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Christophe Blanchet
Question N° 26715 au Secrétariat d'état Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action


Question soumise le 18 février 2020

M. Christophe Blanchet interroge Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, sur la différence entre les sanctions des entreprises privées et celles de la fonction publique à l'encontre des comportements inappropriés à l'égard des femmes. Dans le cadre de son mandat, M. le député a été interpellé par le directeur général des services d'une communauté de communes de sa circonscription, concernant les difficultés rencontrées pour sanctionner de tels comportements au sein de ses services. Aujourd'hui, dans la société la parole se libère et les femmes qui subissent ces violences ont décidé de ne plus rester silencieuses. Depuis 2017, de nombreuses avancées législatives ont permis de soutenir leur combat. Toutefois, dans bon nombre d'administrations la sanction n'est pas toujours simple et rencontre parfois des obstacles à son application. Ainsi, les conseils disciplinaires de différentes administrations semblent apprécier de manière plus indulgente les cas avérés de comportements inappropriés à l'égard des femmes que le secteur privé au sein de ses entreprises. Une femme du secteur public et une femme du secteur privé doivent pouvoir bénéficier d'un même niveau de protection et les individus commettant ces délits doivent être traités avec une égale sévérité. Par conséquent, il lui apparaît clair qu'une augmentation de la sévérité des sanctions au sein des entreprises publiques est nécessaire au vu des différences notables entre secteur privé et public. Il lui demande donc si elle compte prendre des décisions en ce sens.

Réponse émise le 7 juillet 2020

La prévention et la lutte contre les violences sexuelles et sexistes font l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics à la fois au sein de la société française mais aussi des collectivités publiques. Sur le plan disciplinaire, la loi portant statut général de la fonction publique du 13 juillet 1983 prévoit que toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. Plus particulièrement encore, la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 prévoit expressément en ce sens des sanctions pour les faits de harcèlement sexuel et les agissements sexistes [1], ainsi que pour les faits de discrimination [2] ; elle précise l'obligation de protection de la santé et de l'intégrité des fonctionnaires. Les règles procédurales statutaires attribuent le pouvoir disciplinaire à l'autorité investie du pouvoir de recrutement de l'agent fautif, laquelle doit, sauf pour les faits les moins graves, prendre obligatoirement l'avis d'une instance paritaire réunie en conseil de discipline avant de prononcer une sanction à l'encontre de l'auteur des faits. La sanction doit respecter certains principes fondamentaux notamment celui de la proportionnalité par rapport aux faits reprochés : la sanction ne peut être ni moins sévère, ni plus sévère que ne le justifient les faits commis au regard du contexte dans lequel ils sont intervenus. Ce principe impose aux autorités publiques de peser au plus juste le rapport entre le contenu de la sanction et la faute. Si la proportionnalité n'est pas respectée, la décision encourt l'annulation devant le juge administratif. En 2018, 3 365 sanctions ont été prononcées dans la fonction publique de l'État. Parmi celles-ci, 104 hommes et 2 femmes ont été sanctionnés pour des faits de violences sexuelles ou sexistes dont 42 ont été révoqués ou mis à la retraite d'office et 29 ont été exclus temporairement de fonctions pour une période comprise entre trois mois et deux ans (sanction la plus sévère de l'échelle des sanctions dans la fonction publique après la révocation). De plus, sur la même période, hors violences sexuelles ou sexistes, 268 hommes et 77 femmes ont été sanctionnés pour incorrections, violences, insultes et harcèlement moral. Toujours sur la même période, 48 sanctions ont été prononcées pour divers manquements déontologiques incluant des faits de discrimination. Ces chiffres, issues de l'enquête statistique annuelle en matière disciplinaire, contribuent notamment à mettre en lumière les sanctions pour les violences sexuelles et sexistes commises dans la fonction publique. Un tableau spécialement établi à cet effet et publié dans le rapport annuel sur l'État de la fonction publique participe à cet effort de sensibilisation. Aucun élément à ma connaissance n'indique que l'administration sanctionnerait moins sévèrement ses agents que ne le font les employeurs du secteur privé pour de tels faits. Les autorités publiques compétentes exercent souverainement leur pouvoir disciplinaire dans le respect de l'équilibre entre les droits de la victime, l'intérêt du service et les droits de la défense, sans qu'il soit permis, à circonstances égales, de prononcer des sanctions ni plus sévères, ni moins sévères que celles prononcées dans le secteur privé. Par ailleurs, il convient de rappeler que l'accord relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 30 novembre 2018 a été transcrit dans la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique et a conduit à l'inscription au sein de la loi portant statut général de la fonction publique, d'une disposition rendant obligatoire pour l'ensemble des administrations, la mise en place de dispositifs de signalement, de traitement et de suivi des violences sexuelles et sexistes ainsi que des discriminations, en amont de la procédure disciplinaire. Ce dispositif permet également le recueil des signalements effectués par les témoins de tels agissements. En outre, la loi permet aux témoins cités devant une instance disciplinaire, de bénéficier de l'assistance d'une tierce personne, s'ils s'estiment eux-mêmes victimes de tels agissements de la part du fonctionnaire convoqué devant cette instance. En parallèle, la formation et la sensibilisation des agents publics permettent aussi de contribuer à faire évoluer les comportements. En complément de la formation à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes délivrée obligatoirement aux encadrants, aux représentants des personnels, aux agents des services de ressources humaines et aux élèves des écoles de service public, une action de sensibilisation à l'égalité professionnelle et à la lutte contre les stéréotypes de genre et les discriminations est en cours de déploiement pour tous les agents publics et élèves des écoles de services publics. L'ensemble de ces actions témoignent que ces thématiques sont au centre des préoccupations gouvernementales conformément au discours du Président de la République prononcé le 25 novembre 2017 à l'occasion de la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. [1] Art. 6 ter « est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux faits de harcèlement sexuel » et d'agissement sexiste (l'article 6 bis interdit l'agissement sexiste définit comme « tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant »). [2] Articles 6 et 6 bis.

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