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Anne Blanc
Question N° 23994 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 29 octobre 2019

Mme Anne Blanc alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le bien-fondé et les conséquences de la mise en cause par les autorités sanitaires des fromages au lait cru. L'ensemble des producteurs et des organisations professionnelles concernés ont fait légitimement part de leur colère et de leur inquiétude suite à la publication par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation d'un « rappel des précautions à prendre » concernant la consommation de fromages au lait cru. Faisant suite à des cas récents de rappels de certains lots de fromages, le contenu précis de cette communication des autorités sanitaires, largement repris par les services préfectoraux à destination des municipalités et restaurants scolaires, apparaît fortement disproportionné et anxiogène, mettant en cause l'ensemble des productions au lait cru, et plus particulièrement les appellations d'origine fromagères mentionnées. Bien qu'il puisse exister un risque significatif dans la tranche 0-5 ans par rapport à la population générale adulte, certaines collectivités ont déjà exclu les fromages au lait cru des repas servis aux bénéficiaires de leur service de restauration, quel que soit leur âge : les écoles, collèges et lycées ont ou sont ainsi tentés d'arrêter leur approvisionnement en lait cru pour se couvrir de tout risque. Les répercussions économiques pour les producteurs souvent fermiers, qui s'attachent au quotidien à défendre la qualité, le savoir-faire et les bienfaits nutritionnels et de santé de la consommation de ces fromages locaux reconnus, sont énormes. Une telle mise en cause par les pouvoirs publics a par ailleurs un impact désastreux sur l'image du lait cru dans l'esprit des consommateurs. Aussi, très attachée au développement des produits agricoles sous signe de qualité, qui permettent de répondre aux attentes du consommateur tout en maintenant un tissu économique rural dynamique, elle lui demande de bien vouloir revenir sur le contenu de ces recommandations, notamment hors enfants de 0-5 ans, et lui indiquer quels moyens il compte mettre en œuvre afin que celles-ci n'entravent pas à l'avenir l'activité économique de la filière.

Réponse émise le 3 décembre 2019

Les fromages, qui sont pour les trois quarts fabriqués à base de lait cru, font partie des produits agricoles sous signe de qualité, auxquels le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est profondément attaché ; leurs qualités permettent de répondre aux attentes des consommateurs tout en maintenant un tissu économique rural dynamique. Aliments typiques, ou élaborés dans le respect de l'environnement et du bien-être animal, ils font partie du patrimoine alimentaire français. Les fromages au lait cru renferment une flore vivante variée (bactéries lactiques) qui peut être favorable en termes de santé, comme l'a récemment rappelé l'institut national de la recherche agronomique. Cependant ils peuvent également comporter des agents pathogènes ; cette présence peut être observée dans un contexte où les animaux des troupeaux laitiers sont porteurs asymptomatiques de divers pathogènes dans leur tube digestif [salmonelles, escherichia coli (E. coli), etc.]. Cette présence d'agents pathogènes peut poser des problèmes de santé majeurs, particulièrement pour les populations sensibles, dont les enfants. En moins d'un an, on a recensé trois séquences de cas groupés (soit une trentaine d'enfants atteints) de syndrome hémolytique et urémique (SHU) chez les tout petits (nourrissons et enfants de moins de 5 ans) à la suite d'une infection à E. coli hautement pathogène en lien avec la consommation de fromages au lait cru. Il s'agit d'un syndrome d'insuffisance rénale aiguë, entraînant chez ces très jeunes enfants, hospitalisés en urgence, un risque de séquelles rénales ou neurologiques définitives voire de décès. Si les bonnes pratiques d'élevage, l'hygiène de la traite et de la fabrication des fromages au lait cru permettent de réduire ce risque, elles ne permettent toutefois pas de garantir une absence d'exposition des consommateurs à ces pathogènes en consommant du lait cru ou des produits au lait cru. Ce risque majeur a conduit le ministère à rappeler les règles essentielles de consommation des fromages au lait cru et l'existence de populations à surrisque comme les enfants. Selon l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, il existe en effet un surrisque significatif (110 fois plus de risque de SHU) dans la tranche 0-5 ans par rapport à la population générale adulte. Ce surrisque diminue ensuite avec l'âge, et rejoint la population générale à partir de l'âge de 15 ans. Dans le contexte de la restauration collective scolaire, le respect de ces règles conduit à distinguer les produits servis aux enfants selon leur âge voire selon le type d'école (maternelle versus primaire, collège ou lycée). La diversité des organisations retenues dans chaque commune ne permet pas de définir un modèle national et il revient à chaque responsable de restaurant collectif de définir la manière la plus appropriée de répondre conjointement aux enjeux sanitaires d'une part et de qualité d'autre part. Dans le même temps, la loi dite EGALIM a fixé des objectifs de qualité des produits servis en restauration collective. Sa mise en œuvre va ainsi créer de nouveaux débouchés pour les producteurs de produits sous signes de qualité vers des publics moins sensibles.

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