Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Adrien Quatennens
Question N° 22754 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 10 septembre 2019

M. Adrien Quatennens appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les mesures à prendre face à l'escalade des violences policières lors des mobilisations sociales et environnementales. En effet, depuis l'acte I de la mobilisation des gilets jaunes en novembre 2018, ce sont officiellement 2 448 manifestants et 1 717 membres des forces de l'ordre qui ont été blessés. Les blessés sont aussi nombreux parmi les militants de la cause environnementale, mobilisés de manière récurrente contre l'inaction du Gouvernement en matière climatique. Cette escalade de la violence de la répression est inacceptable et dangereuse. M. le député souhaite particulièrement attirer l'attention sur l'usage des LBD, responsables de blessures irréparables. Ces armes sont responsables de nombreuses mutilations et éborgnements. C'est la raison pour laquelle l'ONU a mis en garde le Gouvernement contre un usage abusif des LBD. S'il dit « assumer » et « légitimer » cette utilisation, le ministre de l'intérieur participe à véhiculer une image déplorable de la France et de la police républicaine. La commande de 1 280 nouveaux LBD pour les 4 années à venir est à ce titre particulièrement inquiétante, alors que se préparent de nombreuses nouvelles mobilisations citoyennes, sociales et environnementales contre la politique du Gouvernement. L'usage des LBD doit immédiatement être exclu de la stratégie de maintien de l'ordre. En revanche, l'attention du ministre de l'intérieur doit se porter sur l'amélioration des conditions de travail des forces de police. Le paiement des heures supplémentaires non-rémunérées doit ainsi être enfin effectif. Il l'appelle donc, d'une part à cesser l'investissement dans l'armement type LBD et à mettre en place des consignes de maintien de l'ordre dans un esprit de désescalade de la violence, et d'autre part à participer à l'amélioration des conditions morales et matérielles des agents de police.

