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François Ruffin
Question N° 23433 au Ministère de l'économie


Question soumise le 8 octobre 2019

M. François Ruffin alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la mise en bourse de Verallia. Dans l'entre-deux tours des élections présidentielles, en mai 2017, Emmanuel Macron se rendait dans la verrerie d'Albi, la verrerie de Jean Jaurès. « Ce que je voudrais illustrer en venant ici, c'est que le modèle dans lequel je crois est un modèle social très vivace, un modèle qui va jusqu'à la cogestion. C'est ce que je souhaite développer ». Deux années plus tôt, en 2015, le même Emmanuel Macron, alors ministre, s'était engagé : « Nous veillerons à la préservation de l'entité, au maintien de l'investissement et aux garanties sur le caractère productif de l'investissement décidé. L'État s'en porte garant ». Aujourd'hui président, une mise en bourse de Verallia se prépare. Qui pourrait bien détruire ce « modèle social très vivace ». Et l'État ne se porte plus « garant », plutôt aux abonnés absents. Malgré un projet alternatif, socialement, écologiquement « responsable », porté par les salariés... Le groupe Verallia fabrique des bouteilles partout en France, à Albi, à Pont-Sainte-Maxence, à Lagnieu, à Château-Bernard, dix usines qui maillent le territoire, au plus près des productions viticoles, une verrerie pour le champagne, une pour le bordelais, une pour le cognac, une pour le Saumur. Avec un gain environnemental : le lieu de production des bouteilles est rapproché du site d'embouteillage des vins. Or le directeur du site l'a déjà annoncé : « Si vous n'êtes pas contents, nous irons en Espagne ». Une délocalisation qui, fatalement, entraînerait des centaines de camions dans les Pyrénées, remplis de bouteilles vides. Et pourquoi les 2 500 salariés français ne seraient pas contents ? Parce que le groupe Verallia, anciennement entreprise publique Saint-Gobain, est aujourd'hui détenu à 90 % par le fonds d'investissement Apollo, et 10 % par la Banque publique d'investissement. Apollo a décidé de revendre son capital, avec au passage une plus-value évaluée à 2,4 milliards d'euros en cinq ans. Les salariés, informés du projet de leur actionnaire principal, sont d'accord pour une mise en bourse, mais à une condition : que ce soit « une mise en bourse responsable ». Une mise en bourse qui garantisse la présence des salariés au sein du conseil d'administration. Une mise en bourse qui mette l'accent sur le volet environnemental de l'activité. Les salariés comptaient sur un allié : l'autre actionnaire, la BPI. Qu'il soit le partenaire du contre-projet. Mais, ont-ils appris, le pacte d'actionnaires qui lie BPI et Apollo prévoit un retrait proportionnel des deux entités. Le fonds compte vendre d'abord 40 % de ses parts, la banque publique le fera également. Avec 6 %, la BPI passerait ainsi en dessous de 10 % du capital, le seuil qui empêche toute OPA. Lors de son audition par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, M. Nicolas Dufourcq, directeur général de la BPI, a assuré : « Nous n'avons pas l'idée de vendre les 10 % de BPI France de Verallia. La présence de BPI au CA de Verallia vise à empêcher toute tentative de délocalisation ». Qui croire ? Il lui lance une alerte : après Alstom, après Whirlpool, après Ascoval, après une longue liste, il l'invite à ne pas être responsable d'un nouveau désastre industriel, d'un fleuron sacrifié sur l'autel de la finance. Avec la BPI, il lui demande d'étudier cette « mise en bourse responsable ». Que les grandes déclarations sur la « responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise », multipliées lors de la « loi Pacte », ne soient pas que de vaines promesses. Que comme le ministre Macron l'annonçait, « l'État s'en porte garant ». Pas seulement pour les salariés, là, pas seulement pour la filière viticole, pas seulement pour les territoires, mais au vu de l'enjeu environnemental, également pour le climat. Il souhaiterait donc connaître ses intentions sur ces différentes questions.

Réponse émise le 3 mars 2020

Verallia est un leader de l'emballage en verre, au troisième rang mondial. Le groupe fabrique 16 milliards de bouteilles et pots par an pour un chiffre d'affaires de 2,4 Mds€ en 2018. Il exploite 32 sites (dont 6 en France) de fabrication de verre dans 11 pays. La société emploie 10 000 personnes dont près de 2 300 en France, et opère sur plusieurs segments du verre dit « creux » : le vin, les pots alimentaires, les spiritueux et la bière, etc. Ancienne filiale de Saint Gobain, Verallia est détenue depuis 2015 par une holding associant pour 90 % le fonds Apollo et pour 10 % Bpifrance. Les salariés et les managers de l'entreprise sont par ailleurs associés au capital de celle-ci. Le Groupe investit chaque année, hors projet exceptionnel, environ 8 % de son chiffre d'affaires. Sur les 4 dernières années, environ 1 md€ d'investissements qui ont été réalisés dans le Groupe dont 220 M€ France. Depuis 2014, La société a maintenu son chiffre d'affaires à environ 2,4 Mds€ tout en améliorant sensiblement son EBITDA (en français : bénéfice avant intérêt, impôts, dépréciation et amortissement -BAIIDA) qui est passé de 400 M€ en 2014 à 544 M€ en 2018. Sur le périmètre verrier de Verallia, en France, l'effectif a légèrement augmenté, passant de 2 268 CDI en 2016 à 2 292 CDI en 2018. Verallia est ainsi une belle valeur industrielle en croissance régulière, avec de bonnes perspectives de marché pour ses produits qui sont une alternative aux emballages en plastique. L'entrée d'Apollo au capital de Verallia s'accompagnait, comme toujours pour un fonds d'investissement, d'une stratégie de monétisation à terme. L'introduction en bourse de la société qui s'est réalisée en octobre 2019 était l'option de liquidité qui avait la préférence de la société et des salariés. D'autres options auraient pu être envisagées comme la cession à un concurrent ou à un autre fonds d'investissement. Toutefois, l'introduction réussie en bourse et la performance économique de Verallia, doivent donner à l'entreprise les moyens de se développer dans la durée. Par ailleurs, cette introduction en bourse a attiré 30 % d'investisseurs français. Parmi eux, Bpifrance, les salariés et les managers détiennent ensemble près de 15 % du capital ce qui limite le risque d'offre publique d'achat (OPA) évoqué. Lors de l'introduction en bourse Bpifrance a ré-investi et détient toujours une part du capital lui permettant d'être un actionnaire actif et présent au conseil d'administration de l'entreprise. Celui-ci accueillera par ailleurs deux administrateurs représentant les salariés. L'introduction de Verallia en bourse apparait aujourd'hui une étape positive du développement de l'entreprise, favorable pour l'avenir de l'entreprise et de ses salariés. La présence de Bpifrance au capital et au conseil d'administration témoigne de l'attention que porte l'État à l'entreprise.

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