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Danièle Cazarian
Question N° 25119 au Ministère de l'europe


Question soumise le 10 décembre 2019

Mme Danièle Cazarian attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les mouvements de protestation qui secouent le Liban depuis plusieurs semaines. Depuis le 17 octobre 2019, les Libanais ont investi les rues de leurs villes pour protester contre de nouvelles taxes souhaitées par le gouvernement, dont une sur les appels passés depuis l'application Whatsapp. Le combat contre cette taxe s'est vite généralisé, touchant une grande partie du pays, se transformant en protestations contre le gouvernement et ses dirigeants. Le Liban est un pays avec un fort contraste dans la qualité du niveau de vie de ses habitants : ainsi, d'après une étude menée par Lydia Assaoud, les 1 % les plus riches de la population perçoivent 25 % des revenus, alors que les 0,1 % les plus riches en captent 10 %, soit autant que ce que perçoivent les 50 % les plus pauvres (soit 2 millions de personnes). À noter également que 30 % de la population libanaise vit actuellement sous le seuil de pauvreté selon la Banque mondiale. Les protestataires dénoncent un « État gangréné par la corruption » et ont obtenu, le 29 octobre 2019, la démission du premier ministre Saad Hariri. Par la suite, c'est Mohammad Sahadi qui a été chargé de former un nouveau gouvernement. Mais, face au désir des manifestants d'un cabinet formé exclusivement de technocrates totalement indépendants des partis politiques au pouvoir, en vue d'élections parlementaires anticipées, M. Sahadi a renoncé à être premier ministre le 16 novembre 2019. À Beyrouth, Tripoli, Tir et Nabatiyé notamment, les manifestations continuent de marquer le quotidien des Libanais. Le pays est bloqué économiquement, la plupart des banques restent fermées et l'électricité n'est toujours pas assurée 24 heures sur 24. Le 29 octobre 2019, lors de son allocution devant les députés, M. le ministre a appelé les dirigeants libanais « à faire Liban ensemble », rappelant que les intérêts collectifs du pays doivent passer avant les intérêts personnels. Un mois plus tard, elle souhaiterait savoir comment la France pourrait aider un pays ami à sortir de cette crise en prenant en compte les revendications des protestataires, tout en garantissant la stabilité économique et politique du pays.

Réponse émise le 3 mars 2020

Depuis plusieurs mois, de nombreux Libanais demandent des changements d'ampleur sur le plan économique et social, comme sur le plan politique. Leurs aspirations sont profondes, légitimes, claires. Elles sont aussi largement partagées. Elles doivent être entendues. La situation du pays l'exige. La détérioration continue de l'économie libanaise est, en effet, un motif d'inquiétude particulier pour la France. Ses conséquences se font sentir de manière toujours plus prégnante pour les Libanais eux-mêmes. Le ralentissement prononcé de l'économie libanaise, la baisse du niveau de vie, en particulier des plus vulnérables, les difficultés des entreprises libanaises à importer, la crise des liquidités en lien avec les difficultés que connaît la livre, sont des évolutions préoccupantes. La crise actuelle a des racines profondes : l'économie libanaise souffre, en effet, de nombreuses insuffisances structurelles. C'est dans le but de faire face à celles-ci que la France avait réuni la Conférence économique pour le développement du Liban par les réformes et avec les entreprises (CEDRE) à Paris le 6 avril 2018. La France était convenue à cette occasion, avec les autorités libanaises et aux côtés de l'ensemble des bailleurs bilatéraux et multilatéraux, d'un contrat de confiance : la communauté internationale, d'une part, s'était engagée à mobiliser 11 Md$ au profit de projets essentiels à la rénovation en profondeur de l'économie libanaise, et les autorités libanaises, d'autre part, s'étaient engagées à mettre en œuvre d'importantes réformes économiques et de gouvernance, permettant de doter le Liban de structures transparentes et pleinement fonctionnelles. Les engagements pris lors de la conférence CEDRE gardent toute leur pertinence pour accompagner le rétablissement durable de la situation économique au Liban. La crise actuelle confirme la nécessité et l'urgence de répondre aux défis auxquels est confronté le Liban, et confirme également la pertinence des mesures préconisées lors de la conférence CEDRE d'avril 2018. C'est en ce sens que la France a réuni le Groupe International de Soutien au Liban (GIS) le 11 décembre 2019 à Paris. Cette réunion a également permis de préciser les réformes indispensables attendues de la part des autorités libanaises pour que la communauté internationale puisse accompagner le Liban. C'est à présent aux responsables libanais, et en particulier au gouvernement qui a été formé le 21 janvier 2020, de s'engager de manière effective au service de l'intérêt général de tous les Libanais. Le rôle essentiel de ce nouveau gouvernement est de répondre aux attentes économiques, sociales et politiques exprimées par les Libanais depuis le 17 octobre 2019 et de faire face à la crise profonde que traverse le Liban. Sur cette base, la France se tient prête à accompagner les autorités libanaises dans la mise en œuvre des réformes nécessaires. La France se tient, comme elle l'a toujours fait, aux côtés des Libanais.

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