne se fasse plus, comme aujourd'hui, sur la base de la situation du marché entre 1991 et 1994 mais sur la base des quantités réellement expédiées. Cette révision sera applicable dès 2021 et permettra de revoir la répartition en contingents départementaux et par distillerie, dès la campagne 2022. Ces deux évolutions, augmentation du contingent global et révision des bases réglementaires de la répartition, permettront à tous les producteurs ultramarins d'être en mesure de satisfaire l'évolution du marché.

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