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Jean Lassalle
Question N° 25646 au Ministère des armées


Question soumise le 31 décembre 2019

M. Jean Lassalle interroge Mme la ministre des armées sur la position de la France et son implication militaire dans la guerre en Libye. Le 18 novembre 2019, devant le conseil de sécurité des Nations unies, Ghassan Salamé, l'émissaire de l'ONU pour la Libye, a dressé un tableau accablant de la situation dans ce pays qui depuis l'offensive lancée sur Tripoli le 4 avril 2019 ne cesse de se dégrader. En effet, depuis l'intervention militaire française en 2011, décidée par Nicolas Sarkozy, la Libye comme tout le Sahel, pâtissent d'une déstabilisation durable, alimentée par la guerre par procuration que se livrent certaines puissances étrangères comme la Russie, l'Égypte ou les Émirats arabes unis qui paraissent les plus impliqués sur le terrain, par le nombre d'hommes et le matériel engagé. Le pays sert de sanctuaire aux djihadistes de tous bords et est devenu un marché ouvert où l'ensemble des terroristes de la zone sahélo-saharienne viennent se ravitailler en armes lourdes. Deux forces politiques se disputent le leadership libyen et revendiquent la légitimité à gouverner dans cette région, cette bataille armée ayant déjà eu pour conséquence plusieurs milliers de victimes. Pas moins de 60 attaques se sont produites depuis le début de l'année 2019 dans cette zone et celles qui visent les installations médicales placées sous l'autorité du gouvernement d'union nationale, sont, selon les observateurs, susceptibles de « constituer un crime de guerre ». Dans ce contexte, l'agenda français comme celui des Émirats ne semble pas des plus clairs et prête à confusion. Si Paris et Abou Dhabi désapprouvent le recours à la violence en Libye, et en particulier depuis l'offensive du 4 avril 2019, un doute plane sur la réalité de leurs intentions véritables. L'implication de matériel français a été prouvée. Les Émirats ont régulièrement engagé des équipements qu'ils ont achetés à la France, contribuant ainsi à la rendre complice de possibles crimes de guerre. Cette situation jette un sérieux trouble sur le respect des engagements internationaux français s'agissant de l'embargo décrété par les Nations unies sur les armes en Libye. Ce blocus est pourtant, selon les termes du secrétaire général de l'ONU, « d'une importance cruciale pour la protection des civils et le rétablissement de la sécurité et de la stabilité en Libye et dans la région ». C'est pourquoi il lui demande de préciser si la France compte adopter un positionnement clair afin de poursuivre un objectif de construction de la paix dans cette région conformément à l'exigence de protection de la souveraineté des peuples et de la défense des ressortissants.

Réponse émise le 10 novembre 2020

C'est le 13 janvier 2011 que se sont déroulées les premières manifestations en Libye, inspirées par le Printemps arabe tunisien. Les dures répressions du colonel Khadafi à Benghazi dès le 1er février ont ensuite conduit le pays à basculer dans sa première guerre civile. L'intervention militaire qui a suivi pour tenter de mettre fin à la répression a été déclenchée dans le cadre de la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies, du 17 mars 2011), soutenue par la Ligue Arabe. Une période de détente et de reconstruction a bien eu lieu de fin 2011 à début 2014. Elle a été marquée par les premières élections libres en Libye en juillet 2012 qui ont amené au pouvoir le Congrès général national (qui a remplacé le Conseil national de transition créé pendant la guerre civile), par la réouverture de la plupart des ambassades occidentales et la mise en place de nombreux projets de coopération internationale. Ce n'est qu'à partir de février 2014 qu'a commencé la deuxième guerre civile libyenne. Les ingérences des parrains étrangers prolongent l'enlisement de ce conflit. Egypte, EAU et mercenaires russes appuient les forces pro-Tobrouk. Le camp pro-GEN est soutenu par le Qatar et la Turquie, qui engage des moyens militaires très importants en Libye et joue un rôle déstabilisant dans ce pays, mais également en Méditerranée centrale. La France respecte totalement l'embargo sur les armes, décrété par les Nations unies. Elle participe à cet égard à l'opération de l'Union européenne Irini qui a pour tâche principale la mise en œuvre des moyens permettant l'application de la résolution 2292 du CSNU relative à l'embargo sur les armes. Cet embargo ne concerne que la livraison de matériels militaires en Libye, et non l'utilisation par des pays tiers de matériels militaires sur le sol libyen. Les priorités de la France en Libye restent la lutte contre le terrorisme et l'immigration illégale. La France reconnait le Gouvernement d'Entente Nationale (GEN) comme seul gouvernement libyen légitime. Mais elle dialogue aussi avec les représentants de l'Armée nationale libyenne (ANL) dans le strict cadre de ses priorités nationales. Elle s'interdit en revanche toute aide militaire aux acteurs libyens qui pourrait influer sur les rapports de force au niveau local. Seule une solution politique, reconnue par la communauté internationale pourra restaurer la paix en Libye. C'est pourquoi nous appelons les parties à un cessez-le-feu immédiat. Nous parlons aux deux camps et participons activement au groupe de travail sécuritaire du comité international de suivi du processus de Berlin.

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