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Danièle Cazarian
Question N° 23389 au Premier ministre


Question soumise le 8 octobre 2019

Mme Danièle Cazarian attire l'attention de Mme la ministre des armées sur le renforcement de l'information à la charge du Gouvernement en matière d'exportations d'armes. La France est le troisième exportateur mondial d'armes et d'équipements défensifs. On sait que l'Arabie saoudite, qui dirige la coalition contre les rebelles houthistes au Yémen, est l'un des plus gros clients de l'industrie d'armements française. Selon les rapports de plusieurs ONG et de certains médias, les armes françaises vendues à l'Arabie saoudite seraient utilisées contre les populations civiles au Yémen. Le Gouvernement est tenu de présenter, chaque année à la même période, un rapport aux parlementaires sur ses exportations d'armements. Toutes les opérations sont détaillées dans ce rapport. Paradoxalement, la population française n'est que très peu informée sur le sujet, ce qui contribue souvent à la propagation de rumeurs infondées. C'est donc, légitimement, que les Français s'inquiètent, d'une part du sort des populations civiles yémenites, d'autre part de l'utilisation faite des armes « made in France ». Aussi, elle souhaiterait savoir s'il serait envisageable d'améliorer l'information publique sur les ventes d'armes de la France afin d'éviter la propagation de fausses informations créant un climat d'inquiétude et de méfiance de la population française quant à la politique d'exportation de matériels militaires.

Réponse émise le 26 mai 2020

Les exportations de matériels de guerre répondent au besoin légitime de certains États de renforcer leur sécurité et d'affirmer leur souveraineté dans un contexte international menaçant. Elles constituent un élément central de la politique de sécurité et de défense de la nation et permettent à la France de consolider les relations qu'elle a tissées avec ses partenaires traditionnels et de nouer de nouveaux partenariats conformes à ses intérêts stratégiques. Les exportations d'armement sont l'un des volets de ces partenariats, au même titre que la coopération de défense ou les échanges de renseignement. La France prohibe le commerce des armes a priori. Elle applique un régime d'autorisation par exception. L'octroi de ces autorisations relève du Premier ministre. Les décisions sont prises après consultation des ministères des armées, de l'Europe et des affaires étrangères, de l'économie et des finances qui sont, avec le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, les membres à voix délibérative de la commission d'instruction. L'organisation actuelle est fondée sur le strict respect de plusieurs étapes. La première de ces étapes est un processus d'examen rigoureux des demandes de licences. En amont, une analyse de la recevabilité de la licence sert de filtre initial afin d'écarter les exportateurs non référencés, par exemple ceux qui ne bénéficieraient pas d'une autorisation de fabrication, de commerce et d'intermédiation, ainsi que les matériels n'entrant pas dans le cadre de la politique générale d'exportation, ou encore les demandes de licence trop imprécises. La deuxième étape est l'examen des demandes jugées recevables par un organisme de concertation interministérielle qui permet d'examiner chaque demande au cas par cas au regard des contraintes liées au respect de nos engagements internationaux, à notre souveraineté, à la protection de nos forces et à celle de nos alliés et aux enjeux industriels et économiques. En premier lieu, la commission d'instruction prend en compte le respect des règles du droit international dont les grands principes sont la discrimination entre les populations civiles et les combattants ; la discrimination entre les objectifs civils et les objectifs militaires ; l'interdiction de dommages collatéraux disproportionnés par rapport à l'avantage militaire attendu ; le principe d'humanité selon lequel il faut chercher à limiter les dommages collatéraux d'une attaque. Ce critère préalable constitue un verrou. Puis, une fois établie la conformité aux engagements internationaux, la commission d'instruction veille au respect des embargos et des mesures restrictives décidées par les États de l'Union européenne. Enfin, la commission veille à ce que les conditions ayant permis la délivrance de l'autorisation ne changent pas substantiellement jusqu'au moment de la livraison des matériels. Sans quoi, l'autorisation d'exportation peut être annulée ou suspendue. Pour l'ensemble du processus d'instruction, les travaux s'appuient sur des sources publiques et des sources propres. Au travers du rapport annuel remis au Parlement, la France consent un important effort d'information. L'organisation générale du rapport expose successivement la raison d'être de notre politique d'exportation ; les modalités de contrôle ; les résultats observés. Il détaille de surcroît le processus du contrôle des exportations et les acteurs qui y prennent part, ainsi que les principes appliqués. Il ne peut évidemment pas trahir le secret de l'instruction mais il donne des exemples concrets, comme sur la question des armes légères et de petit calibre et de la convention d'Oslo, dans les limites du secret de la défense nationale. Il est parfois fait grief au rapport de présenter les exportations par catégories de matériels (military lists). Cette présentation est celle voulue par l'Union européenne et appliquée par l'ensemble des États membres. Enfin, le rapport français apporte des éléments que d'autres rapports européens ne communiquent pas comme les montants autorisés ; les prises de commandes ; les livraisons ; une synthèse sur les 20 principaux clients. Au bilan, le dispositif national français est conçu et utilisé dans une recherche permanente du meilleur équilibre entre le soutien à nos alliés, le respect des engagements internationaux de la France et la robustesse du dispositif administratif interministériel garantissant la prise en compte de l'ensemble des facteurs conjoncturels.

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