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Marie-France Lorho
Question N° 23543 au Ministère de la justice


Question soumise le 8 octobre 2019

Mme Marie-France Lorho appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la pratique de plus en plus répandue et fréquente du lynchage médiatique. Notre démocratie repose sur plusieurs piliers parmi lesquels on compte la liberté de la presse et la séparation des pouvoirs. Mais lorsque l'un met en danger l'autre et provoque une atteinte qui n'est ni justifiée par la tâche à accomplir ni proportionnée à l'objectif recherché, on ne peut rester les bras croisés. Au cours des dernières années, la presse dans sa globalité a pris la fâcheuse habitude de sortir du cadre de sa mission en s'imposant en arbitre des élégances. Ainsi, le recours au lynchage médiatique est-il de plus en plus fréquent et de plus en plus problématique. La raison du lynchage médiatique réside dans le sentiment qu'à la presse d'œuvrer pour la salubrité publique lorsqu'elle jette l'anathème sur telle ou telle personnalité, alors que son rôle se limite à l'information objective. Elle est ainsi persuadée d'agir en bonne démocrate et honnête citoyenne. Mais la presse n'est ni un pouvoir au sens de Montesquieu, ni une autorité : c'est un canal d'information, une fenêtre ouverte sur le monde, dont le rôle doit être de diffuser une information dont la qualité s'apprécie à l'aune de son objectivité. Pourtant les mises en cause se multiplient et c'est sans complexe que les médias s'arrogent le droit de se substituer au système judiciaire en se permettant de qualifier des infractions alors même qu'aucune instance judiciaire n'est en cours, portant ainsi une grave atteinte à la présomption d'innocence. De telles pratiques sont un danger pour la démocratie. Il n'est pas acceptable que la presse diffuse les informations à sa convenance, en l'orientant d'une façon ou d'une autre, en laissant sous-entendre des contre-vérités ou en posant des affirmations qu'il ne lui appartient pas de poser. Nombreuses sont les personnalités publiques qui ont pu pâtir de cette pratique consistant à mettre au pilori, de manière arbitraire ou par calcul idéologique, telle ou telle personne. Que ce soit François Fillon, présumé coupable avant même tout procédure judiciaire, François de Rugy, poussé à la démission avant toute véritable enquête, ou encore dernièrement Eric Zemmour, victime d'un déferlement de haine et de censure de la part de la presse de tout bord, il n'est pas acceptable que la presse se transforme en organe policier, en organe de censure ou encore en organe juridictionnel, en posant des jugements moraux sur les évènements. Aussi il est demandé à Madame le Garde des sceaux ce que compte faire le Gouvernement pour remédier à cette pratique.

Réponse émise le 24 décembre 2019

La France est très attachée à la défense de la liberté d'expression. La liberté d'expression et d'information, qui constitue l'un des fondements essentiels d'une société démocratique, est un droit fondamental reconnu par la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 et fait l'objet d'une attention constante du législateur et des juridictions. La liberté d'expression a comme support nécessaire la liberté de la presse, garantie par la loi du 29 juillet 1881 qui a introduit des garanties pénales spéciales très protectrices de la presse. Néanmoins, la liberté d'expression n'est pas absolue et des limitations sont nécessaires afin d'assurer le respect de l'ordre public, que ce soit dans la presse écrite ou sur internet qui, comme tout média, peut être également véhicule de propagande haineuse. Le droit de la presse prévoit donc des infractions pénales telles que la diffamation envers un particulier, la diffamation envers un fonctionnaire public ou un dépositaire de l'autorité publique, ou encore la diffamation envers un membre du Gouvernement ou du Parlement, pour encadrer cette liberté et prévenir tout abus qui résulterait de son exercice. Ces procédures sont ouvertes sur une plainte préalable de la victime.Il est ainsi institué un équilibre entre la liberté d'expression d'une part et la protection des personnes d'autre part, et notamment la présomption d'innocence.

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