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Josiane Corneloup
Question N° 25031 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 10 décembre 2019

Mme Josiane Corneloup attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les zones « zéro traitement ». La filière vitivinicole de Saône-et-Loire est très inquiète sur les conséquences de cette mesure ; la surface du vignoble couvre à peine 3 % de la superficie agricole utile mais constitue à elle seule le second poste excédentaire de la balance commerciale française après l'aéronautique. Avec cette nouvelle disposition, les viticulteurs devraient céder plusieurs mètres aux abords des zones habitées, cela va représenter plusieurs milliers d'hectares à arracher, car des pieds de vigne non traités donnent une vigne malade qu'il faut détruire, soit 985 hectares en Bourgogne. Ces mesures sont comparables à une expropriation sans indemnité. En outre, de nombreuses questions restent en suspens concernant les appellations d'origine contrôlée (AOC) pour certains vignobles qui verront alors leur surface réduite sans marge de substitution. Les viticulteurs sont sensibles à la problématique des traitements ; ils souhaitent privilégier le dialogue avec les habitants des communes viticoles ; ils sont prêts à adapter leurs traitements aux abords des zones habitées ; ils militent pour des zones de traitement adapté ZTA et souhaiteraient que les traitements homologués « agriculture biologique » soient exonérés de ZTA, qu'il soit permis de réduire la ZTA à zéro mètre au regard du matériel le plus performant et de la mise en œuvre de modalités de prévenance des riverains, d'autoriser la mixité bio/conventionnel au sein d'une même exploitation en fonction de l'identification des parcelles et enfin de prévoir au niveau national l'obligation de « zones tampons » entre l'espace agricole et l'espace constructible dans les plans d'urbanisation. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir prendre en considération les demandes des viticulteurs et de bien vouloir revoir les modalités des zones « zéro traitement » afin de les transformer en « zone de traitement adapté ».

Réponse émise le 10 mars 2020

La protection de la population vis-à-vis de l'exposition environnementale aux produits phytosanitaires, notamment des travailleurs, des personnes vulnérables telles que les enfants, les femmes enceintes et les personnes malades, ainsi que des riverains des zones traitées, est une question qui a mobilisé un grand nombre d'élus. Elle suscite des attentes fortes de la société civile. La loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi EGALIM) a prévu que l'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des bâtiments habités soit soumise, à partir du 1er janvier 2020, à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux. Ces mesures doivent être formalisées par les utilisateurs dans une charte d'engagements à l'échelle départementale. Sur la base de la loi du 30 octobre 2018, et également en réponse à la décision du 26 juin 2019 du Conseil d'État qui a enjoint au Gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour la protection des riverains dans un délai de six mois, une nouvelle réglementation a été récemment adoptée : - le décret n° 2019-1500 du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d'habitation, qui encadre l'élaboration des chartes ; - l'arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques, qui modifie l'arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et qui instaure notamment des distances de sécurité minimales. Ce dispositif renforce la protection des riverains et devrait faciliter le dialogue entre les agriculteurs et leurs voisins. Il vient compléter les règles existantes pour maitriser les risques liés à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, notamment les conditions figurant dans l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de chaque produit à l'issue d'une évaluation des risques. Les distances de sécurité ont été établies sur la base des recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) dans son avis du 14 juin 2019. Elles concernent les produits autres que les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle, les produits phytopharmaceutiques à faible risque et les substances de base. Les distances sont de 10 mètres pour les cultures dites « hautes » telles que la viticulture et l'arboriculture et de 5 mètres pour les cultures dites « basses » telles que les céréales et les cultures légumières. Elles peuvent être réduites à 5 ou 3 mètres dans le cadre des chartes départementales lorsque l'applicateur utilise un matériel performant en matière de réduction de la dérive de pulvérisation apportant des garanties équivalentes. Toutefois, une distance incompressible de 20 mètres est applicable en toutes circonstances lorsque les produits utilisés comportent certaines mentions de danger préoccupantes. Les chartes doivent permettre d'instaurer un dialogue entre utilisateurs et riverains, en vue de définir de manière concertée les mesures les plus adaptées à la situation départementale, dans le respect du cadre établi. La participation des élus sera déterminante pour faciliter ce dialogue. De plus, les chartes approuvées permettent de réaliser les traitements phytopharmaceutiques à proximité des habitations, le cas échéant en réduisant les distances de sécurité dans les conditions prévues par l'arrêté interministériel, pour assurer un niveau de protection équivalent. Ces mesures permettent de renforcer la protection des personnes sans attendre la réévaluation de tous les produits actuellement autorisés selon les nouvelles exigences européennes plus strictes, qui conduisent dans la plupart des cas à assortir l'AMM d'une distance de sécurité de 3, 5 ou 10 mètres. Lorsqu'elles figurent dans les AMM, ce sont ces distances de sécurité qui s'appliquent en lieu et place des distances générales prévues par l'arrêté du 27 décembre 2019. Les zones situées à proximité des bâtiments habités peuvent continuer à être cultivées et entretenues, par des moyens mécaniques ou en recourant aux produits exemptés de distances de sécurité. C'est le cas de la quasi-totalité des produits utilisés en agriculture biologique. Des mesures spécifiques d'accompagnement des agriculteurs sont prévues. Un appel à projet national de 25 M€ sera lancé au printemps 2020 pour soutenir l'équipement en matériels d'application des produits phytosanitaires les plus performants en matière de réduction de la dérive de pulvérisation. Cette enveloppe doublera le soutien régional à ce type d'investissement actuellement en place. En outre, aux côtés de l'Anses, les acteurs de la recherche et de l'innovation vont être mobilisés pour acquérir des références sur d'autres moyens de protection tels que les filets ou les haies et en mesurer l'efficacité, ce qui contribuera à augmenter le nombre d'alternatives pour la réalisation de traitements plus sûrs. Enfin, des travaux sont en cours pour pouvoir imposer l'obligation de distances ou de mesures équivalentes aux nouvelles habitations jouxtant les zones agricoles en application du principe de réciprocité.

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