Réponse émise le 19 novembre 2019

Pendant plusieurs mois, dans le cadre des actions des « gilets jaunes », les policiers et les gendarmes ont été soumis à un rythme d'emploi exceptionnel pour assurer le respect de la loi républicaine, garantir le droit de manifester, la sécurité des biens et des personnes et la protection des lieux emblématiques de la République. Ils ont, une nouvelle fois, témoigné de leur engagement sans faille, de leur professionnalisme et de leur sang-froid, dans des situations particulièrement complexes, liées à l'absence d'organisation du mouvement et à ses manifestations rarement déclarées, et fréquemment dangereuses. La radicalisation de certains et la présence d'individus ultraviolents animés par le seul désir de semer le chaos et d'attaquer les forces de l'ordre a en effet abouti à une escalade des violences. Les forces de police et de gendarmerie ont régulièrement dû faire face à de véritables émeutiers et à des individus qui avaient pour principal objectif de s'en prendre à leur intégrité physique. L'action des forces de l'ordre a été menée dans un cadre légal fixé notamment par le législateur, celui du code de procédure pénale et du code de la sécurité intérieure, et dans le respect des doctrines d'emploi des moyens techniques dont elles sont dotées, notamment des armes de force intermédiaire. Les forces de l'ordre peuvent être amenées à recourir - parmi d'autres moyens - à des lanceurs de balles de défense, dont l'emploi relève du cadre juridique général de l'usage de la force et n'est donc possible que lorsque les conditions requises par la loi l'autorisent (légitime défense, etc.). Il est soumis, en particulier, aux principes d'absolue nécessité et de proportionnalité. Si leur emploi est indispensable pour lutter contre certaines violences auxquelles les forces de l'ordre sont confrontées, il n'est cependant décidé que lorsqu'aucun moyen moins vulnérant ne peut être engagé pour mettre fin aux exactions. L'usage d'une arme présente toutefois toujours des risques et le danger des lanceurs de balles de défense n'est pas sous-estimé. La France étant un Etat de droit et les forces de l'ordre comptant parmi les institutions les plus contrôlées, il va de soi que, dans les cas où l'usage légitime de ces armes est mis en doute, des enquêtes judiciaires ou disciplinaires sont systématiquement effectuées. Tout manquement ou faute commis dans les rangs de la police ou de la gendarmerie est poursuivi. Dans le cadre du mouvement dit des « gilets jaunes », l'inspection générale de la police nationale et l'autorité judiciaire instruisent d'ailleurs plusieurs dizaines de plaintes liées à des usages de lanceur de balles de défense. Face à la radicalisation croissante des mouvements de contestation que l'on observe depuis plusieurs années, et de nouveau constatée dans le cadre du mouvement dit des « gilets jaunes », la doctrine française de maintien de l'ordre a commencé à évoluer dès après les violences de décembre 2018, pour se traduire par des dispositifs davantage mobiles et réactifs. Cette doctrine va par ailleurs être précisée dans le cadre de l'élaboration d'un nouveau schéma national de maintien de l'ordre, qui s'est faite en association avec divers spécialistes extérieurs (magistrats, experts, journalistes, etc.). Si le maintien de l'ordre est une priorité, s'agissant d'une mission régalienne de l'Etat et d'une très forte attente de nos concitoyens, la question des conditions de travail des policiers et de la reconnaissance de leur engagement est tout aussi fondamentale. Des efforts budgétaires significatifs sont ainsi engagés. Au total, 552 M€ supplémentaires ont été consacrés aux personnels des forces de sécurité depuis le budget 2018. Concernant les moyens de fonctionnement, le niveau exceptionnel de crédits alloués depuis 2015, et encore augmenté en 2018 et 2019, est consolidé et pérennisé. Le Gouvernement œuvre tant sur le plan matériel et humain (recrutements, politique immobilière, renouvellement du parc automobile, etc.) que sur le plan organisationnel avec le déploiement de la police de sécurité du quotidien ou les mesures engagées pour réduire les tâches indues et les charges procédurales afin de permettre aux policiers, qui attendent aussi beaucoup sur ce plan, de se concentrer sur les missions qui sont au cœur de leur vocation et de leur fierté. Sur le plan social, le ministre de l'intérieur a conclu en décembre 2018 un protocole avec les organisations syndicales représentatives du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, qui se traduit par des mesures indemnitaires très significatives. Ces mesures accompagnent des actions de transformation structurelles pour lesquelles le protocole précité prévoyait l'ouverture de négociations avec les organisations syndicales représentatives de la police nationale. C'est ainsi qu'est désormais engagé un règlement de la question - ancienne et complexe - du stock d'heures supplémentaires, source de mécontentement ou d'incompréhension pour les policiers. L'indemnisation d'une partie du stock d'heures supplémentaires devrait ainsi intervenir dès la fin de gestion 2019. Par ailleurs, une importante réforme de l'organisation du temps de travail a été menée dans le cadre d'une négociation avec les organisations syndicales. Ce travail a abouti à la publication de l'arrêté du 5 septembre 2019 portant sur l'organisation relative au temps de travail dans les services de la police nationale. Ce nouveau cadre juridique, qui entre en vigueur le 1er janvier 2020, pose le principe d'une indemnisation d'une partie des services supplémentaires. Il permet également de limiter, à l'avenir, la production d'heures supplémentaires afin de prévenir toute reconstitution de stock. De même, la police nationale a lancé en septembre une expérimentation de nouveaux cycles de travail susceptibles d'améliorer le bien-être des agents en offrant notamment aux effectifs de voie publique un plus grand nombre de week-end de repos, avec pour objectif d'améliorer la conciliation vie privée - vie professionnelle tout en maintenant le potentiel opérationnel des services et en respectant les dispositions relatives à la préservation de la santé des agents. La question des ressources humaines et matérielles constitue par ailleurs un des thèmes du Livre blanc de la sécurité intérieure. Actuellement élaboré dans le cadre d'une vaste consultation qui associera les personnels, et programmé pour début 2020, il aura notamment pour objectif d'établir, sur le plan des ressources humaines et des moyens matériels, une stratégie adaptée aux enjeux de sécurité comme aux nouvelles aspirations des personnels qui s'engagent aujourd'hui dans les forces de l'ordre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.