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Jean-Félix Acquaviva
Question N° 24469 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 12 novembre 2019

M. Jean-Félix Acquaviva alerte Mme la ministre des sports sur le risque d'inassurabilité qui pèse sur les gestionnaires de sites naturels d'escalade et qui pourrait entraîner à terme des cessations d'activité et la fin de la valorisation de ces sites naturels alors que l'attrait touristique envers les sports de pleine nature est de plus en plus important. En effet, la responsabilité en cas d'accident peut peser lourdement sur les gestionnaires de ces sites. À titre d'exemple, en 2016, une affaire a été jugée par le tribunal de grande instance de Toulouse à la suite d'un accident grave survenu en 2010 sur une falaise conventionnée et gérée par la FFME (Fédération française de montagne et d'escalade). Bien qu'il ait pu être prouvé que l'accident trouvait son origine dans le descellement d'un bloc de rocher, la FFME a été déclarée responsable de l'accident, selon l'article 1242 alinéa 1er du code civil (responsabilité du fait des choses). La responsabilité de plein droit a donc été retenue, sans faute de la FFME, et la force majeure et l'acceptation des risques n'ont pas été considérées comme causes exonératoires par le tribunal. Le montant des dommages et intérêts s'est élevé à 1,2 millions d'euros. Malgré un appel, le 21 janvier 2019 l'analyse des premiers juges a été maintenue. La FFME a déposé un pourvoi en cassation. Sur le long terme, on peut craindre ainsi une forme de déresponsabilisation des utilisateurs multipliant ainsi les pratiques imprudentes sur les sites. Face à cette situation, une démarche a été initiée en ce sens au Sénat dès la fin 2016 au travers d'une proposition de loi qui a été adoptée le 31 janvier 2018, prévoyant d'insérer un article 311-1-1 dans le code du sport ainsi rédigé : « Les dommages causés à l'occasion d'un sport de nature ou d'une activité de loisirs ne peuvent engager la responsabilité du gardien de l'espace, du site ou de l'itinéraire dans lequel s'exerce cette pratique pour le fait d'une chose qu'il a sous sa garde, au sens du premier alinéa de l'article 1242 du code civil ». Afin de rééquilibrer la situation entre utilisation et sécurité, sans pour autant dédouaner les acteurs de leurs éventuelles responsabilités, l'extension de l'exonération légale de responsabilité civile (responsabilité sans faute) à l'ensemble des propriétaires et des gestionnaires d'espaces relatifs aux sports de nature, permettrait de protéger les gestionnaires et de préserver l'utilisation des sites naturels. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître sa position sur cette question importante pour la diffusion des pratiques sportives de pleine nature et de l'informer du calendrier éventuel de la navette parlementaire de la proposition de loi précitée.

Réponse émise le 24 novembre 2020

La réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations a été adoptée par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ratifiée par la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018. Cette modernisation du droit des obligations doit désormais être complétée par la réforme du droit de la responsabilité civile. La direction des affaires civiles et du Sceau (DACS) a élaboré un projet de loi inspiré des nombreux travaux sur le sujet. Le projet de loi vise à améliorer et harmoniser l'indemnisation des victimes de dommages corporels, plaçant l'intégrité physique et psychique au sommet de la hiérarchie des intérêts protégés. Si ce principe n'est aucunement discutable il convient par ailleurs de s'assurer que les mesures proposées soient pleinement adaptées au développement et aux spécificités des pratiques sportives. S'agissant de la question de la responsabilité civile des gestionnaires d'Espaces, sites et itinéraires (ESI) de sports de nature, objet de cette intervention, il convient de préciser que les travaux engagés en 2016 par le ministère de la justice sur la responsabilité civile, ont, notamment, donné lieu à une consultation des parties prenantes. Le ministère chargé des sports ainsi que le mouvement sportif, à travers le Comité national olympique et sportif français, ont alors fait valoir la nécessité de prendre en compte les spécificités du sport en la matière. C'est pourquoi ce texte prévoit d'insérer au code du sport un article L. 311-1-1, afin d'alléger la responsabilité des fédérations et gestionnaires de sites naturels pour les dommages causés par des éléments du site naturel, en proposant une rédaction alternative. La première permet d'écarter la responsabilité de plein droit du fait des choses pour les risques normaux et raisonnablement prévisibles. La notion de « risques normaux et raisonnablement prévisibles » est très restrictive et ne semble pas en mesure d'assurer la protection juridique des propriétaires ou gardiens des espaces. Outre la difficulté d'application de l'acceptation des risques dans le cadre des sports de pleine nature, l'identification du gardien de la chose s'avère complexe. Une seconde version propose que le gardien de l'espace naturel dans lequel s'exerce un sport de nature ne soit responsable des dommages causés à un pratiquant sur le fondement de l'article 1243 du code civil que pour les aménagements qu'il a réalisés. La direction des sports et le mouvement sportif ont déjà eu l'occasion d'échanger sur ce projet de loi avec la DACS. Une concertation plus large du mouvement sportif est engagée et devrait permettre d'aboutir à une proposition plus adaptée aux attentes des propriétaires et exploitants des ESI de pleine nature.

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