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Stéphane Trompille
Question N° 24443 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 12 novembre 2019

M. Stéphane Trompille attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le changement de fonctionnement concernant la carte bancaire des demandeurs d'asile, initialement prévue pour le retrait, cette carte deviendra uniquement une carte de paiement. Le 23 juillet 2019, par une lettre adressée aux gestionnaires d'établissements d'accueil des migrants, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a annoncé que la carte bancaire permettant le paiement mensuel de l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA) allait changer de fonctionnement de manière assez radicale. Auparavant dans la limite de 5 retraits mensuels, un demandeur d'asile pouvait aller retirer de l'argent à un distributeur automatique. Cela ne sera plus possible à partir du 5 novembre 2019. Par un communiqué de presse du 12 Aout 2019, l'OFII procède à un report de la mise en place de la carte de paiement de deux mois (soit le 5 novembre 2019) pour permettre aux opérateurs engagés dans l'hébergement de demandeurs d'asile puissent équiper l'ensemble des structures en terminaux de paiement (TPE). Cependant, cette nouvelle utilisation soulève plusieurs interrogations notamment pour la gestion des actes de la vie courante. À titre d'exemple, la personne en demande d'asile ne pourra pas payer des trajets de bus car des TPE ou distributeurs de tickets de bus ne sont pas présents sur l'ensemble des stations d'une commune. Cela influence donc sur la recherche de logement mais également de travail par une discrimination sociogéographique possible. L'enclavement dans certains territoires reste un problème majeur. Dans la mesure où les laveries automatiques sont par essence très peu dotées de terminaux, seul le paiement en espèces est possible, la carte devient inopérante et la personne ne peut utiliser un moyen qui relève de la première nécessité. Même si l'expérimentation en Guyane se révèle être un succès, il convient de modifier certains aspects comme la limitation à 25 retraits par mois, ce qui par un effet pervers peut restreindre les demandeurs d'asile aux biens de la vie courante et aux activités sportives, culturelles, tant pour eux que pour leurs enfants. En effet les activités de « sorties scolaires » ne s'effectuent pas par carte bancaire, mais généralement par chèque ou espèces. De plus, le moyen pour consulter son solde pour un demandeur d'asile, se fait par téléphone sur un numéro payant et chaque personne ne dispose pas d'un téléphone, dès lors le coût pour les associations peut devenir important si elles doivent téléphoner pour chacun d'entre eux. Dans ce contexte il lui demande s'il est possible de mettre en place une carte de paiement et de retrait, car la dématérialisation reste un objectif louable, notamment pour la sécurité des personnes en demande d'asile et pour l'utilisation de l'ensemble des fonds alloués par mois. Néanmoins le manque de liquidités peut s'avérer à terme un motif d'exclusion et d'entrave pour les actes du quotidien.

Réponse émise le 15 septembre 2020

La mise en place d'une carte de paiement, sans possibilité de retrait, permet, en limitant la circulation d'argent liquide, d'éviter que l'allocation pour demandeur d'asile serve à d'autres fins que celles d'assurer la subsistance du demandeur d'asile, au moyen de dépenses courantes sur le territoire national. Ce faisant, les risques de fraudes et d'abus, liés à une trop grande liquidité de l'allocation, seront mieux maîtrisés. Avant sa généralisation au territoire métropolitain, cette mesure a fait l'objet d'une expérimentation durant plusieurs mois en Guyane : les retours ont été positifs et ont montré que la mise en place d'une carte de paiement en lieu et place d'une carte de retrait ne dégradait en rien les conditions de vie des demandeurs d'asile. En outre, le Gouvernement est à l'écoute des associations qui ont été reçues au ministère de l'intérieur et qui participent à un comité de suivi de la réforme pour garantir que celle-ci ne génère pas de difficulté. L'entrée en vigueur de la mesure, initialement prévue en septembre 2019, a été retardée afin de permettre aux opérateurs qui en étaient dépourvus de s'équiper de terminaux de paiement électronique (TPE) et d'assurer une information appropriée des demandeurs. De surcroît, un aménagement important du dispositif a été consenti avec le déplafonnement total du nombre de transactions autorisées. De la sorte, quel que soit le montant de leur transaction, les demandeurs d'asile peuvent continuer à acheter leurs produits de première nécessité dans les supermarchés et les commerces dotés de TPE. Le bilan réalisé par l'office français de l'immigration et de l'intégration a d'ailleurs confirmé la possibilité, pour les demandeurs d'asile, de procéder à de petits achats avec une carte « 100 % paiement », 44 % des transactions ayant porté sur un montant inférieur à 10 € en novembre 2019. De la même manière, alors que les associations craignaient que les demandeurs d'asile hébergés dans des zones rurales moins bien pourvues en commerces ne puissent disposer librement de leur allocation, il ressort de ce bilan que la carte de paiement a été largement utilisée sur l'ensemble du territoire métropolitain, selon une répartition régionale correspondant à celle des allocataires. Enfin, la démonétisation ne méconnaît pas le fait que l'accès des demandeurs d'asile aux espèces demeure utile dans leur vie quotidienne. Ainsi, la pratique du cashback, qui est réservée aux seuls commerçants par le code monétaire et financier (ce qui limite de facto le risque d'abus), permet de récupérer jusqu'à 60 euros en espèces dans le cadre d'un paiement par carte d'un euro minimum. La mise en œuvre de cette mesure continue de faire l'objet d'un suivi attentif. Un groupe de travail réunissant des associations d'horizons divers accompagnant les demandeurs d'asile a été mis en place. Il suit avec attention la mise en œuvre de cette mesure. Le cas échéant, le dispositif pourra être adapté de façon à résoudre les difficultés opérationnelles qui pourraient être signalées.

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