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Philippe Gosselin
Question N° 25313 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 17 décembre 2019

M. Philippe Gosselin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés rencontrées par de nombreux vétérinaires retraités pour recouvrer les parts de retraite liées aux activités de prophylaxie des maladies réglementées (fièvre aphteuse, tuberculose, brucellose, leucose). Au cours de cette période débutée dans les années 60, l'État a fait appel à de nombreux vétérinaires. Ils étaient des collaborateurs occasionnels du service public, salariés de l'État, via les directions départementales des services vétérinaires sous la conduite du ministère de l'agriculture. À ce titre, ils auraient dû être affiliés aux organismes sociaux, à savoir la sécurité sociale et l'Ircantec. Cela n'a pas été fait. Ils sont ainsi privés de leurs droits à la retraite. Après plusieurs recours, le Conseil d'État a reconnu, par deux arrêts, la responsabilité entière de l'État le 14 novembre 2011. À la suite de ces décisions, un processus d'indemnisation amiable a été mis en place avec le ministère de l'agriculture, afin d'éviter la saisine des juridictions administratives par plusieurs centaines de requérants et d'assurer une indemnisation rapide des victimes des carences de l'État. Pour autant, à ce jour, ces vétérinaires à la retraite ont les pires difficultés à faire valoir leur droit à une retraite due. 612 dossiers sont encore en attente. L'État peut-il se soustraire à ses obligations ? L'État peut-il méconnaître les arrêts des plus hautes juridictions de la République ? Ce serait un déni de justice, un déni de démocratie dans un État de droit. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'entend prendre le Gouvernement sur ce dossier pour remédier à cette situation dans les plus brefs délais.

Réponse émise le 14 janvier 2020

L'État a tiré toutes les conséquences de la jurisprudence du Conseil d'État du 14 novembre 2011 relative à la responsabilité de l'État suite au défaut d'affiliation dont ont fait l'objet les vétérinaires au titre des activités réalisées avant 1990 sous mandat sanitaire. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice financier découlant de ce défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale. Cette procédure est longue et complexe. Elle s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire jusqu'en 1990. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable selon les praticiens et ce indépendamment du département d'exercice. 1 260 vétérinaires ont déposé un dossier recevable et complet, et accepté la proposition d'assiette sur laquelle ont été ou seront calculés les arriérés de cotisation dus aux caisses de sécurité sociale ainsi que les minorations de pension échues pour les vétérinaires déjà retraités. Au 19 décembre 2019, 1 169 vétérinaires et ayants droit de vétérinaires ont d'ores et déjà été indemnisés. Seule une infime minorité des demandeurs ayant reçu une proposition d'assiette ont fait le choix d'un désistement ou d'une action contentieuse avant établissement d'un protocole. Ainsi que vous y faites référence, certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières en raison d'un dépôt tardif. L'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions n° 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, n° 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si cet article prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi. Après plus de 6 années d'existence, l'activité de la cellule ministérielle strictement dédiée au processus transactionnel de régularisation, qui recevait encore récemment les dernières demandes de bénéfice de la procédure amiable, touche désormais à sa fin. En effet, la perspective de la clôture du processus s'appuie sur la diminution progressive et significative du volume de dossiers introduits ; elle a fait l'objet d'une annonce officielle en début d'année 2018, très largement relayée auprès des professionnels. La résolution des toutes dernières requêtes recevables a vocation à se poursuivre dans les prochaines semaines afin d'aboutir à l'indemnisation de l'ensemble des demandeurs éligibles, conformément aux engagements du ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Il convient de souligner que la clôture du processus transactionnel n'est aucunement de nature à priver les intéressés d'un droit effectif à l'indemnisation de leur préjudice, dont ils pourront toujours se prévaloir devant le juge administratif.V

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