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Michel Larive
Question N° 23162 au Ministère de la culture


Question soumise le 1er octobre 2019

M. Michel Larive attire l'attention de M. le ministre de la culture sur la situation des scénaristes dans le milieu de l'audiovisuel. La création audiovisuelle a ceci de particulier qu'elle fait appel à des compétences diverses qui le plus souvent ne sont pas assumées par la même personne, mais par une équipe. Dans ce contexte, scénariste, réalisateur et producteur sont tous co-auteurs de l'œuvre. Mais la loi considère que l'œuvre finie est le film en lui-même, et il est la propriété du producteur. Concrètement, scénaristes et réalisateurs reçoivent une rémunération ponctuelle pour leur contribution, comme s'ils étaient de simples prestataires de service, mais ne sont que très rarement rémunérés pour la réutilisation ou la rediffusion des œuvres auxquelles ils ont participé. Il semblerait pourtant raisonnable de reconnaître à ces professionnels un statut de co-auteurs de l'œuvre, et de leur garantir une rémunération proportionnelle aux revenus générés par l'exploitation de l'œuvre audiovisuelle finale, fixée par un contrat d'exploitation comme pour les producteurs. Le paiement de cette rémunération devrait être à la charge des utilisateurs de l'œuvre, c'est-à-dire aux chaînes de télévisions et plateformes numériques, qui s'en acquitteraient régulièrement auprès d'une organisation mandatée par les auteurs pour percevoir et répartir ces droits. Il lui demande ce qu'il pense de ces propositions et s’il serait prêt à créer un groupe de travail sur ces questions.

Réponse émise le 18 mai 2021

Les uvres audiovisuelles sont singulières, qu il s agisse de la paternité de l uvre, de la titularité des droits qui y sont attachés ou encore de la rémunération qui découle de l exploitation de ces droits. La loi (art. L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle - CPI) précise que la qualité d auteur d une uvre audiovisuelle est détenue par la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de cette uvre. Sont ainsi présumés, sauf preuve contraire, co-auteurs d une uvre audiovisuelle les auteurs du scénario, de l adaptation, des dialogues, des compositions musicales réalisées pour l uvre et le réalisateur lui même. Si l article L. 121-5 du CPI précise que l uvre audiovisuelle est réputée achevée lorsque la version définitive a été établie d un commun accord entre le réalisateur et le producteur, ce dernier ne se voit pas pour autant reconnaître la qualité de co-auteur de l uvre. L article L. 132-24 du CPI prévoit que le contrat passé avec chacun des co-auteurs emporte « cession au profit du producteur des droits exclusifs d exploitation de l uvre audiovisuelle ». Cette présomption de cession des droits des auteurs aux producteurs, visant à faciliter l exploitation des uvres audiovisuelles, n est pas absolue dans la mesure où les auteurs peuvent, par le biais de clauses contraires, se réserver l exercice de certains droits. Par ailleurs, cette présomption ne s applique pas aux auteurs des compositions musicales. La présomption de cession s accompagne de deux obligations principales à la charge des producteurs : une obligation d exploiter l uvre audiovisuelle et une obligation de rémunérer les auteurs. L article L. 132-27 du CPI fait obligation au producteur « de rechercher une exploitation suivie de l uvre audiovisuelle, conforme aux usages de la profession » et précise que « le champ et les conditions de mise en uvre » doivent être définis par voie d accord professionnel. L accord du 3 octobre 2016, pris en application de cette disposition, contribue à améliorer la relation entre les auteurs et les producteurs, en permettant aux premiers d obtenir des explications sur les efforts accomplis par les producteurs tout au long de la vie des uvres audiovisuelles. L accord a été rendu obligatoire par un arrêté de la ministre de la culture du 7 octobre 2016 à l ensemble des professionnels des secteurs concernés. Les producteurs sont, par ailleurs, soumis à une obligation de verser une rémunération aux auteurs, laquelle est, aux termes de l article L. 132-25 du CPI, due pour chaque mode d'exploitation. Cette rémunération est proportionnelle au prix payé par le public pour recevoir communication d'une uvre audiovisuelle déterminée et individualisable. Les accords professionnels ont une portée importante dans ce domaine. L article L. 132-25-1 du CPI prévoit ainsi que des accords relatifs à la rémunération des auteurs conclus entre les organismes professionnels d auteurs ou les organismes de gestion collective, les organisations professionnelles représentatives des producteurs et, le cas échéant, les organisations représentatives d autres secteurs d activité peuvent être étendus à l ensemble des intéressés par arrêté du ministre chargé de la culture. Afin d assurer la transparence de la rémunération due, l article L. 132-28 du CPI précise que les producteurs doivent fournir aux auteurs, au moins une fois par an, un état des recettes provenant de l exploitation des uvres selon chaque mode d exploitation et leur impose d apporter sur demande « toute justification propre à établir l exactitude des comptes », notamment la « copie des contrats par lesquels il cède à des tiers tout ou partie des droits dont il dispose ». Le ministère de la culture a soutenu toutes les initiatives visant à améliorer la transparence des relations entre l ensemble de ces acteurs. C est ainsi que des discussions conduites par les services du ministère ont pu aboutir à la signature, le 6 juillet 2017, d un accord relatif à la transparence des relations auteurs producteurs et à la rémunération des auteurs. Cet accord, complété par un avenant en 2019 et étendu par arrêté dans sa nouvelle version le 29 octobre 2019, clarifie et encadre la répartition de l ensemble des revenus générés par une uvre et distingue les périmètres de la gestion collective et de la gestion individuelle. Le programme de travail 2021-2022 en faveur des auteurs, présenté au début du mois de mars dernier, prévoit notamment d accompagner les négociations professionnelles sui generis sur l équilibre de la relation contractuelle avec le producteur, notamment dans les secteurs de l audiovisuel et du cinéma. Dans ce cadre, la transposition par ordonnance de la directive 2019/790 du 17 avril 2019 sur le droit d auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, qui permettra de mieux encadrer les négociations professionnelles prévues à l article L. 132-25-1 du code de la propriété intellectuelle, délimitera d une part le champ de la négociation collective des futurs accords et, d autre part, prévoira un relai du pouvoir réglementaire en cas d échec des négociations.

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