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Paul Molac
Question N° 2680 au Ministère de l'économie


Question soumise le 7 novembre 2017

M. Paul Molac attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le recours abusif aux pénalités de retard pouvant altérer directement la santé économique de nombreuses entreprises, notamment dans le cadre des marchés publics. En effet, en cas de retard imputable au titulaire dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixée, il est appliqué une pénalité journalière de 1/3 000e soit du montant hors taxes de l'ensemble du marché, soit de la tranche considérée ou du bon de commande selon le contrat établi avec la collectivité. Si l'objectif premier de ces pénalités de retard est d'assurer l'exécution du marché dans des délais contraints, cette intention est, dans certains cas, détournée par les acheteurs publics, profitant du retard de certains corps de métier pour appliquer successivement des pénalités de retard aux opérateurs intervenant à la suite de leurs opérations. Ajoutées aux retards de paiement, ces pénalités engendrent régulièrement des problèmes de trésorerie récurrents au sein des entreprises concernées. Il souhaite savoir quelles mesures le ministre pourrait prendre afin d'éviter tout détournement abusif, par les acheteurs publics, du dispositif lié à la mise en œuvre des pénalités de retard.

Réponse émise le 27 février 2018

Les pénalités de retard sont organisées par des dispositions contractuelles du marché public et ont pour objet de réparer forfaitairement le préjudice qu'est susceptible de causer au pouvoir adjudicateur le non-respect, par le titulaire du marché, des délais d'exécution contractuellement prévus (CE, 19 juillet 2017, centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, no 392707). L'application de ces pénalités constitue un droit contractuel de l'administration auquel elle peut renoncer. Un retard dans l'exécution du marché est dommageable et coûteux pour l'acheteur. Celui-ci est donc fondé à appliquer à son cocontractant des pénalités pouvant être lourdes en cas de manquements persistants ou répétés à ses obligations contractuelles. Les pénalités de retard ne sont toutefois applicables qu'à l'encontre du titulaire du contrat qui est personnellement responsable du retard pris dans l'exécution du marché public. Aussi, un opérateur économique ne peut se voir appliquer de telles pénalités s'il démontre que le retard est imputable à un évènement extérieur, à un autre opérateur ou à un tiers intervenu en amont ou lors de l'opération. Le juge vérifie en cas de litige si cette condition de l'imputabilité du retard à l'opérateur économique auquel les pénalités sont appliquées est remplie (CE, 15 novembre 2012, hôpital de l'Isle-sur-la-Sorgue, no 350867). Ce principe permet ainsi d'éviter que les acheteurs fassent un usage abusif des pénalités de retard, tel que celui consistant à appliquer des pénalités de retard à l'ensemble des opérateurs intervenant sur une opération de travaux alors que leur retard est la conséquence du retard fautif de l'un des titulaires intervenant en amont de l'opération. Par ailleurs, le recours abusif aux pénalités de retard n'est pas sans conséquence pour l'acheteur. Un opérateur économique qui se verrait appliquer des pénalités de manière injustifiée serait fondé à contester le montant des acomptes ou du décompte du marché ainsi qu'à saisir le juge pour obtenir leur remboursement. Le paiement indu de pénalités serait alors analysé comme un retard de paiement donnant lieu de plein droit, au bénéfice du titulaire, au versement d'intérêts moratoires importants (taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement majoré de huit points de pourcentage) ainsi qu'au versement d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement dans les conditions prévues par les articles 39 et 40 de la loi no 2013-100 et le décret no 2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique. Au surplus, en vertu de l'article 1343-2 du code civil, lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière, le titulaire serait également en droit de solliciter la capitalisation des intérêts.

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