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Stéphanie Kerbarh
Question N° 26209 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 28 janvier 2020

Mme Stéphanie Kerbarh attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur l'application de la loi Évolution du logement, de l'aménagement et du numérique dite loi « Élan » du 23 novembre 2018 dans les territoires. Cette loi a apporté plusieurs modifications en matière de droit de l'urbanisme. Tout d'abord, l'article 42 de la loi modifiant l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme dispose que, s'agissant des « constructions ou installations nécessaires aux activités agricoles ou forestières ou aux cultures marines [...] le changement de destination de ces constructions ou installations est interdit ». Elle souhaiterait savoir si cette interdiction de changement de destination concerne uniquement les constructions agricoles ou forestières nouvellement autorisées ou si elle concerne également les constructions existantes. Les services de l'État proposent une lecture restrictive de cet article, en préconisant de l'appliquer à l'ensemble des bâtiments existants. Cela a pour conséquence d'entraîner un refus de changement de destination dans les bâtiments déjà identifiés dans les PLU, ce qui met en péril le patrimoine bâti local. Par ailleurs, ce même article 42 modifie l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, créant ainsi une nouvelle zone s'intitulant « espace intermédiaire déjà urbanisé ». Les DDTM ont tendance à appliquer strictement les critères exposés dans la loi, ce qui conduit à une requalification des terrains constructibles en non constructibles. Cette situation pénalise dans la neuvième circonscription de Seine-Maritime plusieurs projets de territoire, notamment un projet de revitalisation d'un ancien centre héliomarin dans la commune de Saint-Pierre-en-Port. Dans ce projet précis, l'État, par le biais de la Banque publique d'investissement et de l'Agence de développement pour la Normandie se portent garant des acquéreurs auprès des institutions bancaires à hauteur de 225 000 euros. Actuellement, la requalification des terrains réalisés par la DDTM entraîne un arrêt du projet. Elle souhaiterait donc connaître ses intentions sur cette question.

Réponse émise le 20 octobre 2020

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN) a modifié la loi littoral à plusieurs titres. Parmi ces évolutions, figure l'assouplissement apporté à la dérogation au principe d'urbanisation en continuité prévue, pour les constructions agricoles, à l'article L. 121-10 du Code de l'urbanisme : d'une part, la condition tenant à l'incompatibilité de l'installation ou de la construction agricole ou forestière avec les zones habitées, antérieurement applicable, a été supprimée ; d'autre part, le bénéfice de cette dérogation a été étendu aux activités de culture marine. En contrepartie et afin d'éviter tout détournement, la loi ÉLAN a expressément interdit le changement de destination de ces constructions ou installations (alinéa 4 de l'article L. 121-10 du Code de l'urbanisme). Pour l'application de cette disposition, il n'y a pas lieu de distinguer les constructions édifiées avant l'entrée en vigueur de la loi ÉLAN et celles autorisées en vertu des nouvelles dispositions de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme. Cette nouvelle disposition ne s'applique pas, en revanche, aux bâtiments agricoles anciens, édifiés avant l'institution du régime du permis de construire par la loi du 15 juin 1943 et dont l'usage agricole a depuis longtemps cessé en raison de leur abandon. La jurisprudence considère en effet que l'usage initial de ces bâtiments ne leur confère pas une destination agricole (CE,  28 décembre 2018, n° 408743). L'interdiction de changement de destination prévue par l'article L. 121-10 ne leur est donc pas applicable. La loi ÉLAN renforce, par ailleurs, le rôle des documents de planification dans la déclinaison de la loi littoral à l'échelon local. C'est ainsi qu'il revient au Schéma de cohérence territorial (SCoT) de déterminer les critères d'identification et la localisation des secteurs déjà urbanisés nouvellement prévus à l'article L. 121-8 du Code de l'urbanisme, puis au plan local d'urbanisme de procéder à leur délimitation. La loi ÉLAN donne une liste de critères pour aider à l'identification des secteurs déjà urbanisés, seuls secteurs qui, complémentairement aux agglomérations et aux villages, pourront donner lieu à une certaine densification : densité et continuité de l'urbanisation, présence d'équipements ou de lieux collectifs, structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics d'eau potable, d'électricité, d'assainissement. Cette liste constitue pour les collectivités une grille de lecture pour caractériser ces secteurs au niveau local. En effet, ils n'ont volontairement pas été définis au niveau national afin d'en permettre une définition adaptée selon les territoires. Il apparaît que le SCoT du Pays des Hautes Falaises doit évoluer en vue d'identifier les secteurs déjà urbanisés. Le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de la communauté d'agglomération Fécamp Caux Littoral devra, par la suite, procéder à leur délimitation au regard des critères précisés par le SCoT. Dans cette période où les documents d'urbanisme évoluent pour tenir compte des nouvelles dispositions de la loi ÉLAN, certains territoires peuvent en effet rencontrer des difficultés pour faire aboutir leurs projets d'urbanisation. Toutefois, les préfets et leurs services demeurent pleinement mobilisés pour apporter leur appui et leur expertise aux communes qui les solliciteraient pour les accompagner.

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